PS, LR : toujours rien, ou presque, sur le front des idées

Dominique Reynié | 05 août 2018

Si les socialistes et les Républicains ont donné de la voix à l’occasion de l’affaire Benalla, les deux partis sont encore sous le coup du séisme électoral de 2017. Et leurs propositions se font toujours attendre.

Il était quasiment inaudible depuis qu’une partie de ses élus avait signé la « confiance » au gouvernement Philippe, l’an dernier. Mais, depuis l’affaire Benalla, le Parti socialiste redonne de la voix. Jusqu’à co-signer, la motion de censure d’une gauche unie, aux côtés des communistes et des Insoumis, phénomène inédit depuis plus de quinze ans !

Dans la foulée, Les Républicains tentaient, à leur tour, de renverser un gouvernement fragilisé par les soupçons pesant sur la tête de la macronie, l’Elysée. Un an après l’électrochoc « Macron » propulsant au sommet de l’Etat un électron libre de tout appareil partisan, l’opposition dite « classique », de droite comme de gauche, restée en état de sidération après le désaveu historique infligé par des électeurs désillusionnés, serait-elle sur le point de se réanimer ?

Aucune stratégie de conquête

« Malgré le bilan en demi-teinte d’Emmanuel Macron, celui de l’opposition est encore plus sombre, relève Dominique Reynié, directeur général de la Fondapol, un cercle de réflexion libéral. Les LR comme le PS n’ont aucune stratégie de conquête, aucun programme alternatif et aucune organisation. Leurs champs de contestation, des 80km/h à l’affaire Benalla dont, il est vrai, on mesure encore mal l’impact, paraissent bien périphériques aux sujets majeurs qui préoccupent les Français, comme le chômage ou l’immigration. »

La critique se nourrit de l’intérieur même des deux partis historiques. « La maladie chronique de la droite, c’est l’apathie intellectuelle », lançait, en juin dernier, Bruno Retailleau. Quelques jours après la diffusion d’un dépliant aux accents caricaturaux, « Pour que la France reste la France », le très filloniste président du groupe LR au Sénat mettait en garde Laurent Wauquiez et son état-major : « Il faut se méfier des slogans. Le pire pour nous serait de remplacer la pensée par des tracts. »

Même préoccupation du côté de Valérie Pécresse qui avec « Libres ! », s’attelle à « renouveler le logiciel de la droite », « ce que ne fait pas Laurent Wauquiez », glisse-t-on dans l’entourage de la présidente de la Région Ile-de-France. Quant au limogeage, en juin dernier de Virginie Calmels, il fut aussi tonitruant que symptomatique, la numéro 2 des LR étant en charge… du projet du parti !

« Une fuite des cerveaux »

Au PS aussi, la volonté de « travailler » sur le long terme du nouveau patron, Olivier Faure, laisse dubitatifs nombre d’élus et de militants. « Ce travail n’est pas visible, regrette Luc Carvounas, député du Val-de-Marne. Le cercle vertueux que furent nos victoires aux élections nationales et locales jusqu’en 2014 a créé autour de nous un rideau de fumée qui nous a empêchés de nous pencher sur notre propre bilan. »

Mais les LR et le PS doivent également faire face à une « fuite des cerveaux. » Préférant « redémarrer » hors des appareils, l’ex-LR Xavier Bertrand a choisi comme tremplin la Région des Hauts-de-France qu’il préside tout en s’entourant d’un aréopage de « penseurs » au sein de La Manufacture. A gauche, Benoît Hamon, le « Monsieur 6 % » du PS lors de la dernière présidentielle, tente avec Génération. s de se bâtir un nouvel avenir.

« Le FN reste le parti d’opposition le plus crédible pour les Français »

Mais à qui profiterait cette désagrégation annoncée ? La France Insoumise, porte-parole assumée de la colère sociale depuis un an, ne s’est-elle pas trop cantonnée au simple rôle de parti contestataire ? « Il existe toujours une France protestataire, souligne Dominique Reynié. Elle pourrait tout à fait s’incarner dans le Rassemblement national qui, malgré la défaite de Marine Le Pen l’an dernier, reste le parti d’opposition le plus crédible pour les Français. »

Le premier test sera les élections européennes de mai 2019. Julien Dray annonce être candidat pour mener cette bataille au nom des socialistes. Cela laisse neuf mois au terme desquels les Républicains et le PS devront se réinventer. Un peu court, peut-être, pour une métamorphose. Même en politique.

 

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