Pourquoi la condamnation de Marine Le Pen fracture la droite intellectuelle

Samuel Dufay | 20 avril 2025

Impartialité des juges, État de droit : la condamnation de la cheffe de file du RN divise les penseurs conservateurs. Sont-ils irréconciliables ?

La  confrontation  a  parfois  des  airs  de  dialogue  de  sourds.  Dans  leur  indignation,  les  détracteurs de la condamnation de Marine  Le  Pen  tendent  à négliger l’essentiel : l’illégalité et la gravité du détournement de fonds sanctionné par les magistrats, qui  ont  évalué  le  préjudice  à  4,1 millions d’euros. « Il faut se garder des réactions tonitruantes, tempère le philosophe Pierre Manent.  La  démocratie  n’est  pas  en  cause,  le  droit du RN à présenter un candidat à la prochaine présidentielle n’est en rien entamé par cette décision. »

Quant  à  ceux  qui  se  refusent  à toute contestation de la justice, ils peuvent faire preuve d’un « littéralisme juridique » (Pierre Vermeren) un brin obtus, au risque d’occulter le caractère politique de la condamnation. Dominique Reynié,   directeur  général de  la  Fondapol,  s’étonne  de  la  «  sacralisation  du  juge  et  de  sa décision », qui n’existe pas en droit : « S’interroger sur une décision  de  justice,  voire  la  critiquer,  est tout à fait sain. On confond parfois indépendance de la magistrature et infaillibilité de  la  justice.  »  D’autant  que la politisation de l’autorité judiciaire, symbolisée par le fameux « mur des cons » du Syndicat de la magistrature, suscite des craintes légitimes quant à son impartialité.

Le  politologue  impute  cette confusion à l’effondrement de la culture juridique en France, en particulier chez les intellectuels : «   Les  principes  du  droit  sont  désormais  vécus  comme  des  énoncés  arbitraires,  détachés  de  toute  logique,  regrette-t-il. L’enseignement   de   la   culture   juridique   a   été  délégitimé  par  une  mauvaise  compréhension  des  sciences  sociales,  un déconstructionnisme qui nous explique que si la règle de droit existe, on pourrait aussi bien en avoir une autre. »

 

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