
Soufisme , spiritualité et citoyenneté
Bariza Khiari | 29 mai 2015
Interview de Bariza Khiari parue dans Le Droit de Vivre, du mois de mai 2015. En tant que citoyenne, la sénatrice, qui vante les beautés de la mystique soufie, se dit « farouchement républicaine et sereinement musulmane ».
Bariza Khiari, élue au Sénat depuis 2004, travaille de longue date sur la problématique de l’islam en France. Elle a ainsi écrit une contribution pour le Parti socialiste, « République et islam », et signe plusieurs tribunes, dont « De quoi le « vote musulman » est-il le nom ? » sur Médiapart (1). Aujourd’hui Bariza Khiari s’affirme comme musulmane soufie. Interviewée par le Bondy blog (2), elle déclarait « Moi, je représente ce que je suis. C’est-à-dire une citoyenne, française, qui est en fidélité avec la tradition qui l’a portée. » Ce qui l’a conduite a écrire pour la Fondapol une étude intitulée « Le soufisme : spiritualité et citoyenneté ».
Le Droit de Vivre : Comment mieux concilier islam et laïcité ?
Bariza Khiari : Si, selon moi il ne faut pas toucher a la loi de 1905, il faut néanmoins trouver les modalités permettant la construction de lieux de cultes ouverts sur la cite. Il faut que nos imams en France parlent français, ils ne peuvent plus être sous le contrôle de pays étrangers. Ils doivent comme le dit le Coran, respecter les lois du pays d’accueil. Je souhaite une « normalisation » de l’islam dans notre République, ce sera le test de notre crédibilité et de la légitimité de nos principes laïques. Le soufisme est laïc. Ainsi, pour ma part, je ne veux pas du voile à l’école -je serais d’ailleurs même pour le port de la blouse ! Il y a une très grande méconnaissance de l’islam en France, ne serait-ce que de la part des musulmans eux-mêmes. C’est du fait de Khomeiny si l’islam s est transforme en code pénal, devenant une idéologie à combattre. Les musulmans ne doivent pas accepter cela.
Le Droit de Vivre : Pourquoi parler du soufisme ?
Bariza Khiari : Le soufisme est une confrérie, on y vient par initiation « Le soufisme est une praxis, la spiritualité doit trouver une expression dans la vie séculière » Je pense que le soufisme doit désormais sortir de cette nature réservée, de cette spiritualité qui n’était qu’intérieure. Il y a une parole a porter face au désastre du wahhabisme, devenu l’orthodoxie. Il y a un renouveau très important du soufisme, grâce à de grands congrès et un festival des cultures soufies à Fez.
Il faut mettre en avant des modèles positifs d’identification et travailler sur les droits des femmes, notamment dans les pays du Maghreb. Appuyons nous sur la tradition qui est essentielle, afin de l’intégrer et de la dépasser pour aller vers la modernité ! Les soufis doivent s’affirmer et permettre cela !
Il faudrait que la France devienne « le Harvard de l’islam ». Je suis farouchement républicaine et sereinement musulmane. Repensons l’islam et distinguons bien spiritualité et soumission.
En conclusion, moi, je n’achète pas « Charlie Hebdo », mais la loi permet à ce journal d’exister ! Alors, vive le crayon face à la Kalachnikov : je prends le crayon ! »
Bariza Khiari, est auteure de Le soufisme : spiritualité et citoyenneté, 4ème note de la série « Valeurs d’islam » de la Fondation pour l’innovation politique.
(1) Mediapart.fr, 17 avril 2014 et « Faire triompher la culture contre la barbarie » 9 mars 2015.
(2) Entretien dans le Bondy blog-Libération, 21 janvier 2015 « Les musulmans dans une injonction contradictoire » par Saad Khiari.
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