Résumé

Introduction

I.

Comment définir la droite aux pays-bas ?

II.

Les principaux courants et leur histoire

1.

Les partis libéraux

2.

Les partis confessionnels

3.

Les partis populistes

4.

Autres tendances et partis de droite

III.

La droite face aux enjeux du xxie  siècle

1.

L’Union européenne

2.

La mondialisation

3.

L’islam

4.

L’État-providence

5.

La sécurité

IV.

Médias et réseaux

Conclusion

Abréviations

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Résumé

La droite aux Pays-Bas se caractérise avant tout par sa diversité : elle rassemble aussi bien des partis classiquement chrétiens-démocrates (Christen Democratisch Appèl, CDA) ou libéraux  (Volkspartij  voor  Vrijheid en Democratie, VVD) que des formations populistes, dont  la  place sur la scène politique est tout à fait à part en Europe. Cette dernière tendance est en pleine expansion depuis le début des années 2000. Elle connaît en effet un réel succès, notamment grâce à la personnalité de Pim Fortuyn, dont le style provocant fait croître la popularité, jusqu’à son assassinat en mai 2002. La droite radicale et populiste est aujourd’hui représentée par le Partij voor de Vrijheid (PVV) de Geert Wilders. Créé en 2006, ce parti est d’orientation plus nationaliste et moins libérale que la liste Pim Fortuyn et se caractérise par une islamophobie virulente et un refus de l’immigration. Par ailleurs, il existe également aux Pays-Bas de nombreux mouvements politiques de moindre ampleur, tels que les partis agrarien, nationaliste ou d’extrême-droite. Tous ces partis disposent de relais dans les médias, aussi bien dans la presse que sur Internet, ainsi que de nombreux think tanks et revues de recherche qui leur permettent de formaliser et de diffuser leurs idées.

Malgré cet éclatement en de multiples structures, la droite néerlandaise présente souvent un front idéologique  commun  sur  un  grand  nombre de thèmes : à l’exception des chrétiens-démocrates, elle est globalement eurosceptique et marque plutôt un repli national à l’heure où l’ouverture du pays sur le monde est perçue davantage comme un danger que comme une opportunité.  Dans  son  ensemble,  la  droite  hollandaise  propose une politique ferme quant à l’immigration et la présence de l’islam aux Pays-Bas, ce qui témoigne de l’emprise croissante des thématiques d’extrême-droite sur la vie politique. Sur le plan socio-économique, la droite est en faveur d’un Etat aux dimensions plus restreintes. Ces convergences masquent mal la réelle fragmentation de la droite et pose la question de  sa capacité à surmonter les fortes tensions qui secouent le pays.

Niek Pas,

Maître de conférences en Histoire contemporaine à l’Université d’Amsterdam.

Depuis octobre 2010, les Pays-Bas sont gouvernés par une coalition de centre-droit, composée du Christen-Democratisch Appèl (CDA, Appel démocrate-chrétien) et du Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (VVD, Parti populaire pour la liberté et la démocratie), représentant la droite libérale. Il s’agit d’un gouvernement minoritaire qui bénéficie du soutien du Partij voor de Vrijheid (PVV, Parti pour la liberté), le parti populiste de Geert Wilders. Cette situation est remarquable à deux égards.

Elle renvoie d’une part à celle qui existe depuis quelques années au Danemark, où la coalition de centre-droit  au  pouvoir  est  soutenue  par le Parti populaire danois. Ce cas de figure est inédit : depuis 1945, la Hollande n’a connu que des gouvernements majoritaires. Dans les rares cas où un gouvernement minoritaire a existé, il s’agissait d’une coalition «désertée» par l’un de ses partenaires – une situation constitutionnelle qualifiée de rompkabinet (gouvernement «croupion») ou de overgangskabinet (gouvernement de transition) plutôt que de gouvernement minoritaire.

La situation actuelle est d’autant plus remarquable qu’après la victoire du VVD aux élections législatives de juin 2010, c’est son leader, Mark Rutte, qui est devenu Premier ministre, une première depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Pays-Bas ayant toujours connu des Premiers ministres issus des partis confessionnels ou sociaux-démocrates. Mais s’il est rare qu’un chef de gouvernement vienne des partis libéraux, ces derniers ont toujours joué un rôle important dans l’histoire politique contemporaine des Pays-Bas. Il en va de même pour les chrétiens-démocrates.

Pendant des décennies, les Pays-Bas ont été gouvernés au centre, formant en quelque sorte une monarchie constitutionnelle du centre. Dans l’ensemble, les gouvernements sont des coalitions stables, soit de centre-droit, soit de centre-gauche, composées de deux à quatre partis. Les majorités s’établissent autour des partis confessionnels avec ou sans les sociaux-démocrates, ou des sociaux-démocrates avec le soutien du courant libéral.

La formation et la vie de coalitions sont donc au cœur de la démo-cratie parlementaire néerlandaise. Après 1945, le Katholieke Volkspartij, (KVP, Parti populaire catholique) et le Partij van de Arbeid (PvdA, Parti du travail), regroupant travaillistes et sociaux-démocrates, dominent les gouvernements, composant ce qu’on a appelé les «coalitions rouges-romaines» (rooms-rode coalities). Les législatives de 1958 mettent fin à ce type de coalitions. De 1959 à 1973, à l’exception de la période 1965 à 1967, les partis confessionnels gouvernent avec le soutien des libéraux. Entre 1977 et 1994, ce sont les chrétiens-démocrates du CDA, résultat d’une fusion entre le parti catholique et deux formations protestantes, qui dominent la sphère politique. Le CDA gouverne tantôt avec les libéraux de droite, tantôt avec les travaillistes.

En 1994, l’écrasante victoire des partis libéraux marque la fin provisoire de l’hégémonie confessionnelle. Jusqu’en 2002, une «coalition mauve» (paarse coalitie ou simplement paars), composée des partis libéraux et des travaillistes, forme les deux gouvernements de Wim Kok.

En 2002, après l’avènement d’une nouvelle droite populiste, représentée par la Lijst Pim Fortuyn (LPF) et la crise politique qui émane de l’assassinat de son chef de file, à la veille des élections législatives, les partis confessionnels reviennent au pouvoir et y demeurent pendant les quatre gouvernements de Jan Peter Balkenende (2002-2010). Le CDA forme d’abord une coalition avec les populistes et héritiers politiques de Pim Fortuyn puis, après l’échec de cette coalition, parviennent à se maintenir au pouvoir avec le soutien des sociaux-démocrates et des libéraux. Pendant des décennies, la structure de la vie politique  hollandaise s’est caractérisée par une grande stabilité et par le consensus. Gouverner revient à trouver le juste milieu, au-delà des clivages idéologiques, politiques et programmatiques entre la gauche et la droite. Aujourd’hui, cette notion de convergence et de coopération, baptisée poldermodel (modèle des polders) pour souligner la capacité des politiques hollandais à trouver un consensus pour former un gouvernement de coalition, est en train de disparaître  en  faveur  ce  qui  semble  s’affirmer  comme un nouveau clivage gauche-droite. L’issue des législatives de juin 2010 semble le confirmer, dans la mesure où elles ont résulté en une poussée  du courant de droite populiste et ont conduit à son affirmation sur la scène politique. Ainsi, la nouvelle coalition est plutôt ancrée à droite  qu’au centre-droit. La gauche modérée, en crise depuis la fin des gouvernements «mauves», n’arrive pas à formuler des alternatives politiques  ou programmatiques crédibles.

Peu d’études sérieuses et présentant une vue d’ensemble de la droite politique et idéologique néerlandaise ont encore été publiées. Il existe bien des témoignages et des productions journalistiques, ainsi que beaucoup de monographies universitaires sur tel ou tel parti ou sur les courants idéo- logiques, mais très peu d’analyses sur la droite prise dans son ensemble. Il en va de même concernant l’émergence de la nouvelle droite radicale, qui a tant bouleversé le paysage politique néerlandais ces temps derniers.

Cette note s’attache à l’étude de la période qui s’étend de l’après-guerre à nos jours, et plus précisément de la dernière décennie.

I Partie

Comment définir la droite aux pays-bas ?

Il n’existe pas  de  terme  unique  pour  qualifier  la  droite  aux  Pays-Bas. Il s’agit en fait d’un ensemble de courants idéologiques  et  politiques,  dont les positions peuvent parfois largement diverger. Cet ensemble est apparu à partir de la naissance de la démocratie parlementaire moderne, au milieu du XIXe siècle. On trouve dans les mouvements néerlandais généralement classés à droite des tenants de courants aussi hétérogènes que la démocratie chrétienne, le libéralisme ou le populisme.

Selon les circonstances et l’époque, on distingue des courants et sous-courants, qui peuvent être classés tantôt à gauche, tantôt à droite. Il  arrive que ces tendances se retrouvent au sein d’un même parti : les trois grandes familles politiques classiques aux Pays-Bas que sont les sociauxdémocrates, les libéraux et les chrétiens-démocrates, se composant chacune une aile droite et une aile gauche. En ce qui concerne le courant libéral, il est courant de faire une distinction entre les libéraux de droite (VVD) et les libéraux de gauche Democraten 66 (D66, Démocrates 66). Idéologiquement et politiquement, le libéralisme et le confessionnalisme dominent la droite. Les Pays-Bas  ne  connaissent  pas de tradition de droite monarchiste ou bonapartiste. La figure de «l’homme providentiel» est ainsi largement absente de la vie politique. Des courants conservateurs, souverainistes, (ultra)-nationalistes, racistes ou xénophobes existent, mais ils demeurent en marge de la vie parlementaire et politique.

Loin d’être un terme précis et figé, la dénomination de «droite» a évolué au cours des années. Sans prétendre à une approche essentialiste de la droite pour l’ensemble de la période qui couvre les XIXe et XXe siècles, il importe d’expliciter la plus importante évolution qui a eu lieu au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. C’est à cette période que la signification du terme «droite» en politique a été modifiée.

Jusqu’en 1940, l’antagonisme droite-gauche suit le clivage entre mouvements confessionnels et non-confessionnels. Dans ce classement, libéraux comme sociaux-démocrates appartiennent à la gauche. La droite est représentée par les partis d’inspiration protestante ou catholique, sachant que les catholiques constituent, au milieu du XXe siècle, jusqu’à 40% de la population. Ces partis confessionnels forment, depuis la fin du XIXe siècle, le cœur de la majorité gouvernementale, sous l’appellation de «coalition de droite». Ce clivage classique a été introduit par Abraham Kuyper, fondateur du premier parti politique néerlandais, l’Anti-Revolutionaire Partji (ARP), en 1879, qui représente, à l’époque, le courant antirévolutionnaire et protestant. À quelques exceptions près, ce sont les partis confessionnels, qui gouvernent. Les sociaux-démocrates du Sociaal Democratische Arbeiders Partij (SDAP), qui représentent, pendant l’entre-deux guerres, environ 20% de l’électorat, devront attendre 1939 pour accéder au gouvernement. Le communisme a toujours été un courant marginal, aussi bien idéologiquement, politiquement que culturellement.

Pendant une courte période d’après-guerre émerge l’espoir d’une refonte de l’échiquier politique néerlandais. L’idée est de réconcilier les anciennes oppositions idéologiques. Au sein des courants sociaux-démocrates et libéraux naissent de nouvelles formations politiques qui visent   à rassembler au-delà de leur électorat classique : le Partij van de Arbeid (PvdA, Parti du travail) et le VVD. L’opposition classique droite-gauche s’estompe, remplacée par un clivage entre conservateurs et progressistes. C’est ainsi qu’apparaissent de plus en plus souvent des gouvernements composés de confessionnels (droite) et de sociaux-démocrates (gauche).

La fameuse stabilité du système politique parlementaire néerlandais n’est pourtant qu’apparente. Sans pour autant connaître de profondes modifications, le système politique hollandais a subi plusieurs secousses. Il est arrivé par exemple que des formations de droite se manifestent. Ce fut le cas dans les années 1930 avec le parti fasciste Nationaal-Socialistische Beweging in Nederland (NSB). Dans les années 1960, le Boerenpartij (parti agrarien) remporte une poignée de sièges au Parlement. Dans les années 1980, c’est le Centrum-Democraten (CD, Centre-démocrate), petit parti d’extrême-droite, qui fait irruption. Plus importante et durable, depuis le tournant du millénaire, semble être l’apparition dans la vie parlementaire hollandaise d’une nouvelle droite populiste, la nouvelle droite radicale, représentée par avec la Liste Pim Fortuyn (LPF), le Partij voor de Vrijheid (PVV, Parti pour la liberté), et Trots op Nederland (ToN, Fiers des Pays-Bas).

II Partie

Les principaux courants et leur histoire

1

Les partis libéraux

Le libéralisme est l’un des principaux courants idéologiques et politiques aux Pays-Bas. Au milieu  du  XIXe  siècle,  il  domine  la  sphère  politique.  Le libéral Johan Rudolph Thorbecke est ainsi à l’origine de la constitution de 1848 et de la démocratie libérale moderne telle qu’elle existe en Hollande. Avec l’avènement des courants confessionnels et socialistes dans la deuxième moitié du XIXe siècle, les libéraux s’organisent à contrecœur. Deux tendances apparaissent :  le  libéralisme  conservateur et le libéralisme social.

Les libéraux-conservateurs préconisent un système où l’État se tient    à distance de l’économie (le  classique  «laissez-faire»)  et  n’intervient,  en principe, qu’en matière de sécurité et de défense (law and order). Ils prônent le respect des traditions, de la monarchie et de la souveraineté nationale et se montrent généralement peu enclins aux réformes de la démocratie parlementaire.

Les sociaux-libéraux souhaitent que  l’État  promeuve  et  garantisse  les libertés et les droits des citoyens. Contrairement au libéralisme classique, ce courant défend une conception plutôt étatiste de l’économie et  se montre favorable à l’intervention publique. Ses idées sont une synthèse sociale-démocrate et libérale. A l’opposé des théories socialistes, elles placent l’individu au centre du politique. Ce courant est également appelé vrijzinnig liberalisme, ou libéralisme progressif de gauche.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les libéraux-conservateurs se montrent favorables à l’économie de marché et au maintien de l’ordre social, tandis que les libéraux-sociaux préconisent l’introduction de lois sociales, l’élargissement du droit de vote et souhaitent étendre l’idéal libéral à toutes les couches de la population. Ils prônent un «État actif pour une société juste». Sous la pression des socialistes d’une part, des protestants et des catholiques d’autre part, les libéraux commencent  alors à s’organiser.

À partir de 1885, les conservateurs forment la Liberale Unie (LU, l’Union libérale) et, en 1894, les Vrije Liberalen (VL, les Libéraux libres) puis, en 1922, le Liberale Partij (LP, Parti libéral). Les libéraux de gauche s’unissent dans la Radicale Bond (après scission de l’Union libérale, en 1892), puis, en 1901, au sein de la Vrijzinnig Democratische Bond (VDB,   la Ligue démocratique), qui sera à l’origine de l’introduction du droit de vote des femmes au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Dans la seconde moitié du XXe siècle, deux formations libérales apparaissent : le VVD et le D66. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les divergences entre ces deux courants libéraux s’’intensifient. D’une part, le VDB fusionne avec le Sociaal Democratische Arbeiders Partij (SDAP, le Parti social-démocrate des travailleurs) et le petit parti chrétien-progressiste Christelijk-Democratische Unie (CDU) pour former un grand parti social-démocrate, le Partij van de Arbeid (PvdA, le Parti du travail). Les autres libéraux s’unissent pour former un autre nouveau parti, le Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (VVD, le Parti populaire pour la liberté et la démocratie). Entre 1950 et 1970, le VVD maintient un équilibre entre ses ailes droite et gauche, ce qui n’empêche pas l’émergence d’une nouvelle formation libérale progressiste, Democraten 66 (en abrégé D66) Dans les années 1970 et 1980, la tendance conservatrice prend l’avantage au sein du VVD. Après 2001, la bataille entre ces tendances fait rage et, à deux reprises, des parlementaires représentant l’aile droite du parti font scission. Un premier groupe est conduit par Geert Wilders en 2004, un deuxième par Rita Verdonk, en 2007.

Récemment, avec Mark Rutte pour leader, le VVD  s’est  relevé,  au point de remporter les législatives de juin 2010. Son programme politique s’articule autour de l’immigration, de la sécurité, du redressement de l’économie et de la réduction de l’emprise de l’État-providence. Pour   la première fois dans l’histoire parlementaire d’après-guerre, un parti libéral devance les deux grandes formations centristes classiques, le CDA (confessionnel) et le PvdA (social-démocrate).

Democraten 66 est fondé en 1966 (d’où son nom) par le journaliste Hans van Mierlo et par Hans Gruijters, issu du VVD. Se tenant à l’écart de son grand frère libéral, D66 enregistre des résultats fluctuants tout au long de son histoire. Il oscille entre 7 sièges aux législatives de 1967, 24  en 1994, en passant par 17 sièges en 1981, pour chuter à 6 en 1982. Ce parti libéral de gauche (ou social-libéral) a connu son apogée lors des deux «coalitions mauves» (1994-2002),  qu’il  a  formé  avec  le  VVD  et  le PvdA. Mais la montée en puissance du populisme de droite, l’euroscepticisme galopant et la critique de la société multiculturelle mènent à   la quasi-disparition de ce courant, qui ne gagne que 3 sièges aux législatives de 2006. Cependant, grâce à leur nouveau leader – Alexander Pechtold – et à leur position d’opposant à la vague populiste incarnée par Geert Wilders, les libéraux de gauche réussissent à trouver leur électorat et remportent 10 sièges aux législatives de juin 2010.

Parmi les principes fondateurs de D66 figure la démocratisation radicale de la société en général et du système politique en particulier. Longtemps, le parti s’est concentré sur ce deuxième objectif, plaidant pour l’usage du référendum, l’abolition de la Eerste Kamer (le Sénat), l’élection directe du Premier ministre et des maires, ainsi que l’introduction d’un système modéré de districts. Le parti se présente aussi comme une alternative raisonnable. Il fait également œuvre de pédagogie concernant les enjeux économiques (kenniseconomie), environnementaux et sociaux.

Par son programme, D66 est une continuation du VDB du début du XXe siècle. Certains de ses membres préfèrent la dénomination de démocrates-libéraux. D66 compte, aux Pays-Bas, parmi les partis les plus «europhiles». Comme le VVD, il fait partie de l’Internationale libérale (la Fédération mondiale des partis politiques libéraux et radicaux) et du Parti européen des libéraux, démocrates et réformateurs (ELDR).

Le VVD et D66 montrent à quel point, ces derniers temps, le libéralisme est en pleine effervescence aux Pays-Bas. Cette dynamique se retrouve aussi dans l’activité déployée par des think tanks et dans l’appa rition de nouvelles formations de droite (PVV et ToN) et de gauche. En 2006, le Liberaal Democratische Partij (LibDem) est fondé par Sammy van Tuyll van Serooskerken. Il participe aux législatives de 2006 et de 2010, mais sans obtenir de sièges. Signalons, enfin, que depuis 2004, le leader politique de GroenLinks (la Gauche verte), Femke Halsema, a commencé à positionner son parti comme un parti social-libéral.

2

Les partis confessionnels

Notes

1.

Effacement de la pilarisation, système qui consiste à structurer la société en « piliers » séparés s’organisant selon leurs propres règles et se retrouvant autour de quelques règles communes minimales

+ -

Tout comme le libéralisme, le courant confessionnel joue un rôle prépondérant dans la vie politique néerlandaise. De nos jours, ce courant s’exprime au travers du parti démocrate-chrétien, Christen Democratisch Appèl (CDA, Appel démocrate-chrétien) d’une part et par la voix de ce  qu’il est convenu d’appeler Die klein rechts («la petite droite»), constituée d’une poignée de partis protestants, comme la CHU, (l’Union chrétienne historique) et le SGP (parti fondamentaliste protestant).

Le CDA est née en 1980 de la fusion de trois partis, parmi lesquels le plus ancien du pays, l’Anti-Revolutionaire Partij (ARP, le Parti antirévolutionnaire, 1879), les deux autres partis étant le KVP (Parti populaire catholique) et la CHU, parti protestant réformé. Cette fusion des tendances protestantes et catholiques est une stratégie de survie du courant chrétien après les années 1960, caractérisées par la «dépilarisation»1 (ontzuiling) et la déconfessionnalisation accentuée de la société. Cette évolution se traduit, entre autres, par un recul graduel des résultats obtenus par la CHU, l’ARP et le KVP aux élections législatives.

Le CDA réussit à stabiliser ses résultats électoraux et à rester  au  centre de la vie politique. Dans les années 1980, il obtient jusqu’à 54 sièges (sur 150). Grâce à sa position médiane entre droite et la gauche,      il fait partie de toutes les coalitions gouvernementales, à l’exception des deux «coalitions mauves» de 1994 et 2002, composées  du  VVD,  du  PvdA et de D66. Le CDA penche tantôt à gauche, tantôt à droite, et son appui est souvent décisif pour l’obtention d’une majorité parlementaire.   Il livrera ainsi plusieurs Premiers ministres, tels Dries van Agt, Ruud Lubbers et Jan Peter Balkenende. Pendant des décennies, ce parti confessionnel dispose d’un électorat stable dans les régions rurales, catholiques (au sud et à l’est du pays) et protestantes modérées.

Classé comme démocrate-chrétien et centriste,  le  CDA  est  composé de catholiques et de protestants. Dans son programme politique, le CDA stipule que les valeurs démocrates-chrétiennes et la Bible sont fondamentales, l’homme étant l’intendant de Dieu. L’État doit se porter garant de la nature et de la société dans son ensemble et les fruits de la création appartiennent à tous. Justice, responsabilité et solidarité figurent également au nombre de ses valeurs.

Les démocrates-chrétiens subissent une défaite écrasante en 1994 puis refont surface en 2002, lorsque Jan Peter Balkenende devient Premier ministre et s’installent au pouvoir avant de perdre de nouveau lourdement aux législatives de juin 2010. Avec les travaillistes du PvdA, le CDA est considéré comme l’un des partis les plus expérimentés en matière de gouvernement. Au cours de son histoire, il est sujet à quelques soubresauts conservateurs. Ainsi, un de ses membres, Dries van Agt, ancien ministre de la Justice et ancien Premier ministre appelle dans les années 1970 à un «réveil éthique» (ethisch reveil) et au recentrage de la société néerlandaise sur les valeurs chrétiennes.

À côté du parti démocrate-chrétien, se trouve le courant protestant (orthodoxe), représenté au Parlement par deux petites formations :  le SGP fondé en 1918, et la ChristenUnie (CU). Ce dernier parti est  le  résultat d’une fusion, en 2004 entre la Gereformeerd Politiek Verbond (GPV, 1948) et la Reformatorische Politieke Formatie (RPF 1975). Ensemble, SGP et CU disposent de 5 à 8 sièges au Parlement. Leur électorat est localisé dans la Biblebelt, cette zone qui traverse le pays du sud-ouest au nord-est et se caractérise par la densité de ses villages protestants orthodoxes.

De ces deux petits partis  protestants,  le  SGP  est  le  plus  orthodoxe. Si les femmes peuvent y prendre leur carte, il leur est interdit de figurer sur les listes électorales. La CU défend des positions traditionnellement associées à la droite en matière d’éthique (opposition à l’euthanasie et au mariage homosexuel, appel au respect de l’autorité et des valeurs) mais   se rapproche de la gauche dans les domaines sociaux et environnementaux. Sa participation au dernier gouvernement de Jan Peter Balkenende est une première.

3

Les partis populistes

Depuis le tournant du millénaire, la droite néerlandaise est en pleine effervescence. Le fait le plus marquant est l’apparition de ce qu’il est convenu d’appeler la «nouvelle droite radicale» (nieuw rechts radicaal). Ses principales composantes sont la LPF (2002-2008) et le PVV de Geert Wilders (2006). Signalons, en outre, la formation marginale ToN  (2007) de l’ancien ministre Rita Verdonk, ainsi que plusieurs petites formations plus éphémères : Eén NL (Marco Pastors, 2006), Lijst Vijf Fortuyn (Olaf Stuger, 2006) et Partij voor Nederland (Hilbrand Nawijn, 2006).

La première formation à connaître le succès au niveau national est la LPF de Pim Fortuyn. Sociologue et publiciste, dandy et populiste libéral, Fortuyn se manifeste d’abord, en 2002, en tant que chef de file du courant novateur Leefbaar Nederland (Pour des Pays-Bas vivables). Ce parti, issu de fractions locales et apparu au niveau national en 1999, plaide pour la démocratisation de la vie politique et une politique participative, fustige la bureaucratie et entend remettre en question la politique d’asile. Après un différend début 2002, Fortuyn quitte le mouvement pour fonder sa propre formation. Son discours tranchant et  son  style  provocateur  conduisent la LPF à la victoire lors des élections locales de 6 mars 2002. Dans les semaines qui suivent, la Liste grimpe dans les sondages. Mais à la veille des élections législatives de mai 2002, Fortuyn est assassiné par un activiste écologiste. Son parti décrochera néanmoins 26 sièges (sur 150) et formera une coalition avec le VVD et le CDA (Jan Peter Balkenende).

Durant sa carrière, Fortuyn n’est pas l’homme des ruptures concrètes et radicales, son programme comportant l’idée d’un changement graduel. Sa pensée politique s’articule autour de trois axes : libéral, populiste et nationaliste. La critique de l’État-providence est au centre de son libéralisme,   le dédain pour l’élite politique en place est au cœur de son populisme et ses idées nationalistes se traduisent par un rejet du communautarisme et de l’intégration européenne. Parallèlement, Fortuyn est un défenseur des acquis éthiques libertaires. En leur nom, il critique sévèrement l’islamisation et l’immigration et porte un regard nostalgique sur le passé récent (plutôt les années 1950 que «les années 68»). Il s’oppose à une sphère publique dominée, selon lui, par les médias et l’intelligentsia de gauche.

Le courant populiste prend cependant une autre dimension avec l’irruption sur la scène politique de Geert Wilders, qui fonde le PVV au début    de l’année 2006. Lors des élections législatives de juin 2010, ce parti devient la troisième force politique des Pays-Bas. Il est difficile de caractériser ce courant. Mouvement d’extrême-droite, fasciste, nationaliste, néoconservateur ou populiste… Wilders lui-même élude toute  tentative de définir le positionnement son parti. En l’absence d’analyses scientifiques, les qualificatifs foisonnent.

Le PVV est considéré comme une mouvance d’extrême-droite en  raison d’un certain nationalisme ethnique qui le rapproche de Hans Janmaat et des idées des Centrum-Democraten (CD) dans les  années  1990. Le PVV peut préconiser des mesures aussi fortes que l’interdiction de construire des mosquées ou l’instauration d’un impôt sur le port du foulard (kopvoddentaks) mais refuse de retirer la nationalité  néerlandaise ou les droits civiques à des musulmans néerlandais. Il n’est donc  pas question pour ce parti de préférence nationale ou pour ses représentants de tenir des propos racistes. Il serait d’autant plus immodéré de le situer à l’extrême-droite que la discrimination raciale – l’une des caractéristiques fondamentales de l’extrême-droite – est totalement absente de ses desseins. Politiquement et culturellement, Wilders est proche d’Israël, où il a vécu pendant plus de deux ans, ainsi que des États-Unis.

Le PVV est qualifié de parti nationaliste, mais Geert Wilders se considère plutôt comme un «patriote». Contrairement aux nationalistes, il ne met pas la nation, constituée en État, au premier rang des valeurs politiques et sociales. Si le PVV représente une forme de nationalisme, il s’agit d’un nationalisme libéral, qui n’a rien à voir avec le nationalisme extrémiste et collectif du fascisme et du national-socialisme. La liberté (Vrijheid) est conçue par Wilders dans sa dimension négative – l’individu doit être libre à l’égard de l’État, et souverainiste – la Hollande doit être libre vis-à-vis de l’Europe. Il s’agit d’un libéralisme peu cohérent puisque Wilders entend par ailleurs restreindre la liberté d’expression et de religion, ce qui le rapproche des courants nationalistes et populistes.

Le PVV partage d’ailleurs un certain nombre d’idées avec les mouvements populistes, qu’il s’agisse du populisme nationaliste de droite (le Vlaams Belang flamand), du populisme libéral (le mouvement Leefbaar Nederland), ou encore du populisme de gauche (SP). Wilders vitupère l’élite politique et culturelle, le multiculturalisme et se place du côté des classes moyennes et populaires sans pour autant employer dans ses discours cette notion  collectiviste  et  homogène  de  «peuple»,  à  laquelle il préfère la notion libérale de «citoyens». Le PVV se démarque  aussi d’un populisme classique en ce sens que la notion de démocratie directe n’a émergé que très récemment dans son programme.

Wilders apparaît avant tout comme un stratège politique à la tête d’un mouvement de droite hétéroclite. Dans l’évolution de sa pensée idéologique et politique, on discerne trois phases distinctes : une première période conservatrice-libérale, une deuxième période néoconservatrice, suivie aujourd’hui d’une troisième phase dite nationaliste-populiste.

Il est certain que les années passées en Israël, entre 1980 et 1983, comptent parmi les expériences formatrices les plus déterminantes qu’ait connues Wilders. Dès lors, le conflit israélo-palestinien et le Moyen-Orient dans son ensemble mobilisent son attention, parfois jusqu’à l’obsession. La période durant laquelle il a travaillé au sein du Ziekenfondsraad (l’Agence centrale des organismes d’assurance maladie) et du Sociale Verzekeringsraad (l’Agence centrale des assurances sociales),  au  milieu des années 1980, a nourri son dédain pour les grandes structures bureaucratiques et pour l’usage abusif des prestations de l’assurance sociale, principalement du WAO, le régime d’incapacité au travail.

En 1990, Wilders fait son entrée en politique au sein du VVD. Dans un premier temps, il accorde une attention particulière aux thèmes sociaux- économiques. Le leader politique du VVD, Frits Bolkestein, devient son mentor. Les convictions économiques néolibérales, le réalisme en politique étrangère et le conservatisme social et culturel de Bolkestein sont des principes que partage Wilders. Il préconise une réforme de la sécurité sociale (notamment du WAO) et, bien avant le 11 septembre 2001, il avertit contre le danger islamiste qui menace l’Occident.

Dans une deuxième phase, de 2002 à 2006, Wilders met en avant son rejet du terrorisme et de l’extrémisme islamiste, deux nouveaux thèmes qui hantent désormais la vie politique. Il s’oriente davantage vers le néoconservatisme, un courant politique en vogue, aussi bien aux États-Unis, qu’aux Pays-Bas où ce courant de pensée est développé par Bart    Jan Spruyt, de  la  Fondation  Edmund  Burke  (Edmund  Burke  Stichting).  Il se montre particulièrement critique à l’égard du progressisme, qui serait devenu hégémonique au sein de la classe politique et de l’opinion publique, en s’attaquant notamment aux médias de gauche.

Il fait la critique sévère de l’État-providence, qu’il juge sclérosé, du «modèle des polders» (poldermodel) ainsi que du communautarisme hollandais. Enfin, Wilders s’attaque de plus en plus à l’influence  de  l’islam, dont il fait son ennemi principal (Feindmarkierung). Même si Wilders semble encore ballotter entre libéralisme conservateur et néo- conservatisme, plusieurs éléments laissent à penser que les thèmes et valeurs néoconservateurs l’emportent désormais dans sa pensée. Après 2001, il devient un fervent défenseur de la War on Terror et s’aligne sur la politique américaine. Avec sa consœur de parti Ayaan Hirsi Ali, il défend l’idée de démocratisation du Moyen-Orient, entraînant une rupture politique et intellectuelle avec Bolkestein qui prône la realpolitik. Il associe cet enjeu à son discours en matière de sécurité intérieure et de liberté individuelle. Wilders s’en prend ainsi d’un même élan aux terroristes islamistes, aux imams extrémistes et aux petits délinquants marocains.

Par son appel à des mesures strictes et spécifiques à l’égard de certaines catégories sociales (les islamistes néerlandais), il s’éloigne du libéralisme constitutionnel traditionnel du VVD. Sa critique à l’égard des élites progressistes néerlandaises se durcit. Il leur reproche de nier le danger que représente l’islam pour la société et la culture néerlandaises. Il radicalise clairement son discours dans les années 2002-2005, et appelle, en 2004, à un «jihad libéral» avec Ayaan Hirsi Ali. Son style expressif devient parfois agressif (dans des exclamations telles que «Halte au tsunami islamiste !»). Ses méthodes novatrices, comme la réalisation d’un film vidéo intitulé Fitna, ou «Discorde», lui assurent l’attention soutenue des médias.

Concernant l’immigration et l’islam, Wilders va plus loin que Bolkestein ou Fortuyn, comme en témoignent sa proposition d’interdire le Coran (qu’il compare à Mein Kampf) ou d’instaurer un impôt sur le port du foulard. Wilders, plus que la LPF ou le VVD, exige l’assimilation totale des immigrants musulmans aux Pays-Bas. Sur ce dernier point, il se démarque de Bolkestein qui a été le premier, dans les années 1990, à signaler l’incompatibilité entre valeurs islamistes et occidentales, mais se montrait plus conciliant quant à la question de l’assimilation des immigrés et prônait toujours le dialogue. Contrairement à Pim Fortuyn qui défendait le néolibéralisme, Wilders subordonne ses orientations économiques à sa lutte contre l’islamisation supposée de l’Occident.

Aujourd’hui, la volonté de sauvegarder l’identité hollandaise et  le refus de l’islamisation accrue de la société (qui devient un refus de l’immigration en général) sont au cœur de la pensée et des activités politiques de Wilders. En août 2004, il rompt avec le VVD qu’il juge trop orienté à gauche et, en 2006, crée le PVV. Certains thèmes néoconservateurs sont abandonnés et remplacés par une orientation plus nationaliste-populiste. Celle-ci se caractérise d’abord par la défense rigoureuse des valeurs nationales, par un refus catégorique de l’immigration et par   le refus de tout abandon de souveraineté au profit de la coopération internationale. Par ailleurs, Wilders, dans sa conception de la politique oppose l’élite corrompue au peuple vertueux. Il prône la réforme de la société, le retour de l’autorité (État, forces de l’ordre, Justice) et l’opposition à la mondialisation économique et culturelle. Sous l’influence des théories de l’historienne britannique Bat Ye’or, notamment des idées qu’elle développe dans son livre Eurabia, l’axe euro-arabe, Wilders se convertit entièrement à l’islamophobie. L’assimilation «dure» qu’il préconisait il y a quelques années s’est transformée en un rejet total des musulmans – sans pour autant qu’il développe des thèmes ouvertement racistes. Ses convictions anti-immigration visent seulement certaines origines. Wilders est marié à une Hongroise et au sein du PVV, le mariage interethnique est tout à fait d’usage. Ils dénoncent en revanche la présence en Hollande des Antillais (Antilles néerlandaises), des Polonais, des Roumains ou des Bulgares, venus des pays nouvellement entrés dans l’Union européenne. Wilders focalise son discours sur les Pays-Bas et l’identité nationale et appelle à voter «non» à l’Europe au référendum de 2005. Contredisant ses idées du début des années 2000, il réclame la fin de la présence militaire néerlandaise en Afghanistan. Il prétend être le porte-parole du peuple, des Néerlandais ordinaires, abandonnés par l’élite et menacés par la mondialisation et l’islamisation. En 2010, le PVV insère dans son programme la démocratie directe et la mise en place du référendum comme instrument politique.

Cette récente réorientation est ostensible dans le domaine économique et social. Wilders et le PVV abandonnent – par principe ou par opportunisme – sa ligne néolibérale, pour amorcer un virage sensible à gauche. Ils prennent la défense de la sécurité sociale dans son ensemble : du salaire minimum garanti, et s’opposent aux tentatives d’assouplissement de la législation sur le licenciement ainsi qu’à l’augmentation de  l’âge de la retraite.

Il n’est pas évident que Wilders (et le PVV) puisse être classé parmi   les nationalistes populistes ou  les  néoconservateurs.  Si  aux  États-Unis et en Israël – les deux nations qu’il considère comme amies -, il est lié à  des personnalités d’extrême-droite, comme Avigdor Lieberman, fondateur du parti Israël Beiteinou (Israël notre foyer), ou encore Arieh Eldad (chef du parti Hatikva), paradoxalement, le PVV avance des opinions libertaires sur certains sujets éthiques. Il se prononce ainsi: pour le droit  à l’avortement et à l’euthanasie et pour la sélection  embryonnaire. Le PVV défend également l’émancipation des femmes et des homosexuels. Sur ces thèmes, Wilders, prend volontairement ses distances avec les tendances qui veulent réduire le PVV à un simple parti extrémiste, raciste, xénophobe et protestataire.

4

Autres tendances et partis de droite

En dehors des trois grands courants politiques qui caractérisent la droite néerlandaise, il existe une multitude de mouvances idéologiques   de droite, à faible résonance politique ou sans aucun soutien électoral. Cette relative absence ne veut toutefois pas dire qu’elles n’ont aucun effet auprès de la droite actuelle, bien au contraire.

Le courant conservateur

Il n’existe pas vraiment de parti conservateur aux Pays-Bas. Dans la société hollandaise, que l’on peut qualifier de bourgeoise, marchande et citadine, le conservatisme a toujours connu une faible audience. Pourtant, il est bien représenté en au sein de courants de pensée défendant les principes chrétiens calvinistes datant du XIXe siècle (Abraham Kuyper, le fondateur de l’Anti-Revolutionaire Partij) ou au sein de courants antilibéraux : Dries van Agt (membre du CDA) est connu pour son appel à un «réveil éthique», au début des années 1970. Ces dernières années, le courant néoconservateur subsiste, sans pour autant avoir réussi à s’installer durablement dans le champ politique.

Le courant conservateur se retrouve également au sein de la famille sociale-démocrate. Democratisch-Socialisten 70 (DS’70, les socialistes- démocrates), un parti travailliste de centre-droit voit ainsi le jour en 1970 sous l’impulsion d’une fraction du PvdA. Il marque son opposition au virage à gauche des travaillistes concernant les dossiers économiques et de politique étrangère (illustré, par exemple, par le soutien au président chilien Allende). A l’opposé, DS’70 soutient la politique anticommuniste des États-Unis et l’OTAN, et préconise une défense forte et l’arrêt de l’immigration des ressortissants surinamiens. DS’70 rencontre un succès franc mais bref : il obtient 8 sièges aux législatives de 1971 et entre au gouvernement, puis connaît un déclin rapide et se dissout en 1983.

Le courant nationaliste

Parmi tous les partis nationalistes qui apparaissent au XXe siècle figure le Nationaal-Socialistische Beweging in Nederland (NSB, Mouvement national-socialiste aux Pays-Bas). De tendance antiparlementaire et autoritaire, il est fondé en 1931 par Anton Mussert. A l’origine, le NSB s’inspire du fascisme et, dans une moindre mesure, du national-socialisme. Les idées formulées dans le programme de Mussert se résument ainsi : État fort ; organisation de la société et de l’économie selon des idéaux corporatistes; réduction de la liberté de la presse ; culte du leader. Si aucune mesure raciste ou antisémite ne figure dans son programme fondateur, le NSB se radicalise dans la seconde moitié des années 1930.   En avril 1935, il rencontre un franc succès : en remportant presque 8% des suffrages aux élections régionales.

Bien que le NSB recrute parmi toutes les couches sociales, les classes moyennes y sont majoritairement représentées. Ses soutiens sont issus   de toutes les tendances politiques et culturelles, y compris, les premières années, des Juifs assimilés. Le succès qu’il rencontre lors des régionales  de 1935 ne se confirme pas aux législatives de 1937, les partis établis et l’Église (catholiques et protestants), s’étant mis d’accord pour lui faire barrage. Le déclin du NSB va de  pair  avec  sa  radicalisation. À  la  veille de l’invasion allemande, en 1940, le NSB se transforme en un mouvement raciste et antisémite, qui collabore avec l’occupant et finit par être interdit en 1945.

Dans les premières décennies de l’après-guerre, la droite nationaliste, autoritaire et xénophobe végète en marge de la politique, à deux exceptions près : le parti agrarien dans les années 1960 et l’extrême-droite (Centrum-Democraten) dans les années 1980.

Le courant agrarien

Même si le monde agricole est représenté aux Pays-Bas et compte beaucoup dans la vie économique et financière, il n’existe pas de parti agrarien.  Historiquement,  le  monde  agricole  est  représenté  par  le CDA, parti dont est traditionnellement issu le ministre de l’agriculture. Toutefois, dans les années 1960 apparaît un mouvement agrarien de droite, le Boerenpartij, qui  se  prononce  contre  l’establishment.  Fondé en 1958, le Boerenpartij entre au Parlement en 1963 et occupe quelques sièges jusqu’en 1981. Son leader le plus célèbre est Hendrik Koekoek. Entre 1967 et 1971, s’il connaît un certain essor et compte 7 députés, il reste cependant dans l’opposition.  Après  1981,  il  connaît  le  déclin.  En 1981, il est rebaptisé Rechtse Volkspartij (Parti populaire de droite) mais échoue aux élections, coincé par une formation xénophobe sur sa droite et par des gouvernements de centre-droit sur sa gauche. Il disparaît.

Le Boerenpartij était conservateur, libéral, monarchiste et protestant orthodoxe. Il a souvent été classé parmi les partis d’extrême-droite. Or, s’il défendait des valeurs nationales et si quelques-uns de ses membres étaient issus du NSB, le Boerenpartij n’était ni raciste ni extrémiste.

Durant toute son existence, le parti s’est opposé aux réglementations économiques agricoles imposées par l’État et l’Europe naissante. Plus généralement, il se réclamait de la liberté qu’elle soit économique, politique et spirituelle, ainsi que du christianisme (protestant). C’est justement ce programme, aussi vague que vaste, qui explique sa percée en 1967, dans une période de trouble et d’effervescence dans le pays.

Le courant d’extrême-droite

Alors que ce courant est demeuré marginal pendant des décennies, un parti d’extrême-droite fait son entrée au Parlement au début des années 1980 : le Centrum Partij (CP, Parti du Centre). Pendant la mandature 1982-1986, le CP détient un siège au Parlement, occupé par  Hans Janmaat. Ouvertement raciste et xénophobe, ce parti a pour slogan «eigen volk eerst» («Notre peuple d’abord»). À plusieurs reprises, ses dirigeants sont traduits en justice et condamnés pour leurs propos, mais le parti n’est pas interdit. Même si le CP n’est que très faiblement représenté au Parlement et dans les conseils municipaux, même si ses idées n’ont qu’une faible audience, il est très connu et vivement combattu par les groupuscules antifascistes d’extrême-gauche. Janmaat occupe également un siège au Parlement de 1989 à 1998. Signalons qu’aux élections municipales, notamment dans la nouvelle ville-dortoir d’Almere, le CP obtient tout de même 9% des votes.

À l’origine du CP, la Nederlandse Volks-Unie  (NVU,  Union  néerlandaise du peuple), fondée en 1971, est un groupuscule de tendance néo-nazie et anticapitaliste. Dans son programme figurent notamment l’introduction de la peine de mort, l’arrêt de l’immigration et de la construction de mosquées, ainsi que la fermeture des abattoirs rituels juifs et musulmans ; l’introduction de cours exaltant la nation hollandaise dans les écoles ; le soutien aux PME face aux sociétés transnationales ; l’interdiction des drogues ; l’augmentation des prestations sociales et enfin la sortie des Pays-Bas de l’OTAN. Au cours des dernières années,  le CP a fait de nouveau surface et a participé certaines élections locales, sans grand succès. Toutefois, il se fait remarquer, de temps à autre, par  des manifestations, souvent interdites par les maires ou strictement encadrées par les forces de l’ordre ; qui s’attirent l’attention des mouvances d’extrême-gauche mais aussi des médias.

III Partie

La droite face aux enjeux du xxie  siècle

1

L’Union européenne

L’Europe fut largement absente du débat pendant la campagne électorale du printemps 2010. Depuis le «non» au référendum sur l’Europe en  2005, les propos en faveur de la construction et de l’élargissement de l’Union européenne se sont tus, tandis que la critique du projet européen et des institutions ne cesse de s’amplifier. Pour l’un des fondateurs historiques de l’Europe, pour un pays qui accueille de nombreuses institutions internationales, dont la Cour internationale de La Haye, le vote de 2005 constitue une vraie rupture paradigmatique.

Quant à la droite hollandaise, ses positions vis-à-vis de l’Europe ne sont pas unanimes. D’une part, la nouvelle droite radicale, et notamment le PVV, s’oppose farouchement à l’Union européenne et à tout ce que l’Europe est censée représenter. Selon elle, l’Europe est une grande puissance étrangère et communautaire dont la capitale, Bruxelles, est surnommée «die club van Brussel» («la bande de Bruxelles»). La Communauté encouragerait l’islamisation du Vieux Continent et mettrait fin au projet d’une Hollande indépendante. Cette droite exprime la peur d’un effacement croissant des Pays-Bas au sein de l’UE. Le PVV vise à fermer    le marché du travail aux Polonais, aux Bulgares et aux Roumains. Il    lui suffirait d’une Europe qui se résume à l’ancienne Communauté économique européenne (CEE). À ses yeux, il est important de rétablir la souveraineté néerlandaise face à Bruxelles, notamment dans le domaine agricole. Concernant l’Europe et l’immigration, la nouvelle droite radicale est rejointe par l’extrême-gauche, représentée par le Socialistische Partij (SP, parti socialiste d’origine maoïste), qui avance également des positions souverainistes.

La droite modérée et le  centre-droit  ne  partagent  pas  les  opinions de la nouvelle droite radicale concernant l’Europe et inscrivent leur politique dans les cadres européens existants. Les libéraux espèrent rendre l’UE plus efficace et moderne, et proposent un meilleur contrôle    le budget européen. Parmi les grandes formations de droite, le courant chrétien-démocrate reste le plus «europhile». Il souhaite que soit développée une gestion commune de la politique d’asile au niveau européen. La politique agricole commune est également primordiale pour ce parti, dont une part importante de l’électorat est issue du monde agricole. Les chrétiens-démocrates suivent l’agenda de Lisbonne et sont convaincus que le fait de placer l’éducation et la formation des citoyens européens   au cœur de la Stratégie européenne pour 2020, afin d’améliorera la position internationale des Pays-Bas dans le domaine du savoir et de l’innovation. Ils souhaitent également que soit renforcés le contrôle de l’Union sur le marché financier, le marché unique et la politique européenne en matière d’énergie renouvelable. En général, et contrairement à la droite radicale, les chrétiens-démocrates ne voient aucune contradiction entre identité nationale et coopération internationale, a fortiori européenne.

Parmi les idées que les formations de droite partagent au sujet de l’Europe, figure la suppression des réunions du Parlement européen à Strasbourg et l’opposition de l’entrée de la Turquie dans  l’Union.  Sur cette dernière question, les positions divergent quelque peu : le PVV refuse catégoriquement l’adhésion de la Turquie, affichant le slogan : «EU : Turkije er in, Nederland er uit» («UE : si la Turquie y entre, les Pays-Bas en sortent»), tandis que CDA  et VVD admettraient l’entrée de  la Turquie si elle remplit les critères de Copenhague.

2

La mondialisation

De manière générale, dans les grandes formations de droite, l’heure est   au repli sur des questions intérieures et l’ouverture au monde est perçue davantage comme un danger que comme un défi.

La droite s’accorde sur une diminution de l’aide aux pays en développement ; sur le renforcement des contrôles aux frontières et la régulation du recrutement des étrangers, afin de protéger le marché du travail national. La droite défend également  l’idée  d’une  régulation  accrue  de la politique d’immigration. Il s’agit désormais d’attirer des travailleurs hautement qualifiés et de refuser les immigrants défavorisés  ou  ayant une faible formation professionnelle.

Sur d’autres questions liées à la mondialisation, les positions et le discours des partis de droite diffèrent. La droite radicale est la plus catégorique : dans sa vision de la politique étrangère et des rapports mondiaux. En matière de sécurité, elle favorise la sécurité intérieure au détriment   de l’engagement  militaire  à  l’extérieur.  Elle  demande  ainsi  l’arrêt  de  la participation de l’armée hollandaise à des missions internationales comme en Afghanistan et l’intensification de la lutte contre la violence et le terrorisme intérieurs. Le PVV exige la réévaluation des traités internationaux signés par les Pays-Bas. Les positions de la droite modérée sont différentes. Selon les théoriciens du CDA, «les Pays-Bas ne sont pas une  île». Les chrétiens-démocrates proposent de continuer à s’investir dans la communauté internationale sur la base de valeurs de solidarité, de justice et de responsabilités partagées. Les libéraux comme les chrétiens- démocrates sont favorables à la présence des Pays-Bas dans les missions internationales.

Pour mieux permettre aux Pays-Bas d’affronter la mondialisation, la droite s’accorde à dire qu’il faut intensifier les investissements dans l’enseignement et l’économie de la connaissance. La revalorisation de la profession d’enseignant et la remise à niveau des écoles professionnelles figurent parmi les mesures préconisées.

3

L’islam

Dans le débat politique et public, l’islam tient une large place depuis quelques années. Cette thématique est la «chasse privée» du PVV, mais  les libéraux de droite ont adapté certains aspects du même discours.

Le PVV considère davantage l’islam comme une idéologie que comme une religion. Wilders exige un arrêt immédiat de l’entrée des immigrants issus de pays islamiques, la cessation du versement de subventions aux médias musulmans et des aides à la construction de mosquées. Il se prononce pour l’interdiction du port du foulard dans la fonction publique. Il insiste sur la nécessité de proscrire la burqa, met volontiers le Coran      à l’index et dénonce la pratique de l’excision. Le PVV préconise également l’obligation pour les immigrants de souscrire à des contrats d’assimilation, ainsi que l’introduction de quotas en matière d’asile (1.000 personnes par an).

La droite radicale  évoque  souvent  le  «cauchemar  communautariste» et propose de durcir les conditions d’entrée des immigrants et de limiter leur accès systématique à la sécurité sociale. Pour en finir avec l’ «amnistie générale», elle propose de refouler systématiquement les immigrants illégaux et de mettre fin à la double nationalité.

Se distinguant du PVV, le VVD souligne l’importance des valeurs libérales, et prône une société pour tous, sans distinction de couleur de peau, de religion ou d’origine. Le parti s’en tient à son discours plaçant l’individu – le citoyen – au cœur de son projet sociétal. Pour les libéraux, il importe de stimuler l’intégration des immigrants par le travail. Ils préfèrent que les cours d’intégration, jusqu’ici organisés par l’État, soient confiés à des intervenants privés.

Pour leur part, les chrétiens-démocrates défendent les concepts de société durable et d’intérêt commun, ce qui passe par la préservation de  la cohésion sociale. Contrairement au PVV, le CDA  continue  de  souligner l’importance du pluralisme culturel et religieux. Selon eux, le principe de l’égalité devant la loi doit s’appliquer à toutes les communautés religieuses. Le parti propose toutefois la réforme des parcours d’intégration et, ainsi qu’une participation culturelle active et le renforcement de l’identité néerlandaise, comme en témoigne le projet d’un Musée historique national.

4

L’État-providence

La droite dans son ensemble exige un État plus restreint, mais plus efficace et plus fort. Toutes les formations s’accordent pour exiger une réduction des coûts, du nombre des fonctionnaires et des ministères. Si  les libéraux souhaitent réduire les réglementations, les chrétiens-démocrates appellent à un « État dynamique », tandis que  le  PVV  demande une réforme radicale des institutions, à savoir la suppression du Sénat et en la réduction à 100 (au lieu de 150) du nombre de parlementaires à l’Assemblée. La droite radicale propose aussi l’élection du Premier ministre et celle de la haute magistrature au suffrage universel, tandis  que pour les libéraux, l’élection des seuls maires au suffrage universel serait suffisante.

En matière de santé et d’enseignement, la droite radicale propose un vrai programme de gauche. Elle estime qu’il faut stimuler et augmenter  les investissements dans le secteur des soins de santé et des services sociaux. Par ailleurs, le PVV veut mettre fin à toute forme d’allocation sociale qui bénéficierait à des non-Néerlandais (les allocations familiales, par exemple). Un débat a également lieu autour de l’âge de la retraite : faut-il le maintenir à 65 ans ou le repousser?

La liste des réformes proposées par la droite est longue. Pour les différents partis, il faut en finir avec les grandes agences bureaucratiques, favoriser l’organisation de la Santé et des services sociaux à une échelle plus réduite, mettre fin au mécanisme de marché qui a été introduit dans le domaine de la Santé depuis les années 1990, supprimer des primes de départ dans ce secteur, augmenter le nombre d’aides-soignants ou encore réduire le nombre de managers. En matière d’éducation, la droite prône   le retour à des écoles plus petites et leur revalorisation, autant de points sur lesquels elle rejoint la gauche.

5

La sécurité

Depuis quelques années, la droite néerlandaise dans son ensemble a adopté un discours ferme sur le plan sécuritaire.

Les partis de droite s’accordent  pour  sanctionner  plus  sévèrement les délits et augmenter les moyens financiers et humains des forces de l’ordre. En cas de fraude constatée à la sécurité sociale, l’arrêt immédiat des allocations doit être appliqué.

La droite radicale et les libéraux de droite prônent l’alignement sur le système américain en matière de droit de grève, ce qui se traduit en ces termes dans leur programme : «trois grèves, sanction maximale» pour le VVD) ; «tolérance zéro» et «trois grèves, dehors !» pour le PVV.   Par ailleurs, ils réclament l’augmentation de la peine maximale encourue par des criminels et la réforme de la police. Enfin, le discours se durcit à l’égard des criminels étrangers ou immigrants. Pour le PVV, il faut «expulser la racaille hors des frontières néerlandaises». Le CDA rejoint la droite radicale sur ce dernier sujet.

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les droits individuels sont relégués au second plan, notamment en matière de renseignements et d’enquêtes préliminaires. Il est ainsi question d’autoriser la fouille à titre préventif sur l’ensemble du territoire ; jusqu’à présent, seules des expérimentations locales étaient admises.

Il est enfin envisagé d’introduire un service pénal obligatoire pour les jeunes fauteurs de trouble (CDA) et la mise en place de camps de rééducation (PVV), ainsi que de développer les procédures de comparution immédiate.

IV Partie

Médias et réseaux

La plupart des partis de droite disposent d’un bureau d’études politiques ou d’un institut de recherche et éditent de revues de recherche. Pour le VVD, c’est la Fondation Telders (Teldersstichting) et la revue Liberaal reveil. Les libéraux de gauche possèdent quant à eux leur bureau scientifique, Stichting Kenniscentrum D66 et publient la revue Idee. Le CDA a créé le Wetenschappelijk Instituut voor het CDA et la revue Christen- Democratische Verkenningen. La CU s’appuie sur la Fondation Mr.

G. Groen van Prinsterer et la publication Denkwijzer, le SGP sur la Fondation Guido de Brès et la revue Zicht. Pour l’instant, le PVV ne s’adosse à aucun institut de recherche ni à aucune revue politique.

Les idées de la droite trouvent aussi leur expression à travers un réseau de médias, sites web et think tanks. Parmi les médias de droite, on compte d’abord des journaux tels que De Telegraaf, le plus grand quotidien national (droite populiste) et l’Algemeen Dagblad (droite populaire), de diffusion nationale et disposant d’un vaste réseau d’éditions régionales. S’y ajoutent les journaux gratuits tels que Spits (diffusé par   De Telegraaf) et Metro, des titres dont le style éditorial et l’éthique journalistique appartiennent à la tendance populiste. Il en va de même pour certains titres de la presse d’opinion, dont la figure de proue est l’hebdomadaire Elsevier, centré sur la vie  économique  et  politique. Pendant de longues années Pim Fortuyn y fut chroniqueur et le néoconservateur Bart Jan Spruyt y tient aujourd’hui une tribune. Le  HP De Tijd, à  l’origine orienté au centre-gauche, a opéré un virage à gauche il y a une dizaine d’années.

Parallèlement à la presse classique, de nombreux sites et communautés Web ont émergé. Signalons, entre autres, des sites tels que www.hetvrijevolk.com ou www.hetvrijewoord.org (qui est aussi une fondation). Ce dernier site a été créé par des jeunes et inspiré par les idées de Pim Fortuyn. Son président, Alexander van Hattem (1983), est investi en politique et défend au niveau local les couleurs de la LPF. Il est difficile de mesurer l’impact de ces nouveaux médias et plates-formes dans l’opinion publique.

Depuis 2000, le néoconservatisme s’est développé aux Pays-Bas. Le think tank Edmund Burke Stichting (la Fondation Edmund Burke), qui joue un rôle important. A été créé par les philosophes et politologues Andreas Kinneging, Joshua Livestro et Bart Jan Spruyt. Proches à l’origine de l’aile droite du VVD, ils souhaitent aujourd’hui s’en démarquer.

Ils se sont donné pour mission de doter la sphère publique d’un forum de débat et de réflexion sur le conservatisme et de contribuer à l’émergence d’une nouvelle élite conservatrice. Parmi les valeurs qu’ils défendent figure le principe law and order, selon lequel le rôle de l’État devrait se réduire à ses fonctions régaliennes (défense, sécurité, maintien de l’ordre public) et l’État-providence être profondément réformé. Autres proposition de ce programme néoconservateur : freiner l’immigration et garder une attitude critique vis-à-vis de l’Union européenne. Quelques membres fondateurs ont exprimé leur soutien à Geert Wilders. De 2002 à 2006, la Fondation dispose d’un bureau à La Haye. En raison du manque de soutien financier, le bureau a dû fermer en 2006. La Fondation poursuit néanmoins ses activités au travers de débats, de conférences et de diverses publications.

Depuis le tournant du millénaire, la droite a le vent en poupe aux Pays-Bas. Il semble pour l’instant que, dans ses différentes composantes, elle parvienne à mieux faire face aux défis de la mondialisation, de l’immigration de masse, de la construction européenne ou encore de la lutte contre le terrorisme.

L’élément le plus spectaculaire de cette évolution est la poussée de la nouvelle droite radicale, dont l’idéologie mêle populisme, nationalisme et néoconservatisme. Cette nouvelle droite est la négation de l’attitude d’ouverture au monde qui a caractérisé la politique néerlandaise depuis des lustres. Aujourd’hui, la société a plutôt tendance à se replier sur elle-même. Deuxième constatation : le populisme de droite a entraîné une nouvelle «pilarisation», davantage socioculturelle que socio-économique.

L’apparition   de   nouvelles   formations   politiques   (LPF,   PVV,  ToN) et le recul des partis traditionnels du centre (démocrates-chrétiens et sociaux-démocrates) soulignent à quel point la politique hollandaise traverse aujourd’hui une phase de fragmentation. Reste à savoir si la nouvelle coalition de droite, composée des libéraux de droite du VVD et des démocrates-chrétiens du CDA (avec le soutien du PVV), va accélérer l’implosion du centre et si, après des années de fortes secousses (de Pim Fortuyn à Geert Wilders, en passant par Ayaan Hirsi Ali), la droite parviendra à la stabilité politique.

CDA : Christen-Democratisch Appèl (Appel chrétien-démocrate)

PvdA : Partij van de Arbeid (Parti du travail; travailliste, social-démocrate)

SP : Socialistische Partij (Parti socialiste)

VVD : Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (Parti populaire pour la liberté et la démocratie)

PVV : Partij voor de Vrijheid (Parti pour la liberté)

GL : GroenLinks (Verts – Gauche)

CU : ChristenUnie (Union chrétienne)

D66 : Democraten 66 (Démocrates 66)

SGP : Staatkundig Gereformeerde Partij (Parti politique calviniste)

PvdD : Partij voor de Dieren (Parti des animaux pour la protection des animaux)

LPF : Lijst Pim Fortuyn (Liste Pim Fortuyn)

ToN : Trots op Nederland (Fiers des Pays-Bas)

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