Élections, médias et réseaux sociaux : un espace public en décomposition
Avant-propos
Introduction
Nos sources d’information : de la diversification à la fragmentation
En 2022, les médias traditionnels demeurent la première source d’information pour suivre les élections
L’orientation politique de l’auditoire des chaînes d’information en continu : gare aux préjugés
Les réseaux sociaux bouleversent notre rapport à l’information et à la politique
Les médias n’échappent pas à la crise de la représentation
Les médias et l’obstacle de la défiance
Les médias présentent une réalité dans laquelle trop d’électeurs ne se reconnaissent pas
Évitement, lassitude et refus : le rejet de l’actualité, un phénomène émergent
Les forces protestataires se retrouvent et se renforcent sur les réseaux sociaux
Libertés mais désinformation : les réseaux sociaux vus par leurs utilisateurs
Les ingérences étrangères dans les élections sont redoutées par l’opinion
Vote protestataire, Gilets jaunes et antivax : les réseaux sociaux, médias protestataires
Avant-propos
Des réseaux pas toujours sociaux
par Lire la Société
Merci à la Fondation pour l’innovation politique d’avoir compilé pour la Journée du Livre Politique un ensemble de ses études approfondies concernant les médias, l’information et les réseaux sociaux, avant tout concernant la France mais aussi l’étranger. Le résultat de ce travail est édifiant. Jamais l’opinion n’a été autant informée et jamais elle n’a autant douté de l’information. Nous sommes passés de l’ère de la connaissance à l’ère de la suspicion, de l’ère de l’échange à l’ère de la vindicte.
Ces vingt dernières années ont vu, presque en même temps, tout à la fois l’émergence des chaînes d’information en continu et l’apparition des réseaux sociaux, allant de Facebook à TikTok en passant par Twitter, Instagram, YouTube et autres. Il faut le reconnaître : nous avons tout d’abord été fascinés par les possibilités ouvertes du fait de cette explosion médiatique, qui allait nous permettre de tout savoir en temps réel, d’échanger en permanence avec nos amis, de faire connaître nos opinions à la terre entière. Il semblait fini ce temps de gloire réservé à quelques personnes privilégiées dans leur accès aux médias. Chacun allait avoir enfin son moment « warholien ».
L’expérience nous a fait quelque peu déchanter. Car si l’ensemble de ces supports reste un apport formidable à nos vies quotidiennes, il recèle en même temps la possibilité pour des communautés de haine ou de désinformation de se regrouper. Des puissances étrangères se sont immiscées dans les scrutins électoraux de nombreuses démocraties, tandis que des flots de fake news ou de désinformation ont gangrené nos débats.
Cela ne revient pas à rejeter ces réseaux sociaux qui recèlent de formidables opportunités de savoir et d’échanges, mais il convient aujourd’hui de davantage vérifier les informations et de mettre en veille permanente notre capacité à contrôler la véracité des propos que nous lisons ou qui nous sont adressés.
Introduction
Voir Dominique Reynié, « L’ipotesi di una pacificazione dello spazio pubblico : la scommessa persa di Gabriel Tarde », in Sabina Curti (dir.), Gabriel Tarde. L’opinione et la folla (1901-2021), Vérone, Meltemi, 2022, p. 47-67.
Voir Paul F. Lazarsfeld, Bernard Berelson et Hazel Gaudet, The People’s Choice. How the Voter Makes Up His Mind in a Presidential Campaign [1944], New York, Columbia University Press, 2021 ; Elihu Katz et Paul F. Lazarsfeld, Personal Influence. The Part Played by People in the Flow of Mass Communications [1955], Londres, Routledge, 2005.
La dislocation du monde médiatique : symptôme et facteur de la crise démocratique
par Dominique Reynié
La série d’études quantitatives réalisées par la Fondation pour l’innovation politique aide à comprendre pourquoi la dislocation du monde médiatique est à la fois un symptôme et un puissant facteur de la crise démocratique. En lui-même, le principe du pluralisme favorise la multiplication des sources d’information et de discussion, instituant un régime d’information continue. Il s’agit d’une réalité observable depuis l’invention de la presse quotidienne, qui avait stupéfié son époque. Les « nouvelles du jour », qui signent l’apparition du « journalisme », sont alors discutées tout au long de la journée. On doit donc considérer que le principe de l’information continue est inhérent à l’idée d’une presse quotidienne, ce n’est ni une anomalie ni une dérive. L’histoire des médias montre que l’effort de multiplier les moyens d’information, d’accroître leurs performances, leur impact et leur vitesse de diffusion est constant. Dans le dernier tiers du XIXe siècle, la gazette périodique succède au livre, puis apparaît la presse quotidienne, rapidement suivie par les premiers médias de l’instant, ceux de la communication interpersonnelle, avec le téléphone, et ceux de la communication de masse, avec la radio puis la télévision.
Mais, à présent, le Web donne à la communication de masse une puissance inédite et qui semble illimitée. La figure du citoyen internaute illustre cette révolution radicale de la communication : le nombre des médias tend à devenir au moins égal au nombre d’individus qui composent les publics. « Au moins égal » dans la mesure où un individu peut émettre à plusieurs reprises sous des identités différentes ou depuis des plateformes et applications différentes. Chacun peut posséder plusieurs comptes sur un réseau social donné, ou un compte sur plusieurs réseaux sociaux, voire les deux. Les publics se composent donc d’une multitude d’auditeurs, qui sont désormais également des médias. La téléphonie mobile et le Web ont doté le plus modeste des citoyens de moyens de communication réservés jusque-là aux institutions, publiques ou privées, et aux grandes organisations, politiques, syndicales ou religieuses. La technologie a fait rapidement émerger une figure paradoxale et limite, celle de l’«individu-média1». Désormais, la communication de masse devient l’art de parler à des récepteurs qui sont autant d’émetteurs. En un sens, cette réalité n’est pas nouvelle, si l’on songe à la conversation, qui a toujours existé. Depuis qu’elles sont apparues, les « nouvelles » rapportées quotidiennement par la presse ont donné aux conversations un rythme, une abondance et une intensité inédits. Mais la puissance acquise aujourd’hui par les conversations qui ont cours sur les réseaux sociaux est bien plus grande encore.
Ce n’est pas non plus absolument nouveau si l’on se souvient que, déjà dans les années 1940 et 1950, un certain nombre de chercheurs ont montré par des études devenues classiques que les messages émis à destination du public ne parvenaient jamais sans avoir été suspectés, filtrés, transformés, adaptés2. Dans certains cas, le message, l’opinion ou l’information étaient purement et simplement censurés par des mécanismes psychosociologiques. On sait que ces mécanismes opèrent pour la conservation des intérêts, des valeurs, des normes ou de la vision du monde des groupes d’appartenance des individus visés par la communication. Il n’y a pas de psychologie sans sociologie. Il n’y a pas d’individu sans groupe d’appartenance. Par conséquent, aucun message ne peut parvenir intact, tel qu’il a été conçu, à des destinataires supposés. Ces mêmes chercheurs ont permis de comprendre que la communication n’est jamais directe, quelle que soit la puissance du moyen employé, qu’elle est toujours elle-même médiatisée par les cultures des groupes, que ces barrières, ces filtres sont activés par ceux que qu’ils nomment « leaders d’opinion ». Ces derniers ne sont pas, comme cette expression pourrait le laisser penser aujourd’hui, des chefs ou des représentants reconnus comme tels, institutionnalisés. Au sein d’un groupe, ce sont simplement, des individus plus saillants que les autres, des référents naturels, au sens où ils n’ont pas été formellement désignés pour remplir cette fonction, laquelle n’est d’ailleurs pas identifiée comme pourraient l’être, par exemple, celle de nos « influenceurs » contemporains. La théorie des deux étapes des flux de communication (two-step flow of communication) renvoie à l’identification d’un mécanisme de communication interactif en rupture avec la conviction, dominante dans l’entre-deux-guerres, qui était que la communication était capable d’atteindre tous les esprits exposés au message, d’agir efficacement, comme voulu par l’émetteur, sur leurs représentations et leurs opinions, c’est-à-dire de les modifier, en somme, de persuader les récepteurs d’adopter un point de vue qui n’était pas le leur avant la réception du message.
Cette théorie des deux étapes montre déjà que les messages ne peuvent être, au mieux, que le résultat de coproductions entre l’émetteur et les destinataires. Mais les mécanismes de coproduction sont si complexes qu’il est impossible d’anticiper un résultat, lequel n’est donc pas toujours celui que l’émetteur espérait et peut même aller contre le but qu’il s’était fixé.
Ce qui est nouveau, c’est d’abord la puissance acquise par les conversations numériques. Nous sommes passés d’un monde social, où chaque individu pouvait être mis en contact avec quelques dizaines, tout au plus quelques centaines de personnes, à une époque où chacun peut être connecté à des milliers, voire des dizaines de milliers d’autres personnes. Le réseau de connexions dans lequel la plupart des individus sont désormais imbriqués atteint une épaisseur nouvelle. Ce qui est nouveau, également, c’est que les moyens de communication mis à la disposition des individus ont décuplé leur capacité d’agir en multipliant les opportunités de le faire : texte, son, image et vidéo en très haute définition sont accessibles depuis un seul appareil, de plus en plus miniaturisé comme en témoigne le passage de l’ordinateur personnel au téléphone mobile. Et, enfin, ce qui est aussi nouveau, c’est que les individus en réseau ont accédé à la conscience de leur nouvelle puissance.
Les réseaux sociaux adressent aux médias professionnels ou institutionnels un procès constant, parfois virulent, les accusant de manipuler, de dissimuler leurs intérêts, d’user d’un pouvoir qui ne leur revient pas. On ne peut éviter de comparer ce procès à celui que les populistes font aux partis de gouvernement. On ne peut éviter d’observer que les deux procès ont atteint ensemble leur plus grande puissance au cours de la même période, depuis environ vingt-cinq ans. La valeur de l’information est souvent soumise à la suspicion, presque toujours contestée. Or, y compris en matière d’information, ces réseaux sociaux peuvent susciter une confiance que les médias classiques ont perdue. En même temps, ils contribuent fortement aux phénomènes de radicalisation des opinions, ils enferment les citoyens dans des communautés de convictions peu à peu étanches les unes aux autres.
Ces bouleversements sont d’autant plus préoccupants qu’il ne sera pas possible de bénéficier d’un fonctionnement satisfaisant de la démocratie sans l’appui et le relais d’un ordre médiatique relativement stable, efficace et reconnu. La démocratie moderne est un régime représentatif. La représentation est double : elle est politique et élective, dans le choix compétitif des gouvernants, et elle est médiatique, dans l’organisation d’un espace public pluraliste. En effet, l’avènement de la démocratie parlementaire est intimement lié à l’émergence d’une presse en mesure de promouvoir un espace national de discussion, de contribuer à l’animer et à le réguler. Dès lors, que devient la démocratie quand l’espace public s’universalise par la globalisation, quand les auditoires sont composés de dizaines de millions d’individus, lesquels s’apparentent de plus en plus à autant de médias ?
Enfin, la liberté d’opinion et la liberté de la presse que nous connaissons aujourd’hui ont été formalisées dans la seconde moitié du XIXe siècle. Il existe des origines philosophiques et juridiques communes aux différents régimes de liberté ainsi que des convergences. Pendant un siècle, la liberté d’opinion et la liberté de la presse se sont exercées dans un univers juridiquement, techniquement et culturellement circonscrit au cadre national. Ce n’est plus tout à fait le cas désormais. L’espace public numérique déborde les frontières. Les messages émis circulent potentiellement partout dans le monde. L’affaiblissement tendanciel des sanctions pénales contre la presse et l’extension continue de la liberté d’opinion sont observables entre la fin du XIXe siècle et la fin des années 1980. Un tournant a lieu en 1988, avec la publication des Versets sataniques de Salman Rushdie et les réactions violentes suscitées à travers le monde par ce roman, ce qui avait provoqué plusieurs tragédies et rendu la vie particulièrement difficile à l’écrivain, victime d’une violente agression encore récemment. Depuis lors, d’autres crises de ce type ont éclaté, telles que l’assassinat de Theo van Gogh, aux Pays-Bas en 2004, l’affaire des caricatures danoises en 2005 ou encore l’attentat islamiste contre la rédaction de Charlie Hebdo en 2015.
À la multiplication des drames et des menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et la liberté d’opinion dans le monde démocratique vient s’ajouter la puissance d’entreprises, principalement américaines mais aussi désormais chinoises, qui sont les nouveaux éléments majeurs du monde médiatique. Ces gigantesques firmes, dotées d’un pouvoir transnational, depuis une position oligopolistique ou monopolistique, sont privées (Google-Alphabet, Apple, Facebook-Meta, Amazon, Microsoft…) ou publiques de fait, dans le cas de la Chine, compte tenu de la nature de son régime politique totalitaire (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi, TikTok…). Ces nouveaux pouvoirs médiatiques nous rappellent que si les législations sont nationales et libérales, l’espace de réception des messages est devenu global et donc potentiellement répressif. Le libéralisme pénal se heurte désormais à la répression culturelle. Si l’on ajoute à cela, d’une part, le retour d’une censure d’État, appliquée en particulier aux réseaux sociaux et aux sites Internet au nom de la lutte contre le terrorisme, et, d’autre part, le filtrage ou la capacité de référencement que possèdent en raison de leur position oligopolistique les grandes compagnies qui font le Web, l’opinion et la presse risquent de perdre une bonne part de leur liberté conquise depuis le XVIIe siècle et dont le déploiement n’avait pas cessé depuis.
Ce travail de la Fondation pour l’innovation politique repose sur l’étude des données d’opinion que nous collectons depuis plusieurs années. Les principales ressources mobilisées sont les cinq vagues de notre indicateur de la protestation électorale, 2022, le risque populiste en France, l’étude 2022, présidentielle de crises, et trois enquêtes successives à la suite des résultats de l’élection présidentielle et des élections législatives en 2022, débouchant sur notre publication Mutations politiques et majorité de gouvernement dans une France à droite.
Chacune de ces enquêtes a été administrée auprès d’un échantillon de plus de 3 000 personnes par l’institut OpinionWay. Chaque échantillon a été constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de catégorie socioprofessionnelle, de catégorie d’agglomération et de région de résidence. L’échantillon a été interrogé par questionnaire auto-administré en ligne sur système Computer Assisted Web Interview (CAWI). Ces travaux sont en libre accès sur fondapol.org et les données d’opinion sur data.fondapol.org. |
Nos sources d’information : de la diversification à la fragmentation
En 2022, les médias traditionnels demeurent la première source d’information pour suivre les élections
La plupart des données citées ici sont issues de Dominique Reynié (dir.), Mutations politiques et majorité de gouvernement dans une France à droite, Fondation pour l’innovation politique, septembre 2022.
Nous considérons deux agrégats : d’une part, les « médias traditionnels », rassemblant ceux qui s’informent à partir des grandes chaînes télévisées, des chaînes d’information en continu, des journaux (papier ou en ligne) ou de la radio ; d’autre part, les « nouveaux médias », rassemblant ceux qui s’informent à partir de YouTube, de blogs, de forum ou de réseaux sociaux.
Données issues de Dominique Reynié (dir.), Mutations politiques…, op. cit.
Nous avons cherché à connaître les trois principales sources d’information des électeurs pour suivre les élections en 20223. Pour l’élection présidentielle, les « médias traditionnels4 » restent les plus utilisés, devant les « nouveaux médias » et, en troisième position, les discussions interpersonnelles.
Dans le détail, citées par 62% des personnes interrogées, les grandes chaînes de télévision généralistes conservent le leadership médiatique, devant les chaînes d’information en continu (41%), les discussions avec la famille (34%), les journaux (33%) et la radio (29%). Les réseaux sociaux viennent ensuite (23%), suivis par les discussions dans le cadre professionnel (8%) et, enfin, les blogs ou les forums sur Internet (6%). La hiérarchie des sources d’information concernant le suivi des élections législatives est similaire.
Suivre l’élection présidentielle : les différences intergénérationnelles confirment le bouleversement en cours
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Fondation pour l’innovation politique – septembre 2022
Les utilisateurs quotidiens de Twitch, TikTok et Telegram, appartenant principalement à la classe d’âge la plus jeune, disent avoir avant tout utilisé les réseaux pour suivre la campagne présidentielle5. Sur le long terme, l’appétence des nouvelles générations pour les plateformes numériques devrait continuer à modifier le rapport à la politique et accentuer la crise des médias traditionnels.
Élection présidentielle : Twitch, TikTok ou Telegram sont les premières sources d’information chez leurs utilisateurs quotidiens
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
L’orientation politique de l’auditoire des chaînes d’information en continu : gare aux préjugés
La consommation médiatique pour suivre l’élection présidentielle de 2022 peut être mise en relation avec la proximité partisane. On voit alors que les électeurs proches des partis de droite sont plus nombreux à utiliser les chaînes d’information en continu6 que la moyenne de l’échantillon (41%)7 : 68% des personnes pour les proches de Reconquête ! et 47% des proches des Républicains. Néanmoins, 45% des proches de La République en marche (LREM) se sont informés sur l’élection présidentielle via ces médias, soit en plus grand nombre que les proches du Rassemblement national (43%), de La France insoumise (39%), ou encore du Parti socialiste (39%).
De même, un tiers (33%) des répondants s’informant via ces chaînes ont voté pour Emmanuel Macron lors du premier tour (28% en moyenne), 22% pour Jean-Luc Mélenchon, soit un niveau conforme à son score national, et 16% pour Marine Le Pen (contre 23% en moyenne). Au second tour, les deux tiers (68%) de ceux qui s’informent sur les chaînes d’information en continu ont voté pour Emmanuel Macron (59% en moyenne), tandis que 32% lui préféraient Marine Le Pen (41% en moyenne).
À noter que les électeurs qui ont suivi le scrutin présidentiel via la radio ont davantage voté pour Marine Le Pen (52%) que pour Emmanuel Macron (48%). Le vote Marine Le Pen est majoritaire chez les auditeurs de la radio, de même que chez les utilisateurs des blogs ou des forums sur Internet (53% contre 47%). En revanche, le vote en faveur d’Emmanuel Macron est majoritaire parmi les téléspectateurs des chaînes d’information en continu.
Les réseaux sociaux bouleversent notre rapport à l’information et à la politique
Données issues de Dominique Reynié (dir.), 2022, présidentielle de crises, Fondation pour l’innovation politique, avril 2022.
L’usage des réseaux sociaux s’est imposé8: 92% des électeurs utilisent au moins un réseau social. Si le niveau atteint 98% chez les moins de 35 ans, il est de 90% chez les 50-64 ans et encore de 82% parmi les 65 ans et plus. En moyenne, les trois quarts des personnes interrogées déclarent utiliser Facebook (77%) et YouTube (77%). Moins massif, l’usage de WhatsApp (59%) et d’Instagram (47%) reste très répandu. Twitter (32%) et TikTok (27%) sont moins utilisés, suivis de Twitch (15%) et de Telegram (15%). Les trois quarts des répondants (77%) indiquent utiliser quotidiennement au moins un réseau social.
Les médias sociaux sont plus utilisés par les jeunes, à l’exception de Facebook
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Les femmes (83%) sont plus nombreuses que les hommes (72%) à utiliser Facebook. Elles sont aussi plus nombreuses sur WhatsApp (63%) que les hommes (55%), sur Instagram (56%, contre 39%) et sur TikTok (32%, contre 21%). En revanche, l’utilisation de YouTube, Twitter, Telegram et Twitch ne varie pas selon le genre. La proportion de femmes (82%) à utiliser un réseau social tous les jours est également supérieure à celle des hommes (71%).
La question se pose de savoir s’il existe une relation entre le réseau social utilisé et le degré d’urbanisation du lieu d’habitation de l’utilisateur. Ainsi, Facebook est massivement utilisé dans les communes rurales (79%) et les villes de moins de 20.000 habitants (80%), un peu moins dans l’agglomération parisienne (73%). YouTube est également un peu plus utilisé (79%) dans les villes de plus de 100 000 habitants que dans les communes rurales (75%). Ces chiffres, très convergents, montrent que la numérisation de l’accès au débat public et à l’information est devenue une réalité commune, malgré les profondes différences qui séparent des mondes sociaux, tels que le monde rural, les villes, petites et moyennes, et les métropoles.
Les classes aisées sont plus consommatrices de réseaux sociaux
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Données issues de Dominique Reynié (dir.), 2022, le risque populiste en France – Vague 5, Fondation pour l’innovation politique, octobre 2021.
Données issues de Dominique Reynié (dir.), 2022, le risque populiste en France – Vagues 2 et 3, Fondation pour l’innovation politique, octobre 2020.
Une incursion dans la façon dont s’informent les Français permet de voir deux univers, partagés entre les médias traditionnels et les nouveaux médias, notamment les réseaux sociaux. Parmi les personnes interrogées, 14% des répondants disent utiliser YouTube, les blogs, les forums ou les réseaux sociaux comme première source pour s’informer de l’actualité en général. Ce chiffre monte à 50% pour ceux qui utilisent Telegram9, 46% pour les utilisateurs de TikTok, 38% pour Twitch, 31% pour Twitter et 28% pour Instagram. Les utilisateurs quotidiens de WhatsApp (15%) et de Facebook (18%) sont les moins nombreux à utiliser les réseaux sociaux comme première source d’information.
Outre la quête d’information, une partie (21%) de ceux qui utilisent les réseaux sociaux disent y discuter « souvent » ou « de temps en temps » de la manière dont les choses se passent dans le pays avec des gens qu’ils y rencontrent10. Un premier regard sur les caractéristiques socio-économiques confirme que les jeunes sont les plus nombreux à discuter régulièrement sur les réseaux sociaux de la manière dont les choses se passent en France : cela concerne 30% des 18-24 ans et 29% des 25-34 ans, contre 23% des 35-49 ans, 18% des 50-64 ans et 14% des 65 ans et plus. On notera qu’il n’y a pas de différence entre les hommes et les femmes (21 % dans les deux cas), ni entre catégories socioprofessionnelles supérieures et catégories socioprofessionnelles inférieures (24% contre 22%).
Il faut distinguer les personnes qui déclarent utiliser les réseaux pour discuter et celles qui déclarent les utiliser également pour s’informer. Il en ressort que 50% des personnes utilisant les réseaux sociaux pour « discuter de la manière dont les choses se passent dans le pays » disent avoir l’impression que les personnes qu’ils y rencontrent partagent leurs avis. Mais parmi ceux qui se servent des réseaux sociaux pour s’informer, une large majorité (62%) estime y rencontrer des gens qui partagent leurs avis.
Les médias n’échappent pas à la crise de la représentation
Les médias et l’obstacle de la défiance
Les données de l’enquête 2022, présidentielle de crises (avril 2022) faisaient état d’une forte défiance de l’opinion à l’égard des médias : seuls quatre Français sur dix répondaient faire confiance aux médias, une majorité (58%) déclarant ne pas leur faire confiance (2% n’avaient pas répondu).
La plupart des personnes interrogées n’ont pas confiance dans les médias
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Données issues de Dominique Reynié (dir.), 2022, présidentielle de crises…, op. cit.
Voir Guillaume Caline, « Baromètre 2023 de la confiance des Français dans les media », kantarpublic.com, janvier 2023.
Cité in Aude Carasco, « Baromètre des médias 2023 : l’intérêt pour l’actualité bondit », lacroix.com, 23 janvier 2023.
La défiance envers les médias est particulièrement élevée chez les électeurs favorables aux mouvements protestataires de type anomiques11. Ainsi, ceux qui indiquent avoir une image positive du mouvement des Gilets jaunes et des antivax font moins confiance aux médias (35% contre 40% en moyenne). Cette faible confiance envers les médias se retrouve parmi les répondants qui ont une image positive des anti-passe vaccinal (33% contre 40% en moyenne). Les personnes interrogées qui se sentent proches de Reconquête !, le parti d’Éric Zemmour, témoignent également d’une défiance plus importante (81%) vis-à-vis des médias que l’ensemble de l’échantillon (58%). Le niveau de défiance est plus proche de la moyenne pour les sympathisants du RN (59%) ou de LFI (61%). On note que les électeurs proches de LREM sont ceux chez lesquels la confiance dans les médias est la plus élevée (62%). L’utilisation des réseaux sociaux, même chez ceux qui les utilisent tous les jours, ne semble pas jouer un rôle dans la confiance des répondants dans les médias, à l’exception des utilisateurs quotidiens de Telegram (63%) et de YouTube (66%), dont le niveau de défiance dans les médias est supérieur à la moyenne (58%).
Une enquête parue début 2023 observe une hausse de la confiance accordée aux médias par les Français12. Guillaume Caline, directeur enjeux publics et opinion de Kantar Public France, estime que « la guerre en Ukraine est un événement d’ampleur qui a suscité un vif intérêt, les Français ont cherché à comprendre ce qu’il se passait, après deux années pendant lesquelles le traitement médiatique était très concentré sur le Covid-19, ce qui avait suscité des angoisses, des inquiétudes, et une forme de lassitude13 ».
Les prochaines enquêtes d’opinion sur la confiance dans les médias devront être suivies avec attention afin de déterminer si cette tendance n’est que conjoncturelle ou si, à l’inverse, elle se confirme sur le temps long.
Les médias présentent une réalité dans laquelle trop d’électeurs ne se reconnaissent pas
Données issues de Dominique Reynié (dir.), 2022, le risque populiste en France – Vague 5, op. cit.
La crise de la représentation politique, richement documentée par les cinq vagues de notre « indicateur de la protestation électorale », s’accompagne d’une crise de la représentation médiatique14. Une large majorité des répondants (58%) estime que « la plupart du temps, quand ils regardent l’actualité dans les médias, ils ont l’impression que ceux-ci parlent de sujets qui ne les concernent pas ». C’est 20 points de plus (38%) que ceux qui pensent que les médias traitent de sujets qui les concernent (4% des personnes interrogées n’ont pas répondu).
Ceux qui ont le sentiment que les médias ne traitent pas de sujets qui les concernent répondent aussi que leur niveau de vie s’est dégradé ou que leur style de vie est menacé
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Fondation pour l’innovation politique – octobre 2021
Ceux qui ne se reconnaissent pas dans la manière dont les médias traitent l’actualité sont plus nombreux chez les non-diplômés ou les peu diplômés (64%) que chez ceux qui disposent d’un diplôme supérieur au niveau bac + 2 (49%), chez les ouvriers (63%) et les employés (58%) que dans la catégorie des artisans, commerçants et chefs d’entreprise (41%). On notera que les personnes qui ont une image très positive du mouvement des Gilets jaunes sont plus enclines (63%) à porter ce jugement négatif sur le traitement médiatique de l’actualité, de même que les répondants qui considèrent que « voter ne sert pas à grand-chose » (69%).
Les Gilets jaunes et la représentation médiatique
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Fondation pour l’innovation politique – octobre 2021
Si nous considérons les sources d’information déclarées, ce sont ceux qui s’informent via les blogs ou les forums sur Internet (68%), via YouTube (65%) et via la radio (62%) qui sont les plus nombreux à ne pas se sentir concernés par les sujets dont parlent les médias. Si le sentiment que les médias traitent de sujets qui ne les concernent pas est un peu moins répandu parmi ceux qui suivent l’actualité via les chaînes d’information en continu (52%), les chaînes généralistes de télévision (55%) et les réseaux sociaux (56%), cette perception domine toujours.
Évitement, lassitude et refus : le rejet de l’actualité, un phénomène émergent
Données issues de Dominique Reynié (dir.), Mutations politiques…, op. cit.
À la question : « En général, est-ce qu’il vous arrive d’éviter de suivre l’actualité ? », 24% des répondants répondent « la plupart du temps », 38% « de temps en temps », 27% « rarement » et 10% « jamais »15.
Parmi les personnes qui disent éviter de suivre l’actualité « la plupart du temps » et « de temps en temps », les femmes (66%) sont plus nombreuses que les hommes (59%). Il en va de même pour les moins de 35 ans (66%) par rapport aux 65 ans et plus (54%), les personnes peu diplômées (64%) par rapport à celles qui possèdent un diplôme supérieur à bac + 2 (60%) ou encore celles dont le revenu mensuel est inférieur à 2000 euros par mois (67%) par rapport à celles dont le revenu est supérieur à 3500 euros par mois (53%). Au niveau des catégories d’agglomération, ce phénomène est également très majoritaire partout : il concerne 66% des personnes en région parisienne comme dans des villes dont la population est inférieure à 20.000 habitants, 64% des habitants des communes rurales, 61% des électeurs dans les villes de 20.000 à moins de 100.000 habitants et encore 58% des métropolitains hors Paris. Partout le refus de suivre l’actualité est massif.
L’actualité « me déprime », n’est pas digne de « confiance » ou « parle trop souvent de problèmes contre lesquels je ne peux rien »
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Fondation pour l’innovation politique – septembre 2022
Les forces protestataires se retrouvent et se renforcent sur les réseaux sociaux
Libertés mais désinformation : les réseaux sociaux vus par leurs utilisateurs
Si la plupart des répondants utilisent les réseaux sociaux, nos données montrent qu’une bonne partie d’entre eux ne fait pas confiance aux informations qui y circulent.
Dans l’ensemble, les électeurs ne font pas confiance aux informations circulant sur les réseaux sociaux
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Grille de lecture : 50% des répondants indiquent ne pas avoir confifiance dans les informations qui circulent sur YouTube, 27% indiquent leur faire confifiance, et 22 % ne connaissent pas assez la plateforme pour se prononcer.
Voir Jules Grandin et Tom Fevrier, « Présidentielle 2022 : quels sont les candidats les plus suivis sur les réseaux sociaux ? », lesechos.fr, 18 décembre 2022.
Les leaders politiques de partis protestataires sont très présents sur les réseaux sociaux 16. Derrière le président Emmanuel Macron, les candidats les plus suivis sur Facebook et Twitter sont Marine Le Pen et Jean Luc Mélenchon. Ils sont aussi, avec Éric Zemmour, ceux qui ont le plus d’abonnements sur Instagram et TikTok. Jean Luc Mélenchon est également particulièrement suivi sur YouTube.
Nombre d’abonnés des candidats à l’élection présidentielle (au 27 juin 2022)
Source :
lesechos.fr
Les personnes interrogées estiment largement que les réseaux sociaux offrent à n’importe qui la possibilité de s’exprimer sur des sujets qu’il ne maîtrise pas : si cette réponse réunit 71% des répondants issus des classes moyennes ou 66% de ceux issus des classes populaires, elle est encore partagée par 57% des répondants issus des classes aisées.
Il en va de même pour l’idée selon laquelle les réseaux sociaux favorisent la diffusion de fausses informations : les répondants des classes populaires (64%), des classes moyennes (68%) ou des catégories aisées (57%) ont en partage cette appréciation.
Cependant, l’utilisateur d’un réseau social fait davantage confiance aux informations présentes sur ce réseau que la moyenne des répondants. Ceux qui utilisent YouTube, Twitter, Twitch et Telegram quotidiennement sont même majoritaires à indiquer avoir confiance dans les informations circulant sur ces plateformes.
Plus les répondants utilisent un réseau social, plus ils font confiance aux informations qui y circulent
Source :
Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Les ingérences étrangères dans les élections sont redoutées par l’opinion
L’apparition d’un espace public transnational et numérique est perçue à la fois comme une ressource et un défi. Les réseaux sociaux font ainsi l’objet d’une évaluation ambivalente dans l’opinion. D’un côté, ils permettent les ingérences étrangères dans les campagnes électorales ; de l’autre, ils rendent possible une forme d’émancipation du public.
L’ambivalence des réseaux sociaux est perçue par les électeurs
Copyright :
Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Données issues de Dominique Reynié (dir.), Libertés : l’épreuve du siècle. Une enquête planétaire sur la démocratie dans 55 pays, Fondation pour l’innovation politique, janvier 2022.
On le sait, les moins de 50 ans sont plus favorables aux réseaux sociaux. Ils sont 41% à indiquer que les réseaux sociaux permettent à chacun de s’exprimer plus librement (contre 24% chez les 50 ans et plus), 61% qu’ils permettent de rencontrer de nouvelles personnes (contre 48%), 44% qu’ils offrent la possibilité de s’informer par soi-même (contre 26%) et 50% qu’ils permettent d’accéder à des services utiles (contre 42%).
La présupposée naïveté des sociétés démocratiques peut être relativisée si on observe que la plupart des Français interrogés (87%)17 dénoncent la perturbation des campagnes électorales par des puissances étrangères utilisant Internet et les réseaux sociaux.
Neuf Français sur dix s’inquiètent de la perturbation des campagnes électorales par des puissances étrangères utilisant Internet et les réseaux sociaux
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Fondation pour l’innovation politique – janvier 2022
Viginum, Viginum année #1, rapport, 25 octobre 2022, p. 14.
Ces dernières années, les cas se sont multipliés. Outre la Russie, la Turquie ou l’Iran, la Chine s’emploie également à peser sur les scrutins. La Chine a continué à manipuler la politique philippine jusqu’à ce qu’en septembre 2020 Facebook supprime de son réseau les comptes menant cette campagne de désinformation.
En France, Viginum, le nouveau service de l’État « chargé de la vigilance et de la protection contre les ingérences numériques étrangères », créé en juillet 2021, a détecté 84 phénomènes douteux sur les plateformes numériques, dont une soixantaine pendant le cycle électoral de 202218. Dans notre enquête 2022, présidentielle de crises (avril 2022), nous avions demandé aux électeurs s’ils considéraient les ingérences étrangères dans la campagne présidentielle comme une menace pour les institutions démocratiques ou si, différemment, ils pensaient que les citoyens avaient la capacité d’identifier les fausses informations. Plus des deux tiers (68%) des répondants considéraient alors que les ingérences étrangères constituaient une menace dans la campagne présidentielle, les citoyens n’ayant pas la capacité de s’informer correctement, et en particulier de distinguer le vrai du faux.
Par ailleurs, plus de la moitié des personnes interrogées (58%) pensaient que l’État russe tenterait de « perturber l’élection présidentielle française, par exemple par la diffusion de fausses informations ». Cette conviction était particulièrement répandue chez les électeurs d’Emmanuel Macron (68 %) et de Valérie Pécresse (68%), alors que 52% des électeurs d’Éric Zemmour, 51% des abstentionnistes et 45% des électeurs de Marine Le Pen ne partageaient pas la crainte d’une telle menace. Parmi ceux qui croyaient l’État russe capable de perturber l’élection présidentielle, plus d’un tiers (37%) estimaient que ce serait dans le but de favoriser un candidat ayant la préférence du Kremlin. Marine Le Pen (45%), Éric Zemmour (40%) et Jean-Luc Mélenchon (20%) étaient alors le plus souvent cités par les répondants.
Les électeurs de gauche redoutent que l’État russe tente de favoriser l’élection d’un candidat qui aurait sa préférence
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Un lien existe entre le comportement électoral protestataire, l’orientation prorusse d’une partie des répondants et les sources d’information utilisées. Sputnik et Russia Today, deux agences de presse appartenant à l’État russe bannies par l’Union européenne après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, sont bien connues pour favoriser l’agenda du Kremlin. Or les personnes interrogées qui déclaraient avoir une opinion positive de Vladimir Poutine étaient plus nombreuses à connaître l’existence de ces deux agences. C’était encore plus net parmi les personnes qui disaient s’informer par ces canaux. Cette tendance était perceptible au sein des électorats protestataires.
Les électeurs protestataires et les médias russes en France
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Fondation pour l’innovation politique – avril 2022
Grille de lecture : 44% des répondants qui ont une opinion positive de Vladimir Poutine connaissent le média Sputnik
et 41% Russia Today, contre respectivement 27% et 21% pour l’ensemble de l’échantillon.
Vote protestataire, Gilets jaunes et antivax : les réseaux sociaux, médias protestataires
Données issues de Dominique Reynié (dir.), Mutations politiques…, op. cit.
S’ils fournissent un accès à l’information, les réseaux sociaux et les applications téléphoniques œuvrent également à la circulation des opinions protestataires. Cela passe d’abord par le regroupement des utilisateurs dont les points de vue sont convergents, soit un effet d’agrégation ; cela passe ensuite par l’isolement de ce groupe par rapport aux opinions dissidentes avec lesquelles ils perdent peu à peu tout contact, soit l’effet « bulle de filtre », cette mécanique conduisant ensuite à la radicalisation des points de vue du groupe. Selon nos données19, le vote en faveur de partis protestataires au premier tour de l’élection présidentielle de 2022 était plus important chez les électeurs utilisant quotidiennement ces réseaux sociaux. Bien que ce phénomène soit particulièrement spectaculaire chez les utilisateurs quotidiens de Twitch, TikTok, Telegram et YouTube, aucune application ne fait exception.
Les utilisateurs quotidiens des réseaux sociaux ont massivement voté pour Jean-Luc Mélenchon et, dans une moindre mesure, pour Marine Le Pen au premier tour de l’élection présidentielle de 2022
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Fondation pour l’innovation politique – septembre 2022
Lors du second tour, 58,6% des électeurs ont voté pour Emmanuel Macron, 41,4% lui préférant Marine Le Pen. Pour les utilisateurs quotidiens des réseaux sociaux, les résultats sont plus serrés, même s’ils restent favorables au président sortant, qu’il s’agisse de TikTok (52%-48%), YouTube (53%-47%) Telegram (53%-47%), Facebook (53%-47%) ou Instagram (55%-45%). En revanche, parmi les utilisateurs quotidiens de Twitter, le résultat est identique est la moyenne nationale (58%-42%), tandis que la réélection d’Emmanuel Macron est plus nette encore chez les utilisateurs quotidiens de Twitch (60%-40%) et de WhatsApp (64%-36%).
Au premier tour des élections législatives, le vote pour la Nupes est massif chez les utilisateurs quotidiens des réseaux sociaux
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Fondation pour l’innovation politique – septembre 2022
Les réseaux sociaux sont un nouvel espace public particulièrement favorable à la circulation et au partage des opinions protestataires, entre des utilisateurs dont les points de vue convergents sont radicalisés par un processus de renforcement mutuel et de radicalisation. Lors de l’élection présidentielle comme lors des élections législatives de 2022, la gauche protestataire a particulièrement profité des réseaux sociaux, un résultat cohérent avec le fait que ces davantage utilisés par les jeunes électeurs.
Les inconnus de l’abstention
Pour le premier tour des élections législatives, l’abstention a concerné 42 % des utilisateurs quotidiens de Twitter et 46 % pour Telegram, contre une moyenne nationale de 52,5 %. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait qu’il s’agit de deux applications où les discussions politiques occupent une place centrale. En revanche, ce sont les utilisateurs quotidiens de YouTube (58 %) et d’Instagram (55 %) qui se sont le plus abstenus, tandis que pour les autres réseaux sociaux, les données sont similaires à la moyenne. |
Les utilisateurs quotidiens des réseaux sociaux se sont globalement moins abstenus que la moyenne au second tour de l’élection présidentielle de 2022
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Fondation pour l’innovation politique – septembre 2022
Données issues de Dominique Reynié (dir.), Mutations politiques…, op. cit.
Au-delà d’une disponibilité à voter pour des candidats protestataires, les utilisateurs fréquents des réseaux sociaux ont également une meilleure image des mouvements protestataires qui traversent la France, notamment les Gilets jaunes et les antivax. Les utilisateurs quotidiens de réseaux sociaux semblent plus sensibles à toutes les formes de mouvements antisystèmes. Les utilisateurs de Telegram, de Twitch et de TikTok, qui sont presque exclusivement des moins de 35 ans, sont les plus proches des mouvements protestataires.
C’est d’ailleurs sur ces trois réseaux sociaux que nous retrouvons la plus grande proportion de répondants qui déclarent avoir une image positive des Gilets jaunes20 : 73% pour les utilisateurs quotidiens de Twitch, 65% pour ceux de Telegram, 64% pour ceux de YouTube et 63% pour ceux de TikTok et Twitter, contre 50% en moyenne. L’utilisation quotidienne de WhatsApp (51%), de Facebook (55%) et d’Instagram (58%), qui sont des réseaux sociaux utilisés tant par les moins de 35 ans que par les 35-50 ans, est moins liée aux appréciations positives du mouvement des Gilets jaunes.
Plus de la moitié des utilisateurs quotidienne de TikTok, Twitch et Telegram ont une image positive du mouvement des antivax
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