L’exemple scandinave, modèle ou alibi ?
Les hommes politiques français ont pris la bonne habitude de regarder à l’extérieur des frontières pour y trouver des modèles qui réussissent en matière constitutionnelle, économique ou sociale. Après les modèles anglais, américain, japonais, allemand ou hollandais, la mode est à nouveau aux « pays du nord de l’Europe » ou au « modèle scandinave ». Anna Stellinger, directeur Economie-Société de la Fondation pour l’innovation politique, propose un décryptage de ce modèle que certains candidats à l’élection présidentielle aiment à présenter comme un exemple à suivre pour la France.L’engouement du personnel politique français pour le « modèle scandinave » repose sur un vrai malentendu. C’est en effet oublier les réformes structurelles que ces pays ont engagées dans les années 1990, réformes qui ont confié aux acteurs économiques et sociaux bien des tâches qui revenaient auparavant à l’Etat.
L’exemple scandinave est ainsi méconnu et sa réussite faussement interprétée. La « sécurité sociale professionnelle », par exemple, ne relève pas de l’Etat, mais de la responsabilité des entreprises. Même ignorance concernant la législation sur la protection de l’emploi, bien moins développée en Scandinavie qu’en France. En effet, au « partage du travail » les pays scandinaves ont préféré développer des politiques d’activation du marché de l’emploi. La mobilité est une priorité, comme l’activité des jeunes, des femmes et des seniors. Ce qui passe certes par une forte protection sociale, mais aussi par une réduction de la protection et de la stabilité de l’emploi.
La réussite économique et sociale des pays scandinaves ne relève donc pas de l’Etat providence porté par la grande figure d’Olof Palme, mais des réformes constitutionnelles, économiques et sociales conduites depuis 15 ans : activation de toutes les catégories de la population, responsabilité des entreprises, assouplissement des règlementations et redéfinition des missions de l’Etat providence. L’expérience scandinave peut, dans ce sens là, montrer un chemin à suivre à la politique française.
Aucun commentaire.