Le quinquennat présidentiel, un modèle contesté et contestable
Alexis Gendry | 15 avril 2017
Le président sortant François Hollande, non candidat à sa propre succession, vit ses dernières semaines au palais de l’Élysée. Comme Nicolas Sarkozy avant lui, l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste n’aura passé « que » cinq ans dans la peau d’un chef d’État, le référendum de 2000 ayant transformé le septennat présidentiel en quinquennat. Retour sur l’histoire d’une réforme qui continue à faire débat.
Du septennat au quinquennat
En France, le septennat voit le jour à l’aube de la Troisième République, le président monarchiste Patrice de Mac Mahon étant le premier à le mettre en pratique. Cependant, près de 90 ans plus tard, ce modèle commence à être discuté, notamment à cause de sa longueur. Le général de Gaulle, en poste depuis 1959, refuse toutefois d’y renoncer au profit du quinquennat, jugeant ce dernier incompatible avec l’esprit de la Vème République.
Durant son mandat, le président Georges Pompidou se montre largement favorable au quinquennat, mais échoue à l’instaurer. C’est finalement Jacques Chirac qui parviendra, en pleine cohabitation sous le gouvernement Jospin, à organiser un référendum pour déterminer de la durée idéale du mandat présidentiel, les deux septennats consécutifs de François Mitterrand et les nombreuses cohabitations ayant grandement précipité les choses. Le 24 septembre 2000, dans un contexte de forte abstention, les Français sont 73,21% à se prononcer en faveur du quinquennat, et en 2002, Jacques Chirac devient le premier président français à être élu pour une durée de cinq ans.
Institutionnellement parlant, le quinquennat ne change strictement rien : il permet seulement des mandats présidentiels plus courts et, grâce à la coïncidence des élections présidentielles et des élections législatives, réduit fortement le risque de cohabitation. Cependant, depuis 2002, ce sujet n’a jamais réellement cessé de faire débat.
Une décision encore controversée…
Se voulant plus moderne que le septennat, le quinquennat reste un sujet controversé. Par opposition à son prédécesseur, ce type de mandat est en effet souvent pointé du doigt pour sa brièveté. Beaucoup semblent penser que les deux années amputées à la durée du mandat ne permettent pas au président de s’ériger pleinement comme un chef d’État, dans le sens où la portée politique des réformes qu’il conduit est grandement entravée par le temps réduit qu’il passe au pouvoir. Les présidents sortants ayant coutume de se représenter, l’argument principal contre le quinquennat consiste à dire qu’en plus de la première année du mandat où le président prend ses marques, ce dernier perd aussi une année en faisant campagne pour sa réélection. Selon cette théorie, le chef d’État ne disposerait alors que de trois véritables années pour effectuer des réformes concrètes.
Selon un autre observateur, la réforme du quinquennat n’a pas « tranché entre un régime présidentiel et un régime parlementaire ». L’opposition entre les deux derniers présidents de la Vème République, Nicolas Sarkozy et François Hollande, apparaît ici pertinente : alors que le premier s’est souvent vu qualifié d’hyper président, le second s’est rapidement effacé afin de renvoyer l’image d’un président « normal ». Cette réflexion avait d’ailleurs, par le passé, animé les anciens présidents. François Mitterrand par exemple, demeurait réticent à cette nouvelle forme de mandat et voyait tous d’un mauvais œil la superposition des scrutins présidentiels et législatifs.
Certains parlementaires s’étaient aussi publiquement prononcés contre le quinquennat : c’est notamment le cas de Xavier Bertrand, alors député de l’Aisne, pour qui un mandat aussi court ne permettait pas à un président de « rectifier ses erreurs s’il juge qu’il s’est trompé ». Le président de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde, avait lui aussi attaqué le quinquennat : il souhaitait en effet redonner « le souci essentiel du temps long au chef de l’État » qui, du fait de la brièveté du mandat, se retrouve souvent à gérer le quotidien, tâche « normalement dévolue au Premier ministre ».
…mais pas en passe d’être révisée
Le maire de Drancy avait d’ailleurs initialement prévu, au printemps 2016, de déposer une proposition de loi visant à instituer un septennat non renouvelable, mais s’était vu devancer par son confrère François Rochebloine. Cette proposition de loi n’a au final jamais été examinée par les députés. D’autres figures importantes du paysage politique français s’étaient aussi montrées favorables à un retour au septennat, comme Jean-Pierre Raffarin, Arnaud Montebourg, Xavier Bertrand ou encore Gérard Larcher.
Pourtant, à quelques semaines d’une nouvelle élection présidentielle, la remise en question du quinquennat ne semble pas figurer parmi les priorités des différents candidats. Seul Benoît Hamon, vainqueur de la primaire socialiste mais distancé dans les sondages, souhaite revenir au septennat, et faire en sorte que le président de la République puisse être tenu « responsable devant le Parlement via une véritable procédure d’impeachment » à l’américaine. Quant à Marine Le Pen, qui avait fait du retour au septennat une de ses propositions phares en 2012, elle a tout bonnement supprimé cette mesure de son projet pour l’élection présidentielle à venir.
Le quinquennat présidentiel a donc beau avoir ses détracteurs, il semble pourtant lui rester de beaux jours devant lui.
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