Crise bancaire, dette publique : une vue allemande
La crise de l’endettement grec
Dégradation préoccupante des finances publiques
Bilan de la coordination des politiques économiques et budgétaires dans l’Union Européenne
Coordination des politiques budgétaires
Coordination des politiques économiques par le marché
Le gouvernement économique européen comme alternative institutionnelle
L’érosion du consensus autour de la stabilité
Sorties de la crise de l’endettement
Renversement de la charge de la preuve
Prévention des crises
Renforcement de la discipline de marché
Le respect des règles économiques
La crise de l’endettement grec
Cent ans après sa création, le système monétaire reposant sur l’étalon-or, adopté par les principaux pays occidentaux industrialisés en 1879, s’effondrait. Aujourd’hui nous assistons à la déstabilisation de l’euro, conséquence de la grave crise d’endettement de l’État grec. Qu’est-ce que ces deux systèmes ont en commun ? Malgré des différences de fonctionnement notables, ils partagent la même contrainte : les États membres doivent renoncer à leur autonomie de décision en matière monétaire, économique et financière si l’équilibre des finances publiques n’est pas respecté. C’est ainsi que le système étalon-or prit fin temporairement avec la déclaration de la Première Guerre mondiale en raison de la nécessité de financer le conflit.
Dans l’Europe actuelle, la Grèce n’a pas respecté cette contrainte et en paie le prix aujourd’hui. Le pays a dû céder sa souveraineté en matière de politique économique et financière à l’Union européenne et au Fonds monétaire international (FMI) en échange de prêts concédés par les 16 pays de la zone euro et du FMI. La politique budgétaire grecque sera désormais décidée à Bruxelles et Washington. Cette impasse est le résultat d’une mauvaise gestion budgétaire menée pendant des années au mépris du respect des lois économiques, et non l’œuvre de spéculateurs sans scrupules, comme l’on se plaît à le dire à Athènes – et pas seulement là-bas. Cause et conséquence sont de toute évidence confondues.
L’opération de sauvetage organisée dans l’urgence le week-end des 8 et 9 mai 2010 par le Conseil européen pour la défense de l’euro sous la présidence autoproclamée de Nicolas Sarkozy est un autre exemple de mépris des règles de fonctionnement de l’Union économique monétaire (UEM). Tous les sacro-saints principes de stabilité de l’euro ont été purement et simplement ignorés sans aucune considération du droit européen. L’apport garanti par le Gouvernement fédéral allemand pour financer le déficit des pays européens surendettés dépasse les dépenses sociales de l’État fédéral. En 1998, les membres du Conseil européen s’étaient disputés pendant quinze heures pour nommer le premier président de la Banque centrale européenne (BCE). Aujourd’hui, celui-ci se voit privé de son indépendance par le même conseil, et cette décision est inscrite à l’ordre du jour parmi les points «divers». La BCE doit désormais acheter sur le marché secondaire des emprunts d’États européens en difficulté qu’elle ne voulait récemment même plus accepter comme garanties pour les crédits concédés aux banques d’affaires. Compte tenu de l’aggravation de la situation sur les marchés financiers et du danger d’implosion de la zone euro, les chefs de gouvernement n’ont pas hésité à faire fi des règles existantes.
Mais cette opération «coup-de-poing» permet seulement de gagner du temps. L’ouverture des vannes du crédit par l’Union européenne et le FMI ainsi que l’action de la BCE ne peuvent garantir une stabilité à longue échéance de l’euro. Le sauvetage risque, au contraire, de perpétuer les erreurs de gestion accumulées depuis plusieurs années, contribuant ainsi à gonfler la bulle de dettes. En l’absence d’une politique d’assainissement des finances publiques rigoureuse et crédible, en particulier de la part des pays surendettés, les tensions sur les marchés financiers ne diminueront pas et seules les banques, en particulier française seront sauvées, mais non l’euro.
Ainsi, il est légitime de se demander comment, à l’avenir, une convergence des politiques budgétaires nationales peut être mise en place de façon crédible. Il est vrai que les instruments sont déjà disponibles, d’une part, dans le traité de Lisbonne avec effet juridique de droit international et, d’autre part, dans le droit secondaire, mais ils n’ont jamais été utilisés. Les architectes de l’euro ont supposé que les États membres respecteraient les règles qu’ils avaient eux-mêmes décidées et fait ratifier par leur Parlement, tout comme ils ont pensé que les organes de l’Union européenne se comporteraient conformément au Traité. Si l’on pense que le respect de telles règles relève de l’utopie, alors la zone euro ne sera qu’une chimère. Il est donc crucial qu’à l’avenir, lors des discussions au sein de la Commission européenne et du Conseil des ministres à propos de la réforme du pacte de stabilité et de croissance (PSC), la marge de manœuvre du politique soit efficacement limitée. C’est la condition nécessaire pour stopper la zone euro dans sa course effrénée aux transferts financiers et, par conséquent, à l’inflation.
Dégradation préoccupante des finances publiques
Au cours des années 2009 et 2010, en Allemagne comme dans presque tous les États membres de la CE, les finances publiques se sont fortement dégradées en raison du jeu des stabilisateurs automatiques, des mesures fiscales discrétionnaires adoptées pour soutenir la croissance, ainsi que du soutien massif apporté au secteur financier. Selon les prévisions économiques de la Commission européenne publiées au printemps 20101, le déficit budgétaire total de l’Union européenne passe de 0,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2007 à 6,9% à l’horizon 2011 (celui de la zone euro de 0,6 à 6,5%). D’autre part, le ratio de la dette publique s’envole de près de 25 points entre 2007 et 2011, à 83,7% du PIB (pour la zone euro, ce ratio progresse de 22 points, à 88,2%). À l’exception de la Bulgarie et de la Suède, le déficit public de tous les États membres de l’Union européenne dépassera le critère de Maastricht de 3% du PIB. Trois pays (la Belgique, la Grèce, l’Italie) connaîtront des taux d’endettement supérieurs à 100% du PIB. En 2011, seize États membres auront encore un taux d’endettement supérieur à 60%, la Grèce en tête avec un taux de 135%, suivie de l’Italie avec 118%.
Sans aucun doute, la sérieuse détérioration des finances publiques nécessite des mesures correctrices de stabilisation afin que l’activité économique ne soit pas pénalisée dans le futur. Compte tenu du niveau d’endettement atteint, les ménages et les entreprises s’attendent tôt ou tard à des augmentations d’impôts, puisque les dettes d’aujourd’hui sont les impôts de demain, et, par conséquent, les revenus nets de demain sont appelés à diminuer. Les ménages comme les entreprises devront réduire leurs dépenses de consommation et d’investissement, et exiger des primes de risque plus élevées en échange de la détention d’emprunts d’État. Inévitablement, s’en suivra une pression à la hausse des taux d’intérêt sur le marché des capitaux, ce qui handicapera les investissements des entreprises. Le rétablissement de l’équilibre budgétaire est donc une condition indispensable à une croissance économique durable, d’autant que, désormais, les marchés financiers suivent l’évolution des risques budgétaires avec beaucoup d’attention, comme le montre la forte hausse des écarts de rendement entre emprunts d’État.
Toutefois la condition nécessaire pour renouer avec la croissance et l’emploi ne repose pas uniquement sur une politique financière rigoureuse. Encore faut-il que cette politique soit soutenable. Le dernier rapport publié par la Commission européenne en octobre 2009 sur la viabilité des finances publiques met en évidence que, dans la plupart des États membres, la politique financière poursuivie jusqu’à présent ne permettra pas d’espérer une stabilisation de l’endettement au niveau estimé au printemps 2009 si la hausse des dépenses publiques à l’horizon 2060 est prise en compte. Il est possible de distinguer trois catégories de risque d’endettement : le risque élevé, qui compte treize pays (entre autres, le Royaume-Uni, la Grèce, l’Irlande), le risque moyen, qui comprend neuf pays (parmi eux, l’Allemagne, la France, l’Italie) et le risque faible, avec seulement cinq pays (dont la Finlande et la Bulgarie).2
Bilan de la coordination des politiques économiques et budgétaires dans l’Union Européenne
Coordination des politiques budgétaires
Les ministres des Finances de l’Union européenne ont décidé que la stratégie de sortie, en cas de déficit et d’endettement excessifs, serait inscrite dans le Pacte de stabilité et de croissance (PSC). La Commission européenne est en train de mettre en place la procédure de prévention des déficits excessifs pour 20 des 27 États membres, y compris l’Allemagne. Mais on est en droit de douter de la réelle capacité de la Communauté à exercer une pression sur un pays qui ne respecterait pas le PSC, compte tenu du bilan de ses onze années d’existence.
Dans les années 1999 et 2000, la réduction des déficits budgétaires s’est certes poursuivie, comme au cours de la période qui a précédé la phase III de l’UEM. Toutefois, cette réduction n’a été possible que grâce à un environnement macroéconomique favorable et à la baisse des charges d’intérêts, la prime de risque ayant eu un impact positif pour les pays relevant de l’UEM, en particulier pour ceux qui sont réputés à «monnaie faible». À l’inverse, les déficits structurels se sont détériorés à cause d’efforts d’assainissement insuffisants. Par conséquent, avec le ralentissement de la croissance, un certain nombre d’États se sont retrouvés entre 2001 et 2005 avec des déficits dépassant le seuil maximal de 3% du PIB. Entre 2006 et 2008, compte tenu de la conjoncture plutôt favorable, les déficits budgétaires nominaux ont été réduits, mais le solde primaire structurel (hors charges d’intérêt) n’a que légèrement augmenté dans l’Union européenne. Il en est résulté que les déficits budgétaires de onze États membres ont dépassé en 2008 le seuil des 3% du PIB, bien que, dans presque tous ces pays, la croissance réalisée ait correspondu à la croissance potentielle. L’Allemagne a, quant à elle, pratiquement équilibré son budget. Les raisons de cette situation sont évidentes si l’on procède à une analyse du cycle en données ajustées. Pris dans son ensemble, le déficit structurel de l’Union européenne et de la zone euro s’est accru en 2008, par rapport à 2007, de plus de 1 point de PIB en raison en particulier de la forte détérioration des finances publiques – d’environ 5 points – observée en Irlande, en Grèce et en Espagne. Or, étant donné que la part des recettes et celle des charges d’intérêt sont restées quasi stables, seule une aggravation correspondante du solde primaire structurel peut expliquer cette détérioration. Les «périodes fastes» n’ont manifestement pas été utilisées pour assainir les finances publiques si bien que, en 2009, les mesures pour faire face aux effets de la crise économique et financière ont conduit à une explosion des déficits budgétaires dans ces pays. Quelques États membres hors de la zone euro, tout comme la Grèce, n’ont évité la faillite que par un soutien financier massif de la part de l’Union européenne et du FMI.
Le «volet préventif» du PSC n’a vraisemblablement pas fonctionné pour ces pays. Dans le même temps, le «volet correctif» destiné à éviter l’accumulation des déficits n’a pas non plus été appliqué de manière convenable. À titre d’exemple, le déficit budgétaire de la Grèce n’est resté qu’une seule fois en dix ans inférieur au seuil des 3% du PIB pour le déficit budgétaire. En réalité, jusqu’en 2009, la procédure prévue à cet effet dans le Traité n’a été déclenchée qu’une seule fois par la Commission européenne et par le Conseil. Cela étant, la position de l’Allemagne sur ce sujet demeure ambiguë. En 2005 le Pacte a prétendument été flexibilisé, et de facto assoupli suite à une initiative du gouvernement allemand soutenue par la France. Les règles du PSC se sont alors adaptées à la politique. La Commission européenne avait d’ailleurs porté plainte auprès de la Cour de justice européenne, mais sans succès. De même, elle avait demandé que les compétences d’Eurostat soient étendues afin qu’il puisse empêcher les manipulations des chiffres budgétaires, demande qui avait reçu une fin de non-recevoir (décision soutenue également par le gouvernement allemand).
Coordination des politiques économiques par le marché
European Commission, Surveillance of Intra-euro-Area, Competitivenessand Imbalances, European Economy 1/2010.
Plusieurs pays membres de l’Union européenne, parmi lesquels la Grèce, n’ont pas su mettre à profit la réduction de la charge d’intérêt – une externalité positive de l’adoption de l’euro – pour consolider leurs finances publiques et procéder à des réformes structurelles de leurs économies. Le résultat en est aujourd’hui les déficits massifs de la balance courante – à deux chiffres du PIB en 2009 pour des pays comme la Grèce et le Portugal, et à 5% pour l’Espagne, après 10% les années précédentes. La Commission européenne a récemment3 constaté dans ces pays une augmentation réelle des coûts salariaux unitaires d’environ 10% par apport aux autres États de la zone euro et d’environ 20% par rapport aux 35 pays industrialisés au cours dix dernières années. Durant la même période, l’Allemagne a subi une diminution réelle de ces mêmes coûts respectivement de 15% et 1%, tandis que l’excédent de sa balance courante s’établissait autour de 5% en 2009. En revanche, ni la Commission, ni le Conseil des ministres, ni le Conseil européen n’ont réagi de façon appropriée face à de telles distorsions. Ce sont ces déséquilibres qui sont aujourd’hui à l’origine de la crise de confiance majeure et des fortes tensions sur les marchés financiers, et qui mettent sérieusement à l’épreuve l’union monétaire.
Pourtant les instruments et les institutions permettant d’éviter de telles situations de déséquilibre existent bel et bien. L’article 121 du traité de Lisbonne présente les «lignes directrices pour l’emploi» et les «grandes orientations de politique économique», alors que l’article 145 expose les «lignes directrices intégrées pour la croissance et l’emploi». En outre, le Traité émet expressément des recommandations spécifiques aux États membres et leur demande de contrôler le respect de leur application. Ces recommandations européennes concernent les mesures à prendre dans le domaine de l’emploi, des biens et des services, l’évolution du niveau des prix et des coûts, ainsi que la politique fiscale. Le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement décide des grandes orientations et peut ainsi en garder à tout instant le contrôle.
La Commission et le Conseil n’ont pas su exercer jusqu’à présent une pression suffisamment forte pour adopter des politiques convergentes. En revanche, cette convergence sera certainement achevée par le marché. En effet, par le jeu des avantages comparatifs, les pays ayant un environnement socio-économique défavorable ne pourront s’attendre qu’à des délocalisations de leur production à l’étranger. Il s’ensuivra nécessairement des pertes en termes de croissance et d’emploi, ce qui in fine contraindra tôt ou tard les pouvoirs publics à procéder aux réformes de politique économique attendues. Dans un environnement concurrentiel, le marché étant un arbitre neutre, la coordination et la convergence des politiques économiques se réalisent ex post, contrairement à une coordination décidée ex ante par le politique, et de nature discrétionnaire. Dans cet objectif, la libre circulation des capitaux, notamment pour ce qui concerne les investissements directs, ne doit pas être entravée, sinon les mécanismes d’ajustement automatiques de marché ne peuvent jouer pleinement leur rôle. Le cas de l’industrie automobile en France en est une illustration frappante. Suite à la crise financière, l’État français a décidé de soutenir son industrie et de rapatrier les unités de production situées à l’étranger, empêchant par là même de réaliser les ajustements nécessaires. Il est vrai que cette coordination ex post peut être économiquement moins optimale qu’une adaptation de la politique économique en temps utile. Par contre, l’automaticité des mécanismes sous-jacents rend sa réalisation certaine, contrairement à la coordination politique ex ante qui peut être retardée, ce qui peut conduire le cas échéant à une crise de stabilisation profonde.
Le gouvernement économique européen comme alternative institutionnelle
La sortie de la crise économique et financière et la mise en place de conditions de croissance à long terme donneraient un nouveau souffle à l’idée de transférer davantage de compétences nationales au niveau communautaire et remettraient au goût du jour les conceptions françaises classiques en faveur de l’instauration d’un gouvernement économique européen ou d’une gouvernance économique européenne. La mise en place d’une telle gouvernance pour l’UEM repose sur l’idée qu’il faut créer, face au pouvoir totalement centralisé de la «technocrate» BCE, un contre-pouvoir politico-économique tout aussi puissant. Celui-ci devrait être en mesure, d’une part, de s’assurer d’une plus grande discipline budgétaire et, d’autre part, de remettre en cause une politique de la BCE jugée trop stricte. Mais pour l’instant, «Bruxelles» est plus sensible à l’idée de créer un contre-pouvoir à la BCE plutôt qu’à celle de discipliner les politiques budgétaires.
Toutefois, ces conceptions sont la preuve d’une méconnaissance profonde des principales règles de fonctionnement de l’UEM. En effet, étant donné le transfert de la politique monétaire au niveau communautaire et l’existence du PSC contraignant les politiques budgétaires nationales, les États nationaux n’ont en réalité plus beaucoup de supports pour agir. Or, il est également important qu’ils aient à leur disposition suffisamment d’instruments de politique économique pour qu’ils puissent prendre des mesures adaptées à leur pays et réagir de manière flexible à des chocs exogènes. Dès lors que l’ensemble de ces instruments est centralisé au niveau européen, il est plus difficile de gérer des divergences de développements nationaux, ce qui aggrave les disparités économiques et, finalement, remet en question la cohésion de l’union monétaire.
En revanche, en raison des interdépendances croissantes entre les économies nationales, il existe un fort besoin de coordination. Cette coordination permettrait non seulement d’éviter les effets négatifs de contagion mais aussi d’élargir le potentiel de croissance à un espace économique et monétaire plus vaste. L’ouverture à la concurrence de secteurs comme celui de l’automobile plaide clairement en faveur d’une politique de croissance. Les décisions concernant les orientations relatives aux politiques structurelles, salariales, budgétaires et concurrentielles doivent nécessairement s’intégrer au sein du processus de coordination. Dans ces conditions, il est difficile de comprendre comment un gouvernement économique européen, agissant dans le cadre des traités européens tels qu’ils existent déjà, réussirait davantage à assurer la convergence de politiques de stabilisation.
L’érosion du consensus autour de la stabilité
Suite à l’aggravation de la crise économique et financière, conséquence de la faillite de Lehmann Brothers en septembre 2008, un consensus est né entre tous les États membres sur la nécessité d’avoir recours à un deficit spending afin de combattre la récession inévitable. Le résultat en a été le programme conjoncturel européen de décembre 2008 d’un volume global de 200 milliards d’euros.
Les États membres étaient d’accord, au moins sur le papier, sur la nécessité d’une stratégie de sortie pour remédier à l’aggravation de leur endettement. Ainsi, le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement a décidé en décembre 2009 que les déficits budgétaires structurels devaient être réduits annuellement de plus de 0,5% du PIB et que l’effort d’assainissement budgétaire devrait être entamé au plus tard en 2011. L’incertitude des marchés financiers quant à la réalisation de cet objectif et la révision importante des résultats budgétaires ont tout d’abord contribué à augmenter, au printemps 2010, les rendements des obligations de l’État grec et, plus tard, ceux d’autres pays du sud de l’Europe. Après un bras de fer qui a duré pendant des semaines, les chefs d’État et de gouvernement se sont finalement mis d’accord pour venir en aide à la Grèce, en garantissant sa dette à hauteur de 110 milliards d’euros.
Presque tous les États membres ainsi que la Commission européenne se sont prononcés en faveur d’une action solidaire au sein de la Communauté européenne, à l’exception de l’Allemagne qui insistait pour limiter l’aide à la participation du FMI. Il est légitime de se demander pourquoi on a assisté, de la part d’un grand nombre d’États membres, à un tel élan inhabituel de solidarité pour un pays qui a clairement désobéi aux règles de l’UEM, qui a constamment manipulé ses statistiques et qui reçoit les transferts nets les plus élevés par habitant. Probablement doit- on en chercher la raison dans le souhait de lever l’interdiction de prise en garantie des dettes d’autres États membres – la règle du no bail out. Avec ce précédent, les exigences formulées par d’autres pays membres ne pourront guère être refusées. L’union monétaire se transformera alors en une union de transferts financiers, avec l’Allemagne comme maître payeur. La chancelière Angela Merkel, n’ayant jusqu’à présent réussi à rallier personne à sa cause, a donc été surnommée «Madame No».
L’érosion croissante du consensus s’exprime également à travers la réaction des États membres face à la proposition du ministre des Finances allemand d’instaurer un Fonds monétaire européen. L’intérêt initial du projet était d’offrir une aide financière aux fauteurs de trouble en matière budgétaire, en contrepartie de conditions strictes et de sanctions financières. Ces contreparties ont été jugées trop sévères et, par conséquent, la modification nécessaire du traité de Lisbonne – à peine entrée en vigueur – afin de mettre en place le fonds monétaire européen, a été rejetée par plusieurs capitales, y compris Paris. Ainsi, cette proposition s’inscrira probablement comme un «non-événement» intellectuel dans l’histoire de l’intégration européenne.
L’Allemagne, à cause de ses excédents commerciaux, est de plus en plus la cible de critiques de la part de ses partenaires européens. On la qualifie de «Chine» de l’Europe. Elle devrait abandonner sa modération salariale, consommer plus, investir et ne plus dégager une croissance économique basée sur des excédents commerciaux au détriment des autres pays. Mais, cette opinion semble oublier que les salaires représentent également un coût et que leur augmentation entraînerait des suppressions d’emplois conduisant à un ralentissement de la demande intérieure. Les chiffres n’ont guère d’importance dans ce débat passionnel ! Pourtant, même au cours des années de forte croissance de la demande intérieure allemande qui ont précédé la crise, l’augmentation des exportations françaises vers l’Allemagne a été plus faible que celle des autres pays partenaires. Les faiblesses structurelles du commerce extérieur français sont connues. En outre, tout économiste digne de ce nom sait que, dans un système où les capitaux circulent librement d’un point de vue macroéconomique, les excédents de la balance courante trouvent leur contrepartie dans les sorties nettes de capitaux, la preuve s’il en faut, les déficits des investissements directs vers la France.
Même si l’on voulait sacrifier la compétitivité allemande sur l’autel de l’amitié franco-allemande, le problème de compétitivité de la France ne serait pas pour autant résolu. L’Europe ne vit pas en vase clos, coupée du reste du monde. Si la production ne s’effectuait plus en Allemagne, elle se déplacerait vers l’Asie ou vers d’autres régions du monde et y procurerait croissance économique et emploi. La stratégie de croissance européenne 2020, qui figurera comme point majeur à l’ordre du jour lors du prochain Conseil européen, ne mènera d’emblée à rien.
Sorties de la crise de l’endettement
Après onze ans d’existence de l’Union économique et monétaire, le bilan exige des actions crédibles pour les mois à venir. À l’occasion de la réforme du PSC actuellement préparée par la Commission européenne et le Conseil, il est impératif que les procédures soient renforcées, automatisées et hors de portée de toute manœuvre politique. Il est crucial de ne pas rater cette opportunité.
Renversement de la charge de la preuve
Au plan institutionnel, il existe un problème majeur concernant la procédure de décision du Conseil. Il statue à la majorité qualifiée sur les questions de déficit excessif et, le cas échéant, sur les sanctions financières assorties, entre autres, d’une suspension du droit de vote de l’État concerné. Dès lors qu’un nombre croissant d’États se retrouve surendettés, l’Union européenne a toutes les chances de s’exposer au risque d’entente implicite entre les pays qui doivent faire face à des déficits excessifs et qui, à leur tour, décident du sort d’un autre État «fauteur». Le renversement de la charge de la preuve pourrait être une solution. Dès lors qu’un État fait face à un déficit budgétaire dépassant le seuil de 3% du PIB, la procédure pour éviter des déficits excessifs devrait se déclencher automatiquement et pourrait même inclure des sanctions financières, à moins que le Conseil, à la majorité qualifiée, n’en décide autrement. Un petit nombre de pays membres pourrait avec leur minorité de blocage contrecarrer des décisions menaçant le retour à la stabilité. Le cartel des «fauteurs» de déficit serait ainsi brisé. Les règles particulières pour les pays de la zone euro introduites récemment par le traité de Lisbonne – la suspension du droit de vote des pays n’ayant pas adopté l’euro – sont un pas dans cette direction. Cette révision du Traité permet un renforcement de la gouvernance économique de la zone euro qu’il serait opportun de poursuivre.
Prévention des crises
Règles fiscales nationales : « Le frein à l’endettement allemand» comme modèle
Après onze années d’application du PSC, il est indéniable qu’il existe des carences avérées dans la mise en œuvre nationale des règles budgétaires européennes. De nombreux États membres ont ainsi manqué de détermination et de volonté politique pour transposer des recommandations pourtant décidées au niveau communautaire avec le consentement des pays concernés. Par conséquent, le cadre budgétaire communautaire devrait s’accompagner de règles nationales crédibles. Il est à noter que le non-respect des objectifs normatifs de Bruxelles concerne surtout les dépenses publiques. C’est pourquoi il serait opportun d’adopter des mesures transparentes, visant la réduction des dépenses publiques et permettant une évaluation régulière du respect de l’engagement en faveur de la stabilité des politiques budgétaires. Toutefois, la discipline attendue de telles normes budgétaires exige sans aucun doute de la part des gouvernements et des parlements de renoncer explicitement à une part supplémentaire de leur souveraineté. Il est indispensable que les États membres reconnaissent que l’UEM ne peut fonctionner sans renoncement au mythe de l’autonomie nationale.
La règle budgétaire la plus stricte existant sur un plan national est celle qui a été adoptée par l’Allemagne en 2009, inspirée du modèle suisse, et inscrite dans la constitution comme «frein à l’endettement». Cette nouvelle règle budgétaire remplace l’article 115 de la loi fondamentale, limitant l’endettement net aux dépenses d’investissements bruts et ne s’appliquant pas en cas de récession. La «règle d’or» de l’article 115 n’avait pas empêché la croissance de l’endettement de l’État de 20% du PIB en 1967 – date de son entrée en vigueur – à 65% en 2008, en raison de l’absence de définitions précises de ce que sont des investissements et des récessions. Avec la nouvelle règle budgétaire, l’endettement net du gouvernement fédéral ou des régions (Länder) est, en principe, désormais interdit. Cependant, en ce qui concerne le gouvernement fédéral, dans une conjoncture normale, i.e. lorsque la croissance économique réalisée correspond à la croissance potentielle, un déficit budgétaire structurel de 0,35% du PIB (environ 8,5 milliards. d’euros) est toléré, ce qui n’est pas le cas pour les Länder. Le chiffre de 0,35% est le résultat d’un compromis politique obtenu après de subtils arbitrages entre le gouvernement fédéral et les Länder : en phase de récession, les déficits budgétaires conjoncturels sont autorisés ; en phase d’expansion – i.e. quand la croissance réalisée dépasse la croissance potentielle –, il est impératif de dégager des excédents budgétaires. Lors de catastrophes naturelles ou de situations d’urgence inhabituelles qui échappent au contrôle de l’État, le Parlement, à la majorité de ses membres élus (et non limité aux seuls parlementaires présents), peut approuver des dépassements, ces situations apparaissant comme des exceptions à cette règle constitutionnelle de l’endettement. Toutefois, il doit adopter en même temps un plan d’amortissement strict afin d’éviter tout nouvel accroissement de l’endettement public. Ainsi, le «frein à l’endettement» fonctionne en tant que stabilisateur automatique, qui permet, en période de conjoncture défavorable, un financement du déficit et qui exige, en période de conjoncture favorable, le retour à l’excédent.4
La règle du «frein à l’endettement» observe les contraintes imposées par le PSC et impose en outre le respect de règles dans l’exécution budgétaire. À cet effet, un compte avec obligation de compensation est créé. Lors du franchissement du seuil d’endettement de 0,35%, le compte est débité ; à l’inverse, dès lors que l’endettement s’établit à un seuil inférieur, il est crédité. Le compte doit être à l’équilibre en période de reprise économique, dès que lors que la croissance du PIB dépasse 1%. Les réductions annuelles sont limitées dans ce schéma à 0,35 point. Lors d’une récession, aucune réduction n’est exigée, afin d’éviter un effet procyclique. Ainsi, dans ce schéma de «frein à l’endettement», est également prévu un mécanisme de rétroaction direct des déficits ou des excédents accumulés sur le compte de compensation. Les nouvelles règles doivent être appliquées à partir de 2011 et exigent chaque année une réduction du déficit budgétaire structurel de 0,5 point du PIB – compte tenu du déficit actuel, soit 10 milliards d’euros –, pour atteindre la limite définie de 0,35 point, au plus tard en 2016. Pour les Länder, tout nouvel endettement structurel ne sera plus admis à partir de 2020, sans aucune exception. L’observation de ces règles d’endettement, compte tenu d’un taux de croissance économique nominale annuel de 3%, permettrait au taux d’endettement de passer de presque 78% du PIB en 2010 à moins de 50% à la fin des années 2030, et à long terme à moins de 20%.
Le schéma du «frein à l’endettement» en tant que stratégie de réduction de la dette publique donne aux marchés financiers un signal clair. De cette façon, l’Allemagne s’engage sur un plan constitutionnel à respecter une discipline budgétaire de sorte que le service de la dette pour tout nouvel emprunt allemand reste comparativement faible, et permet de conserver une marge de manœuvre pour financer les dépenses publiques d’avenir. Cela constitue également un capital de confiance que les marchés financiers reconnaissent en proposant des taux d’intérêt réduits. Le caractère constitutionnel du schéma est une garantie face à des hommes politiques opportunistes qui, ainsi, ne seraient plus en mesure de dépenser le capital constitué afin de satisfaire des objectifs à court terme. La convergence des politiques budgétaires mises en place dans tous les pays de l’Union européenne serait encouragée si d’autres pays membres introduisaient des règles budgétaires similaires. D’une certaine manière, grâce à la pression des marchés financiers – notamment pour s’assurer de faibles taux d’intérêt –, l’Allemagne assume un rôle de pionnier et devient un exemple à suivre pour d’autres pays de l’Union européenne. Elle constate d’ailleurs avec un grand intérêt que la discussion sur les règles budgétaires a débuté en France5. L’Allemagne a besoin d’un partenaire ayant une crédibilité financière irréprochable afin qu’ils puissent conjointement continuer à jouer un rôle moteur pour l’intégration européenne.
Réactivation du « volet préventif » du PSC
S’il s’avère impossible, dans certains cas, d’inscrire dans la constitution les règles contraignant les déficits publics, il suffit de réactiver le «volet préventif» du PSC, largement inutilisé jusque-là. Ce volet prévoit que, dès lors que la croissance réalisée correspond à la croissance potentielle, le budget d’un État membre doit être au minimum équilibré, si ce n’est excédentaire, en fonction de la phase du cycle. Si l’objectif n’est pas atteint, s’ensuivent des sanctions financières, à moins que le Conseil n’en décide autrement.
Indexation de la dette d’État
L’achat d’obligation d’États surendettés par la BCE pourrait faire renaître des tensions inflationnistes, à moins d’indexer l’impôt sur le revenu et le nouvel emprunt d’État sur le taux d’inflation. Dans ces conditions, l’État ne gagnerait plus à favoriser l’inflation, ce qui garantirait la stabilité des prix. En outre, la charge d’intérêt pesant sur le déficit budgétaire serait allégée, en raison d’une prime d’inflation moindre prise en compte dans le rendement des obligations émises.
Renforcement de la discipline de marché
Le rôle des marchés financiers
La discipline imposée par le marché des capitaux peut contraindre les États à la stricte exécution des budgets nationaux. En effet, les opérateurs sur les marchés financiers prennent en compte dans le rendement qu’ils exigent les risques potentiels liés à la dette publique. On a pu en voir une illustration au printemps 2009 et au début de 2010 dans des rendements sur les emprunts d’États surendettés, largement supérieurs à ceux de l’Allemagne. Le service de la dette des pays en question devient dorénavant plus coûteux, en particulier pour ceux qui se sont endettés à court terme. Le renchérissement de cette dette les obligera tôt ou tard à adopter un tournant en matière de politique budgétaire, au risque de voir fuir les investisseurs qui se reportent naturellement sur des emprunts d’États. On a assisté récemment à ce phénomène puisque le rendement des obligations allemandes a atteint le niveau historiquement bas de 2,7%. Les marchés financiers jouent ainsi le rôle d’arbitre neutre entre les politiques budgétaires nationales.
Aucun budget ne peut se soustraire à cette discipline. Les programmes rigoureux d’assainissement des finances publiques adoptés récemment par l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni n’auraient pas été votés par les parlements sans la pression du marché. La France a également l’intention de réduire toutes les dépenses de l’État, à l’exception de celles destinées au service de la dette et aux retraites. La peer pressure du Conseil à Bruxelles n’aurait jamais pu atteindre de tels résultats, même après des jours et des nuits de débats.
Les mécanismes du marché ne peuvent toutefois pas jouer pleinement leur rôle disciplinaire si la règle du no bail out (clause de non- renflouement) inscrite dans le traité de Lisbonne perdure en l’état. C’est effectivement l’intention de la décision du Conseil du 9 mai 2010. Afin de sauvegarder la discipline imposée par le marché financier, le mécanisme européen de stabilisation, d’un montant de 440 milliards d’euros décidé par les ministres à cette date et garanti par les pays membres de la zone euro, devrait expirer comme prévu après une période de trois ans. En outre, son utilisation devrait être subordonnée à une stricte conditionnalité, et ceci vaut également pour le soutien financier communautaire d’un montant de 60 milliards d’euros garanti par le budget de l’Union européenne. L’activation du mécanisme devrait également, comme prévu, résulter d’une décision conjointe de l’Union européenne et du FMI, ce dernier lui soumettant ses conditions. Celles-ci devraient inclure un engagement des banques créancières de ne pas réduire leurs avoirs dans les pays déficitaires, en échange de la garantie de leurs créances. Les banques allemandes se sont déjà engagées, de leur propre gré, dans ce sens jusqu’en mai 2013, en ce qui concerne les emprunts grecs. Ce mécanisme ne peut en effet protéger les banques aux dépens des contribuables.
Le rôle de la BCE
La discipline du marché pourrait être renforcée si les autorités bancaires décidaient d’augmenter les capitaux propres réglementaires des établissements de crédit et des compagnies d’assurances détenant dans leurs portefeuilles des emprunts d’État de pays qui n’ont pas observé recommandations du Conseil des ministres de l’économie et des finances visant la correction des déficits. La BCE pourrait aussi n’accepter les emprunts d’État des pays en faute comme garantie pour les crédits accordés aux banques commerciales qu’avec un escompte supplémentaire, en remplacement du rating peu fiable émanant des agences de notation, voté par le Conseil des ministres. Selon les nouvelles modalités de vote contenues dans le traité de Lisbonne, les pays extérieurs à la zone euro, ainsi que les États membres de la zone euro en faute, n’ont pas le droit d’exercer leur droit de vote concernant des décisions visant les pays de la zone euro. À la suite de ces modifications, l’esprit de corps des pays de la zone euro sort renforcée et, ainsi, le non-respect des règles communautaires par certains pays membres se verra sanctionné de manière crédible, ce qui évitera de voir la zone euro se désagréger.
Enfin, le volume d’achat d’emprunts d’État devrait être limité de façon à préserver la stabilité financière en Europe et à assurer le bon fonctionnement du marché interbancaire. Le programme d’achat par la BCE ne peut se contenter de subventionner les États surendettés et, indirectement, les banques et les compagnies d’assurances qui les détiennent, même si, comme dans le cas français, les banques ont dans leur portefeuille 80 milliards d’euros d’emprunts grecs. En achetant des junk bonds sans limite, la BCE risque de se transformer en une bad bank, au détriment des contribuables et des épargnants. Son rôle de garant de la stabilité de prix et de la stabilité financière au sein de la zone euro ne serait alors plus crédible.
Le respect des règles économiques
Suite à la crise financière, l’ensemble des gouvernements et des banques centrales est confronté, en Europe comme dans le monde entier, à des défis historiques en matière d’assainissement et de réforme du système financier. Les États-Unis et le Japon ont des déficits budgétaires colossaux, respectivement de 13% et d’environ 9%, ce qui donne la mesure de la tâche à accomplir.
En conclusion, on peut énoncer trois recommandations afin d’en finir avec l’endettement public :
- sur le plan européen, les modifications apportées aux modalités de vote du Conseil, la réactivation du «volet préventif» du PSC et la limitation des interventions de la BCE au marché obligataire sont de nature à préserver la stabilité financière de la zone euro ;
- sur le plan national, il faudrait assortir les dispositions budgétaires européennes de règles budgétaires nationales ;
- sur le plan des marchés financiers, il faudrait «libérer» les mécanismes du marché pour qu’ils jouent pleinement leur rôle disciplinaire.
On pourrait objecter à ces recommandations qu’elles relèguent le politique au second plan et qu’elles remettent en cause les choix du Parlement et les choix politiques, le respect de la règle prévalant sur la volonté des citoyens. Compte tenu des événements récents et des piètres résultats des politiques budgétaires discrétionnaires, cette objection semble peu pertinente face aux conséquences qu’entraînerait le non-respect des règles de bonne gestion budgétaire. Il ne faut pas oublier que de la crise d’endettement des banques est née la crise d’endettement de l’État, pour qui il n’existe aucun «prêteur en dernier ressort». La BCE ne peut pas jouer ce rôle éternellement, si l’objectif est de respecter la stabilité des prix et d’éviter une dévaluation monétaire comme stratégie de sortie de l’endettement public réalisée aux dépens des épargnants. Le nécessaire assainissement budgétaire exigera par conséquent des décisions courageuses et impopulaires de la part de la classe politique, si l’on ne veut pas que la crise financière ne devienne une crise d’État, qui mènerait celui-ci à la faillite en menaçant à la fois l’Europe et le reste du monde. Compte tenu de la dégradation préoccupante des finances publiques, les enjeux sont trop importants pour que l’on puisse se permettre le luxe de politiques expérimentales basées sur le tâtonnement (trial and error) :
«Ce qui est économiquement faux ne peut être politiquement correct,et ne le sera jamais.»
L’histoire ne se répète jamais à l’identique. En revanche, ce ne serait pas une ironie mais une tragédie, si – presque un siècle après l’effondrement d’un système monétaire a priori viable et 60 ans jour pour jour après l’initiative du ministre des Affaires étrangères français, Robert Schumann, en faveur de la création de la Communauté européenne pour le charbon et l’acier, et par conséquent de l’Union européenne, la date du 9 mai 2010 symbolisait le début de la mort lente de l’euro.
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