2011, la jeunesse du monde
Résumé
2011, la jeunesse du monde est une grande enquête sur les valeurs de la jeunesse, conçue par la Fondation pour l’innovation politique sous la direction de Dominique Reynié et réalisée par le groupe TNS Opinion.
Conduite dans 25 pays auprès de 32 700 personnes, elle nous éclaire sur les manières de vivre, les opinions et les aspirations des jeunes des cinq continents.
L’écho très favorable de cette enquête nous a convaincu de l’utilité d’en faire partager les principaux résultats et enseignements sous la forme d’un livre, paru en septembre 2011 et constituant une édition sensiblement augmentée du présent document.
Dominique Reynié,
Professeur des universités à Sciences Po et directeur général de la Fondation pour l’innovation politique.
Auteur, entre autres, du Triomphe de l’opinion publique. L’espace public français du XVIe au XXe siècle (Odile Jacob, 1998), du Vertige social nationaliste. La gauche du Non (La Table ronde, 2005) et des Nouveaux Populismes (Pluriel, 2013). Il a également dirigé l’ouvrage Où va la démocratie ? (Plon, 2017) et Démocraties sous tensions (Fondation pour l’innovation politique, 2020), deux enquêtes internationales de la Fondation pour l’innovation politique.
Dominique Reynié
Grazyna Marcinkowska
Alexis Benoist, Léa Jeannin, Grazyna Marcinkowska, Dominique Reynié, Mathieu Zagrodzki
Julien Rémy
Anaïs Allemand, Rogelier Alvarez, Natasha Caillot, Anne Flambert, Bénédicte du Grandlaunay, Pauline Pannier, Miandra Ratrimoarivony
Les sociétés payent toujours chèrement leur désintérêt pour la jeunesse. En France, presque partout en Europe mais aussi dans le monde occidental, un malaise s’est installé entre les générations. Il est de plus en plus palpable. Entre les jeunes et leurs aînés, les contentieux se multiplient, ouvrant le risque de querelles de plus en plus vives, comme le montre notre étude, notamment à propos des retraites ou de la pression fiscale. Pour nous les Européens, la question revêt une acuité particulière car notre déclassement démographique, par la réduction du poids de nos populations dans la population mondiale et, plus encore, leur vieillissement désormais précipité, affecte encore le statut de la jeunesse. Les effets de la démographie sont amplifiés par ceux du nouvel ordre économique. Les richesses et le pouvoir commencent à être redistribués au profit de puissances émergentes souvent beaucoup plus jeunes, beaucoup plus optimistes et presque toujours beaucoup plus dynamiques. Pour autant, dans ces pays, les relations entre les générations sont également traversées par de fortes tensions et la jeunesse, par les valeurs qu’elle porte et affirme, contribue fortement à en précipiter les mutations.
La globalisation offre aux nouvelles générations le projet et le souffle perdus par les nations
Les grandes périodes historiques sont celles des possibles. Elles renferment donc des périls et des promesses inévitablement liés. Comme on va le voir, les jeunes ne dissimulent pas leurs inquiétudes et leurs problèmes, mais la plupart affichent un optimisme qui tranche avec notre morosité commune. Ils jugent que, dans l’en- semble, leur vie est satisfaisante. Bien sûr, il y a des exceptions, mais elles ne remettent pas en cause cette première appréciation réjouissante.
S’agissant d’eux-mêmes, tous les jeunes nous disent croire que leur avenir personnel est pro- metteur (70%). Sur ce point comme sur beau- coup d’autres, ce sont les Brésiliens (87%) et les Indiens (90%) qui affichent l’optimisme le plus franc. En revanche, s’agissant de l’avenir de leur pays, les jeunes se montrent, dans l’ensemble, nettement moins nombreux à le juger prometteur (44%). Les niveaux les plus élevés se trouvent à nouveau chez les Brésiliens (72%), les Chinois (82%) et les Indiens (83%).
Voici bien un élément capital révélé par notre étude : lorsque la plupart des jeunes sont insatisfaits de la situation générale de leur pays (61%) ils se disent en revanche satisfaits de l’époque dans laquelle ils vivent (59%). Le pays déçoit mais l’époque console. Avis aux responsables politiques, beaucoup d’indications essentielles sont contenues dans cette dissociation, comme si les pays, par leur état politique, économique, social mais aussi et peut-être plus encore, culturel, par un manque d’ambition, entravaient leur propre jeunesse pourtant désireuse, par nature et par conviction, de prendre pied dans une vie nouvelle à laquelle la globalisation confère le projet et le souffle qui font défaut à beaucoup de nations. Aujourd’hui, pour la plu- part des jeunes interrogés, le cours de l’histoire est incomparablement plus enthousiasmant que les programmes électoraux ou de gouvernement. La société est plus prometteuse que l’État.
D’ailleurs, les jeunes aiment d’autant plus l’époque qu’ils semblent appelés à y jouer un rôle plus déterminant, tels les Chinois (64%), les Brésiliens (62%) ou les Indiens (84%), loin devant les Européens (55%) et les Français (47%). Presque toujours, face aux contenus et à l’orientation de ces opinions, il nous semble entrevoir les traits du monde nouveau.
La Chine qui vient annonce le 21ème siècle
Les réponses apportées par la jeunesse chinoise en sont une parfaite illustration. Les Chinois détiennent le record d’adhésion à la globalisation : 91% d’entre eux y voient une chance (contre 71% des Américains et 65% des Européens) ; ils jugent l’avenir de leur pays prometteur (82%), loin devant les Américains (37%) ; ils pensent (84%) que leur pays va jouer un rôle plus important dans l’avenir ; ce point de vue sur la Chine est d’ailleurs partagé par 47% des Américains, tandis que seuls 35 % des Américains et 19% des Chinois pensent que les États-Unis joueront demain un rôle plus important.
Les Chinois se disent certains d’avoir un bon travail dans l’avenir (85%, contre 76% pour les Américains) ; ils sont fiers des riches de leur pays (57%, contre 31% des Américains) ; interrogés sur ce qu’ils souhaitent le plus accomplir dans
les quinze prochaines années, ils répondent vouloir « gagner beaucoup d’argent » (64%, contre 53% chez les Américains), acquérir une maison ou un appartement (63%, contre 55% pour les Américains) et créer une entreprise (40%, contre 17% chez les Américains) ! Invités à désigner le secteur dans lequel ils aimeraient travailler, les Chinois sont les plus nombreux à choisir la banque et la finance (41% contre 13% chez les Américains).
S’il s’agit de savoir quelles sont les qualités qu’il faudrait le plus développer chez les enfants à la maison, ils répondent la responsabilité (65%), l’indépendance (58%, contre 22% des Américains) et l’honnêteté (56%), tandis que l’obéissance n’est citée que par 6% d’entre eux (contre 19% des Américains). On songera ici que la Chine est le pays de l’enfant unique, favorisant des traits de personnalité que l’on retrouve peut-être chez les jeunes interrogés quand ils estiment pouvoir décider eux-mêmes de leur vie (83%) ou quand ils déclarent faire toujours ce qu’ils veulent (81%, contre 52% des Américains).
Mais il y a sans doute des raisons autres lorsqu’ils affirment que se sentir libre est l’un des aspects qui correspond le mieux à une vie satisfaisante (40%), soit un niveau record, très au-dessus des Américains (21%) et des Européens (22%), de même lorsqu’ils jugent acceptable (47%) de désobéir à la loi pour combattre l’injustice (42% des Américains), ou encore lorsqu’ils placent en tête les réseaux sociaux (44%) parmi les usages d’internet. Enfin, on relèvera que les Chinois sont non seulement les plus préoccupés par la pollution (51%, contre 29% des Américains) mais aussi les seuls avec les Canadiens qui placent cette menace en tête de leurs inquiétudes. L’enquête ne donne pas pour autant à voir une jeunesse chinoise béate – ils ne sont que 37% à estimer satisfaisante leur situation économique (contre 40% des Américains), 45 % leur travail (contre 50% des Américains) et 34% leur état de santé –, mais elle témoigne du puissant mouvement que la jeunesse est en train de communiquer à toute une société. Compte tenu de l’importance du pays, ce mouvement ne manquera pas de produire des effets sur le reste du monde.
Puissances mondialisées, jeunesses globalisées
L’enquête de la Fondation pour l’innovation poli- tique propose de donner à voir le point de vue des nouvelles générations sur la globalisation. Ce point de vue permet de saisir la force particulière de la phase dans laquelle l’humanité vient de s’engager. On lit souvent que les temps qui s’ouvrent seront marqués par l’affirmation de nouvelles puissances. Pour être juste, cette analyse n’en est pas moins limitée. Elle ne permet pas de prendre la véritable mesure du moment. On ne peut en rester à la question du pouvoir étatique ou à celle de la circulation des richesses, sauf à limiter la description du phénomène à ce qu’il faut appeler la mondialisation. Or, la mondialisation n’est pas la globalisation. La mondialisation est un phénomène que caractérise l’exposition planétaire de chacun des États et de la plupart des entreprises, partis politiques, Églises et associations. La mondialisation est donc déjà une réalité à la fin du XIXe siècle.
L’invention du téléphone et le concept de télécommunication ouvrent la voie à une étape postérieure à la mondialisation. C’est par la télécommunication que la mondialisation est finalement devenue globalisation. L’intégration planétaire des États, des entreprises et des organisations s’est renforcée >>>
Dans un deuxième mouvement, intégrant les individus et, plus encore, leur conscience. Les jeunes interrogés ici ont cette conscience nouvelle qui n’est plus séparable d’une expérience du monde. C’est l’intégration des consciences individuelles dans le système du monde qui distingue la mondialisation de la globalisation.
À l’évidence, les technologies d’information et de communication, le Web, les terminaux mobiles et tactiles sont les vecteurs de cette étape supplémentaire de notre intégration collective dans une histoire commune ; d’un autre côté, les crises financières, les pandémies, le réchauffement climatique ou encore les migrations constituent autant d’exemples de défis appelant des mécanismes communs de régulation ; les réseaux sociaux virtuels, l’individualisme libéral, le consumérisme, les œuvres culturelles partagées ou les flux d’émotion planétaires offrent la substance et l’énergie de cette communauté universelle, concourant à rendre manifeste, presque tangible, la nouvelle condition humaine.
Ainsi, lorsque l’on demande aux jeunes de dire quelle dimension collective est importante pour leur identité, l’humanité (81%) arrive loin devant la nationalité (70%), le groupe ethnique (53%) ou la religion (43%) souvent réputés compter davantage. Si l’on interroge sur le fait de savoir quelles sont les trois qualités qu’il faut transmettre aux enfants à la maison, parmi une liste de treize pro- positions, deux d’entre elles ressortent nettement en tête : l’honnêteté (58%) et la responsabilité (55%). Fait notable, à l’exception de la jeunesse marocaine, qui place la foi religieuse en première position (56%), cette hiérarchie est donnée par chacune des jeunesses composant le panel.
Parmi les mouvements de fond qui soulèvent notre monde, il faut donc compter les progrès d’une conscience inédite, par son étendue et par son contenu, une sorte de conscience d’espèce, se superposant aux vieilles consciences de classe, très affaiblies, et aux anciennes consciences nationales, encore très vives, laissant entrevoir la possibilité d’une nouvelle politique planétaire, ce que d’aucuns nomment une cosmopolitique, qui émergerait peu à peu, dans le droit fil des systèmes philosophiques universalistes et humanistes conçus par la grande tradition philosophique occidentale. C’est par l’es- prit que le vieil Occident conserve aujourd’hui une place éminente et un rôle majeur dans le monde nouveau, non pas malgré mais bien grâce à la globalisation.
La globalisation est portée par la jeunesse du monde
On ne peut comprendre la puissance de la globalisation si l’on ne perçoit pas l’adhésion qu’elle suscite chez la plupart des jeunes. Le scepticisme qu’elle peut déclencher dans quelques pays, en particulier chez nous, ne représente à ce jour qu’une exception. Au cœur de l’Occident et jusqu’au sein de l’Union européenne, les résultats mettent au jour le risque d’une divergence : d’un côté, s’affirme une jeunesse volontaire qui a déjà adopté le nouveau rythme du monde ; de l’autre côté, apparaît une jeunesse hésitante et craintive qu’il serait impardonnable de conforter dans ses préventions.
La jeunesse française fait malheureusement partie de celles qui doutent. Pourtant, elle n’exprime pas moins son penchant pour l’époque, manifestant ainsi une disponibilité qui doit être d’abord enregistrée et reconnue puis vigoureusement soutenue. La réserve d’une fraction des Occidentaux, qui ont fait le plein de prospérité, risque fort de ressembler à l’amertume des vaincus plutôt qu’à une force capable de faire contrepoids ou à une autre conception du monde.
A lire les résultats de cette enquête, il apparaît clairement que l’on ne pèsera sur la globalisation qu’à la condition d’y prendre une part active. Cela suppose de laisser notre jeunesse s’y engager, de l’y aider. Les jeunes interrogés par l’institut TNS Opinion sont nés entre 1981 et 1994. Les plus âgés n’avaient pas 10 ans à la chute du mur de Berlin ; les plus jeunes ne l’ont jamais connu. Tous ont grandi et appris dans un monde déjà globalisé. Ils forment donc les premières véritables générations de la globalisation. Lorsqu’ils accèderont aux responsabilités, familiales, professionnelles et politiques, ils seront les premiers à n’avoir pas connu un monde qui est encore familier à leurs parents.
Puisque les nouvelles générations maîtrisent plus intimement les codes et les principes du monde nouveau, c’est en les encourageant à prendre le pouvoir, en leur offrant des perspectives mobilisatrices que les nations européennes conserveront leur rôle dans la marche du monde. Les nations européennes dignes de l’héritage intellectuel dont elles se réclament, et dont elles déplorent de plus en plus souvent le dépérissement, sont celles qui espèrent voir leurs enfants occuper une place de choix dans le monde et contribuer activement aux progrès de l’humanité. Par cette enquête, nous espérons que la Fondation pour l’innovation politique apportera sa contribution à une prise de conscience devenue nécessaire.
L’enquête « 2011, la jeunesse du monde » a été conçue par la Fondation pour l’innovation politique. Sa réalisation a été confiée au groupe TNS Opinion qui a interrogé 32.714 personnes sur la base d’échantillons nationaux comprenant 1.000 individus âgés de 16 à 29 ans, ainsi qu’un échantillon supplémentaire par pays de 300 individus âgés de 30 à 50 ans. Ce second échantillon est destiné à permettre des comparaisons entre les jeunes générations et les premières générations plus âgées. Le questionnaire a été administré dans 25 pays et dans chacune des langues nationales, soit 20 langues au total. Il comportait 242 items. La collecte des données a été effectuée dans un intervalle de cinq semaines afin de neutraliser les effets de conjoncture (entre le 16 juin et le 22 juillet 2010).
La méthode des quotas d’âge, de genre et de lieu d’habitation a été utilisée pour assurer une bonne représentativité des échantillons. Toutefois, l’enquête ayant été administrée via un questionnaire électronique, les échantillons des pays émergents sont davantage représentatifs des catégories plus aisées de la population. Dans ces pays, les répondants appartiennent donc davantage aux catégories sociales les plus au contact de la globalisation.
L’enquête couvre à la fois les questions d’opinions et les questions de comportements. Elle est complétée par le recueil des données socio-démographiques, qui favorisent l’analyse des caractéristiques sociales, au-delà des caractéristiques nationales. Il importe ici de souligner que quelques questions jugées sensibles, portant sur les appartenances religieuses, n’ont pas pu être posées au Maroc, non pas en raison d’une quelconque censure mais d’un refus de répondre suffisamment massif pour nous conduire à retirer ces questions du questionnaire marocain. La question concernant l’importance d’être européen dans l’identité personnelle n’a été posée qu’aux ressortissants des pays de l’Union : de même, celle relative à la maîtrise de l’anglais n’a pas été posée dans les pays dont c’est la langue nationale.
Pour la plupart des questions nous avons demandé aux enquêtés de répondre en définissant une intensité sur une échelle comportant quatre niveaux : « tout à fait », « plutôt », « plutôt pas », « pas du tout » (pour qualifier par exemple un niveau de satisfaction, de confiance ou d’optimisme).
Dans cette note, nous présentons les résultats en totalisant, d’un côté, les réponses « tout à fait » et « plutôt » puis, de l’autre côté, les réponses « plutôt pas » et « pas du tout ». Dans certains cas, les personnes interrogées ont été invitées à choisir entre deux ou trois réponses. Par exemple, nous leur avons demandé si elles utilisaient leur téléphone portable pour surfer sur Internet, les réponses proposées étant « oui » ou « non ». De même, à la question relative au rôle futur des grandes puissances, elles pouvaient répondre en choisissant entre « un rôle plus important », « un rôle identique » et « un rôle moins important». Enfin, dans d’autres questions, les interviewés ont eu à sélectionner jusqu’à trois propositions dans des listes comprenant 9 à 15 réponses possibles. Dans ce cas, nos résultats présenteront un pourcentage des enquêtés ayant choisi une option, par exemple « gagner beaucoup d’argent », parmi leurs trois projets prioritaires pour les quinze ans à venir. Les graphiques reposent sur des différences nationales, de genre ou d’âge. Les données qu’ils présentent constituent un ensemble de réponses de même sens, par exemple « tout à fait d’accord » et « plutôt d’accord ». Ainsi, toujours à titre d’exemple, lorsque nous proposons un graphique construit à partir du niveau atteint par la réponse « je suis satisfait de mon travail », cela implique que la réponse illustrée par le graphique regroupe les pourcentages des réponses « je suis ‘tout à fait’ » et « je suis ‘plutôt’ satis- fait de mon travail ».
La moyenne européenne a été construite pour agréger les données des douze pays membres de l’UE représentés dans l’enquête. Elle a été pondérée par les populations nationales respectives. Le même procédé est impossible au niveau mondial dans le cadre de cette enquête, en raison des disparités de taille de population entre les pays : on ne pourrait pondérer par la population de ces 25 pays qu’en faisant disparaître tous les pays ou presque sous le poids démographique de seulement deux d’entre eux : la Chine et l’Inde. Dans quelques cas, nous avons utilisé une simple moyenne arithmétique. Cette moyenne ayant pour effet de donner le même poids à chacune des populations nationales malgré les grandes différences qui existent, nous en avons limité le recours au strict minimum. Dans ces conditions, la référence à cette moyenne conserve un intérêt indicatif.
Nous avons centré notre analyse sur les réponses des jeunes (16-29 ans), en limitant la comparaison avec les réponses de leurs aînés (30-50 ans) aux cas révélant des différences notables ou portant sur des enjeux pour lesquels la comparaison entre l’ensemble des générations représentées est de rigueur, par exemple sur la question des retraites.
Enfin, les expressions telles que « la jeunesse chinoise », « les jeunes Français » ou encore « les Américains», c’est-à-dire sans mention d’âge, renvoient toujours aux enquêtés âgés de 16 à 29 ans.
La mondialisation plébiscitée par les jeunesses des pays émergents
La mondialisation est considérée comme une opportunité par 91% des Chinois, 87% des Indiens et 81% Brésiliens, tandis qu’un jeune Grec sur deux y voit une menace, de même que 47% des Français. Les jeunesses marocaine et turque sont les seules des pays en développement qui restent partagées sur la question (49% y voient une opportunité). Du côté des pays riches, les jeunesses scandinaves, en revanche, perçoivent massivement la globalisation en termes d’opportunité (76% des Suédois, 74% des Finlandais).
En dépit des différences nationales que l’on vient de relever, les résultats de notre enquête révèlent parmi les jeunes une tendance quasi généralisée à accepter la mondialisation. C’est en Europe que les 30-50 ans apparaissent les plus réservés à l’égard de la globalisation, l’écart entre générations étant particulièrement prononcé dans les pays où les jeunesses sont les plus sceptiques, comme la France et la Grèce (+11 points), mais aussi l’Allemagne (+11) et l’Australie (+10).
La jeunesse des pays émergents voit d’un bon œil les figures de la globalisation, comme le montre la confiance des Chinois (62%) dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou celle des Indiens (75%) dans les entreprises multinationales. On ne retrouve pas de tels niveaux de confiance dans les pays anciennement développés : 37% des Américains et 40% des Européens expriment leur confiance dans l’OMC.
Toujours plus jeunes, toujours plus mobiles
Les jeunes Européens sont deux fois plus nombreux que les autres à s’être rendus à l’étranger au cours de l’année passée (49% contre 25%). L’envie d’habiter dans un autre pays est particulièrement répandue chez les Roumains (41%), les Grecs (35%) et les Estoniens (31%). Globalement, les 16-19 ans (27%) sont plus enclins que les 40-50 ans (17%) à changer de pays. Dans les pays non-anglophones, la disponibilité de la jeunesse à voyager est confirmée par la maîtrise de l’anglais : 62% des 16-19 ans se disent capables de converser dans cette langue contre seulement 36% des 40-50 ans.
Foyer, doux foyer…
83% des Français disent qu’ils sont satisfaits de leur vie, ce qui est supérieur à la moyenne européenne (78%). En Europe, seuls les Polonais sont plus satisfaits (85%). Dans le monde, seule la jeunesse israélienne (83%) parvient au niveau de satisfaction de la jeunesse française. De même, les Français sont massivement satisfaits de leur temps libre (73%), de leurs amis (79%), de leur santé (83%) ou de leur famille (85%).
Lorsque l’on demande aux Français ce qui correspond le plus, pour eux, à une vie satisfaisante, ce ne sont pas « gagner beaucoup d’argent » (14%) ni « se sentir libre » (18%) qui arrivent en tête, mais « fonder une famille » (47%), soit un chiffre très supérieur à la moyenne européenne (39%) et que ne dépassent ou n’égalent dans le monde que les Polonais (48%), les Estoniens et les Russes (47%) ou les Marocains (46%). De la même façon, si l’on pose la question de savoir ce que l’on souhaite accomplir au cours des quinze prochaines années, les Français déclarent vouloir acquérir une maison ou un appartement dans des proportions
(68%) qui constituent le record mondial. Au deuxième rang vient le projet d’avoir des enfants (58%), à un niveau qui place la jeunesse française à la deuxième place derrière les Russes (60%).
La jeunesse française semble mal à l’aise dans l’époque et dans le monde dans lesquels elle va vivre
Le décor change brutalement lorsqu’il s’agit non plus d’évaluer sa propre situation mais celle du pays tout entier : 25% seulement des Français estiment satisfaisante la situation de leur pays, tandis que 71% la jugent insatisfaisante. Il est vrai que c’est à peine plus que la moyenne des jeunes Européens (69% jugent insatisfaisante la situation de leur pays).
La situation de la jeunesse française est préoccupante si l’on veut bien considérer que 55% des jeunes Européens se disent satisfaits de l’époque dans laquelle ils vivent, contre 47% des Français. En écho à cette dissociation entre inquiétude publique et bonheur privé, c’est la famille qui supplante la nationalité ; lorsqu’il s’agit de dire l’importance >>>
que l’on accorde à différentes dimensions dans son identité personnelle, les Français répondent les amis (89%), puis la famille (88%) et, enfin seulement, la nationalité (63%). Notons que 42% seulement des jeunes Français accordent un rôle important au fait d’être européen dans son identité, contre 48% en moyenne pour les jeunesses de l’Union européenne. Il importe de préciser que ce partage, qui s’effectue au bénéfice des éléments privés d’appartenance et d’affiliation, est commun à d’autres jeunesses européennes, seules les jeunesses suédoise et finlandaise combinant bonheur privé et bonheur public.
La jeunesse française, l’une des plus pessimistes du monde
À peine un Français sur deux (53%) juge son avenir personnel prometteur, contre 61 % pour la jeunesse européenne. Seules les jeunesses grecque et japonaise (43%), hongroise (49%), italienne et espagnole (50%) sont moins optimistes encore. Mais lorsqu’on interroge les Français sur le fait de savoir si l’avenir de leur pays est prometteur, ils sont 75% à répondre par la négative ! On peut comparer les 17% de Français qui pensent que l’avenir de leur pays est prometteur avec le chiffre des Chinois (82%) ou des Indiens (83%). Dans un autre ordre d’idée mais avec des résultats qui vont dans le même sens, 70% des jeunes interrogés dans le monde sont d’accord pour dire
qu’ils sont « certains d’avoir un bon travail dans l’avenir », mais ils ne sont plus que 65% en Europe et… 49% en France.
Parmi les vingt-cinq pays couverts par notre enquête, seule la jeunesse grecque porte un juge- ment aussi pessimiste sur l’avenir de son propre pays. Toutes les autres jeunesses européennes et même la jeunesse japonaise sont plus optimistes. La jeunesse française s’affirme donc comme l’une des plus pessimistes du monde.
Une des jeunesses les plus craintives face à la globalisation
Un trait distinctif de la jeunesse française est également son relatif scepticisme face à la mondialisation : 52% des Français regardent la mondialisation comme une opportunité, ce qui est très inférieur à la moyenne européenne (65%). En Europe, seule la jeunesse grecque est plus en retrait (49%). Hors d’Europe, on ne trouve, et au même niveau que les Grecs, que les jeunesses turque et marocaine (49%) pour partager cette réserve. Partout ailleurs dans le monde, la jeunesse regarde massivement la mondialisation comme une opportunité, que ce soit, par exemple, en Allemagne (66%), en Italie (68%), en Espagne (69%), aux États-Unis (71%), en Suède (76%), en Afrique du Sud (77%) et, bien sûr, au Brésil (81%), en Inde (87%) ou en Chine (91%).
Aucun pays ne démontre mieux les effets de la conjoncture sur les opinions que la Grèce. 74% des jeunes Grecs admettent que ce qui se passe dans le monde a un impact sur leur vie, contre 63% des Européens en moyenne. Il est frappant de constater à quel point la crise a rendu les Grecs pessimistes : seuls 42% d’entre eux sont satisfaits de leur travail, 30% de leur situation économique, 23% de l’époque et 7% de la situation générale de leur pays ; 49% d’entre eux sont pessimistes quant à leur avenir personnel et 80% quant à l’avenir de leur pays. De plus, seuls 43% des jeunes Grecs sont sûrs qu’ils auront un bon travail (contre 65% des Européens). Plus d’un tiers (35%) souhaite habiter à l’étranger. Enfin, leur niveau de confiance dans les institutions est particulièrement faible, que ce soit dans le gouvernement (21%), le parlement (18%) ou les médias (19%). La confiance qu’ils placent dans les instances
internationales est à peine plus élevée, qu’il s’agisse de l’Union européenne (37%), de l’ONU (36%), de l’OMC (28%), des ONG (29%) ou des sociétés multinationales (22%). En revanche, les jeunes Grecs demeurent beaucoup plus confiants dans les Nations-Unies (36%) que leurs aînés (23%).
D’une manière générale, on note des différences importantes entre les 16-29 ans et les 30-50 ans : 20 % des 16-29 ans disent être fiers des riches de leur pays, contre 9% des 30-50 ans : 23% des 16-29 ans préfèrent payer moins d’impôts en contrepartie d’une protection sociale diminuée (contre 15% des 30-50 ans). En revanche, les jeunes sont plus nombreux (67%) que leurs aînés (58%) à revendiquer le droit de refuser un emploi qui ne correspondrait pas à leurs qualifications sans perdre pour autant le bénéfice des allocations de chômage.
58% des jeunes interrogés dans le monde prédisent à la Chine un rôle beaucoup plus important dans l’avenir, loin devant l’Union européenne (36%), l’Inde (31%), les États-Unis (29%), la Russie (28%) et le Brésil (20%). Les jeunes Chinois eux-mêmes ont conscience que les yeux du monde sont rivés sur leur pays : ils regardent sans hésiter la mondialisation comme une opportunité (91%, ce qui constitue un record). 82% des Chinois croient en un avenir prometteur pour leur pays et 61% d’entre eux se déclarent satisfaits de la situation générale du pays.
Si l’optimisme qu’ils expriment à l’égard de leur avenir personnel (73%) est supérieur à celui de leurs aînés (51%), il est cependant inférieur à celui de la jeunesse des autres puissances émergentes (90% des jeunes Indiens, 87% des Brésiliens), comme à celui des pays postindustriels anglo-saxons et scandinaves, par exemple les Canadiens (79%) ou les Suédois (75%). De même, le niveau de satisfaction des Chinois en ce qui concerne leur travail (45%) et leur situation économique (37%) se situe loin derrière le niveau indien. Les réponses données par la jeunesse chinoise sont peut-être en partie imputables aux codes culturels interdisant la manifestation de la satisfaction quant à sa propre condition, ou encore aux effets possibles de l’autocensure concernant les questions relatives à l’État, mais elles peuvent aussi refléter l’idée que
les bénéfices de la mondialisation se concentrent avant tout au niveau macroéconomique.
L’entrée de la Chine dans la mondialisation pourrait aller de pair avec un bouleversement des valeurs et des aspirations de sa jeunesse. Ainsi, dans cette société longuement communiste, on peut s’étonner de voir 57% des Chinois affirmer être fiers des riches de leur pays et 34% considérer que gagner beaucoup d’argent constitue un critère d’une vie satisfaisante. De même, les Chinois sont particulièrement nombreux (58%) à faire de l’indépendance l’une des valeurs à transmettre en priorité aux enfants. Dans le même sens, 40% d’entre eux déclarent qu’une vie satisfaisante suppose de se sentir libre, soit le chiffre le plus élevé parmi les jeunesses du monde. Point de fatalisme social dans cette jeunesse chinoise, dont les membres affirment faire « ce qu’ils veulent » (81%) et croient massivement que les gens ont le pouvoir de changer la société (84%) et celui de choisir leur vie (83%). Si au sein de la jeunesse chinoise la mondialisation ne se traduit pas par l’hyper-optimisme observable chez les Indiens, on remarquera cependant que l’ouverture économique s’accompagne d’une profonde transformation dans la sphère des valeurs. Ces résultats sont certes plus représentatifs d’une frange aisée de la société chinoise, cependant le tableau doit nous étonner et mérite d’être médité.
L’attachement à l’Europe ne se substitue pas à l’identité nationale
Chez les jeunes Européens, au premier abord, l’Union européenne ne triomphe pas. Ainsi 48 % d’entre eux admettent le rôle de la dimension européenne dans leur identité. Le fait d’être européen figure parmi les trois facteurs d’identité les moins importants, suivi par le groupe ethnique (45%) et la religion (35%). La nationalité compte bien davantage (66%). Ce sont les Polonais qui accordent le plus d’importance à la nationalité dans leur identité (77%). Ce sont les Allemands qui en donnent le moins (56%).
L’Europe ne fait guère recette chez les Français : 54% d’entre eux n’accordent pas d’importance à la dimension européenne dans leur identité. A l’Est, le constat est différent. Le fait d’être européen compte pour les Roumains (61%), les Hongrois (56%) et les Polonais (55%). L’attachement à l’Europe ne se substitue pas à l’identité nationale, l’importance de la nationalité étant considérable chez les Polonais (77%), les Roumains (69%) et les Hongrois (68%), soit un résultat supérieur à la moyenne européenne (66%).
Notre enquête révèle une profonde crise de confiance des Turcs à l’égard de leur partenaire européen : 62% des 16-29 ans (et 64% des 30-50 ans) n’accordent pas leur confiance à l’Union européenne. Ainsi, la jeunesse turque se montre la plus méfiante à l’égard des institutions européennes, dépassant les Grecs (60%). Alors que la Turquie est toujours candidate à l’adhésion, sa jeunesse est pourtant la plus nombreuse de toutes à estimer que l’UE va jouer un rôle beaucoup moins important dans l’avenir : 30% des jeunes partagent cette opinion négative, soit un taux très supérieur à celui des Chinois (8%), des Brésiliens (9%), des Américains (10%) ou des Marocains (12%). Il est vrai qu’en Turquie le scepticisme à l’égard du rôle futur de l’Union européenne est plus marqué chez les 30-50 ans (43%).
Cette méfiance vis-à-vis de l’UE est couplée à une méfiance envers les Nations-Unies, exprimée tant par les jeunes (55%) que par leurs aînés (63%). L’euroscepticisme de la jeunesse turque s’inscrit donc dans une conception globale du monde. Ainsi ils émettent une appréciation ambivalente de la mondialisation : 49% des jeunes Turcs la considèrent comme une menace, 49% comme une opportunité. De même, 27% d’entre eux anticipent un affaiblissement du rôle des États-Unis, leur allié privilégié de longue date – seuls les Russes sont plus nombreux (34%) à imaginer une perte d’influence de Washington. Tout se passe comme si le regard de la jeunesse turque se tournait ailleurs : ainsi, selon elle, les deux pays qui verront leur rôle croître dans l’avenir sont la Russie (45%) et, plus encore, la Chine (62%).
Sans surprise, le sentiment européen est particulièrement faible au Royaume-Uni : le fait d’être européen compte pour seulement un tiers des jeunes. Cependant, ce facteur est jugé encore moins important par leurs aînés (29%), laissant ouverte l’hypothèse d’un progrès de l’idée européenne chez les jeunes Britanniques.
Moins d’un jeune Européen sur deux a confiance dans l’Union européenne
Seulement 47% des jeunes Européens disent avoir confiance dans l’Union, ce qui représente une adhésion mitigée pour la génération Erasmus. La confiance est plus grande au sein de la jeunesse des nouveaux pays membres, qu’il s’agisse des Roumains (61%), des Estoniens (61%), des Polonais (60%) ou des Hongrois (55%). En comparaison avec cet engouement pour l’intégration européenne de la part des nouveaux citoyens de l’UE, les jeunes d’Europe de l’Ouest se montrent sceptiques, puisque seuls les Italiens se disent majoritairement confiants (50%, contre 44% de défiants). Toutefois, les jeunes Européens font davantage confiance à l’UE que leurs aînés avec un écart de sept points en moyenne, tandis que chacune des générations accorde dans l’identité une certaine importance au fait d’être européen.
Les jeunes Européens prédisent cependant un rôle plus grand pour l’Union européenne
Seuls 12% des jeunes Européens imaginent que l’Europe jouera un rôle moins important dans le futur, tandis que 38% lui prédisent un rôle comparable à celui d’aujourd’hui et 39% un rôle plus important. Ces pronostics placent l’Union juste derrière la Chine, à laquelle 58% des jeunes prédisent un rôle plus important qu’aujourd’hui, mais devant l’Inde (31%), les États-Unis (29%), la Russie (28%) et le Brésil (20%).
La jeunesse d’Europe de l’Est est particulièrement optimiste quant au rôle futur de l’UE, estimé plus important qu’aujourd’hui par 62% des Roumains, 52% des Polonais et 42% des Hongrois, tandis que les Français (29%) et les Grecs (32%) sont nettement moins enthousiastes. Les Italiens sont relativement nombreux à envisager un déclin du rôle de l’Union (17% contre 12% en moyenne chez les jeunes Européens) : pourtant ils se caractérisent par le plus haut taux de confiance à l’égard de l’Union parmi les jeunes d’Europe de l’Ouest.
Nos données invalident la thèse d’un euroscepticisme dominant parmi la jeunesse des nouveaux États membres. Au contraire, notre enquête montre la persistance d’un tel sentiment chez les jeunes des pays membres de plus longue date de l’Union, comme la France, la Grande-Bretagne et la Grèce.
La jeunesse des pays émergents ne doute pas de l’Union européenne
L’Union européenne bénéficie cependant du soutien d’une partie de la jeunesse hors Europe. Ainsi, les Mexicains (51%), les Israéliens (45%), les Marocains (44%) et les Chinois (40%) sont plus nombreux que les Européens eux-mêmes à la créditer d’un rôle plus important dans l’avenir. De même, 73% des Indiens ont confiance dans l’Union,
suivis des Israéliens (59%), des Sud-Africains (57%) et des Chinois (54%). En revanche, les Russes (42%) ont moins confiance dans l’Union et seuls 26% d’entre eux la voient comme un acteur important du monde de demain. Cette méfiance est partagée par les Turcs, qui semblent à ce sujet désenchantés. Les volte-face des partenaires européens quant à l’adhésion de la Turquie pourraient expliquer ce sentiment.
Nous avons voulu mesurer la préoccupation pour la menace environnementale en soumettant deux questions différentes : la première proposait à une moitié de l’échantillon une liste comprenant la réponse « pollution » ; la seconde proposait à l’autre moitié de l’échantillon une liste comprenant la réponse « changement climatique ».
La jeunesse chinoise est celle que la pollution préoccupe le plus
En interrogeant les jeunes sur le fait de savoir quelles sont « les plus grandes menaces pour la société », notre enquête permet de voir que si la « pollution » est citée par un tiers des Européens (32%) elle préoccupe bien plus les Brésiliens (45%), les Indiens (46%) et les Chinois (51%). En Chine, la jeunesse redoute davantage la pollution (51%) que « la pauvreté et la famine » (43%) : en Inde, la jeunesse établit la même hiérarchie (46%, contre 40%), tandis que la jeunesse brésilienne redoute davantage la pauvreté et la famine (61%) que la pollution (45%), comme la plupart des jeunesses du monde.
Parmi la jeunesse européenne, ce sont les Suédois qui redoutent le plus la pollution
En Europe, les jeunes les plus préoccupés par la pollution sont les Suédois (46%), les Italiens (45%), les Français (40%) et les Hongrois (39%). Les moins préoccupés sont les Britanniques (22%) et les Polonais (18%).
Dans le monde, en dehors des pays cités, ce sont les Canadiens (49%) et les Australiens (39%) qui manifestent la plus grande préoccupation pour l’environnement avec, à l’opposé, les Israéliens (24%), les Japonais (22%) et les Turcs (16%).
Le changement climatique préoccupe moins que le chômage
En présentant une seconde offre de grandes menaces comprenant la réponse « changement climatique »1 on observe la même distribution des craintes au sein de la jeunesse mondiale : le niveau de préoccupation des Européens (23%) est très inférieur à celui des Chinois (35%), qui ne sont dépassés dans leur crainte à ce sujet que par les Canadiens (36%). Partout, les premières craintes dans la hiérarchie sont la guerre, le chômage, le terrorisme, la famine ou l’effondrement du système financier.
La jeunesse des pays émergents affirmant sa préoccupation pour les questions d’environnement constitue bien l’une des dimensions de la mondialisation qui n’a pas été anticipée par les défenseurs d’une interprétation catastrophiste.
Géographie de la crise
Les réponses des jeunes aux questions concernant l’avenir sont évidemment affectées par la situation économique de chacun des pays. Ainsi les traces de la crise financière se retrouvent dans le fait que les jeunes Grecs sont beaucoup moins nombreux (43%) que la moyenne des Européens (61%) à juger que leur avenir personnel est prometteur. Ils sont également moins nombreux (17%) que les Européens en moyenne (27%) à penser que l’avenir de leur pays est prometteur. Ce pessimisme est partagé par les jeunes Français (17%), Espagnols (20%), Italiens (22%), Allemands et Hongrois (25%), sans oublier les Japonais (24%). Il contraste avec l’optimisme des Scandinaves (Finlandais 61%, Suédois 63%), des Canadiens (65%), des Australiens (63%) et plus encore, avec celui des Indiens (83%), des Chinois (82%) et des Brésiliens (72%). Ce sont donc en particulier les jeunesses des grandes puissances émergentes ainsi que des pays champions des nouvelles technologies qui envisagent l’avenir avec confiance.
D’un autre côté, on observe que l’optimisme relatif des jeunes Scandinaves et Anglo-Saxons s’accompagne d’un niveau particulièrement élevé de non-réponses lorsqu’il s’agit d’évaluer le rôle futur des grandes puissances. De plus, ils se caractérisent par une propension plus faible à suivre l’actualité via Internet : 26% des Canadiens et des Suédois, 36% des Finlandais, contre 50% des Grecs, 52% des Espagnols et 58% des Italiens. Dans le même sens, seuls 49% des Scandinaves se disent concernés par ce qui se passe dans le monde, contre 74% des Grecs, 66% des Espagnols et des Italiens. On peut donc se demander si le relatif optimisme scandinave et anglo-saxon n’est pas lié à leur moindre intérêt pour les affaires publiques.
Une jeunesse enthousiaste
Plusieurs questions posées peuvent être utilisées pour évaluer le degré d’optimisme de la jeunesse mondiale. La première question porte sur la perspective d’avoir un bon travail dans l’avenir : la deuxième question concerne l’avenir de son propre pays, et il s’agit de savoir s’il est prometteur ou non : enfin, la troisième concerne l’avenir personnel, il s’agit également de savoir s’il est prometteur ou non.
Les résultats font apparaître un premier ensemble géographique et humain caractérisé par un haut niveau d’optimisme enregistré dans >>>
>>> les réponses aux trois questions. Ce sont les jeunesses enthousiastes. Elles incluent deux sous-ensembles, le premier correspond aux jeunesses des grandes puissances émergentes : le Brésil, l’Inde, la Chine, la Russie et le Maroc ; le second réunit la jeunesse de nations qui ont déjà atteint un haut niveau de richesse : le Canada, l’Australie, Israël, la Finlande et la Suède.
Une jeunesse plus sûre d’elle-même que de son pays
Le second ensemble réunit les jeunesses qui croient en leur avenir personnel autant qu’elles disent être assurées d’avoir un bon métier dans le futur mais, en revanche, qui ne croient pas dans l’avenir de leur propre pays. On retrouve ici les États-Unis, le Mexique, l’Union européenne (à l’exception des Grecs, des Finlandais et des Suédois), l’Afrique du Sud et la Turquie.
Une jeunesse inquiète
Enfin, deux pays sont confrontés à un brûlant déficit d’optimisme, le Japon et la Grèce. Pour les Grecs comme pour les Japonais, le pessimisme prévaut pour chacune des trois dimensions testées : ni leur avenir professionnel, ni leur avenir personnel, ni l’avenir de leur pays ne conduisent les jeunesses grecque et japonaise à l’expression d’un jugement positif.
Partout, la confiance en soi est plus forte que la confiance en l’état
Il est frappant de constater que partout, dans chacun des 25 pays (à l’exception de la Chine), la jeunesse exprime une confiance en son avenir personnel et une confiance en son avenir professionnel qui dépassent toujours la confiance qu’elle place dans l’avenir de son propre pays.
C’est l’époque qui est rejetée : une nette majorité (61%) des Japonais se déclarent insatisfaits de l’époque dans laquelle ils vivent, quand 59% de la jeunesse mondiale la jugent au contraire satisfaisante. Ce peuple qui est réputé nationaliste possède l’une des jeunesses accordant le moins d’importance à la nationalité dans la construction de son identité (54% la jugent importante, pour une moyenne de 70%).
Toutes les questions posées supposant une appréciation de la satisfaction, les mesures de l’optimisme ou de la confiance mettent invariablement en valeur des niveaux d’insatisfaction, de pessimisme et de défiance nettement plus élevés parmi la jeunesse japonaise : dans le monde, si 70% des jeunes interrogés
estiment que leur avenir est prometteur, ils sont 43% au Japon : de même, si les Chinois (82%) et les Indiens (83%) jugent l’avenir de leur pays prometteur, il n’y a que 24% des Japonais pour penser cela de leur pays.
La situation de la jeunesse japonaise est certainement la plus préoccupante parmi tous les pays étudiés. En témoigne cette dernière singularité, particulièrement forte : seuls 35% des Japonais disent qu’ils sont prêts à payer pour les retraites des générations âgées, contre 50 % qui répondent ne pas être d’accord. Seuls les Grecs affichent une même opinion à l’égard du financement des retraites de leurs aînés (52%).
83% des Israéliens disent être « satisfaits de leur vie », soit le deuxième taux le plus élevé parmi les jeunesses interrogées, derrière les Polonais (85%). La jeunesse de ce pays exprime également le plus haut niveau de satisfaction à l’égard de sa « situation économique » (61%). En réponse à toutes les questions de satisfaction, les Israéliens affichent un niveau élevé de réponses positives. Certes, lorsqu’ils sont invités à évaluer la situation de leur « pays en général », ils expriment plus d’insatisfaction (49%) que de satisfaction (46%), mais l’insatisfaction à l’égard de la situation générale de leur propre pays est nettement plus massive au sein de la jeunesse occidentale, puisqu’elle atteint 69% chez les Européens et 62% chez les Américains (on notera cependant que les Scandinaves, les Canadiens et les Australiens ont davantage confiance dans l’avenir de leur pays que les Israéliens).
De même, 81% des Israéliens estiment leur avenir « prometteur » et 76% sont convaincus d’avoir « un bon travail dans l’avenir ». Cet optimisme n’est
dépassé que par les jeunesses brésilienne (87%) et indienne (90%). Peut-être faut-il voir une explication de cet état d’esprit dans le fait qu’ils accordent presque tous (85%) de l’importance à leur nationalité dans leur identité, ce qui place d’ailleurs la nation devant la religion (63%).
Enfin, la jeunesse israélienne se singularise fortement par la confiance qu’elle accorde à son gouvernement, à son parlement, à son armée, à sa police, à sa justice, à ses institutions religieuses et à ses médias. C’est un cas unique dans la jeunesse occidentale et, au plan mondial, on ne trouve que les jeunesses chinoise, indienne et marocaine pour exprimer une aussi grande confiance dans les institutions nationales. Cause ou conséquence de cette confiance quasi généralisée, les jeunes Israéliens aiment leur époque et le monde dans lequel ils vivent. Ils sont une nette majorité à juger que la globalisation est plus une opportunité (66%) qu’une menace (31%), ce qui fait d’eux l’une des jeunesses les plus à l’aise avec le nouveau monde et les plus heureuses d’y entrer.
Ma famille, mon identité
Partout, les relations familiales sont jugées précieuses. Au point le plus haut, 98% des Indiens estiment qu’il est important de passer des moments avec sa famille, contre 79% des Japonais, ce qui constitue le point le plus bas. L’importance des liens familiaux se retrouve dans la place que les jeunes accordent à la famille dans la construction de leur identité personnelle : 95% des Indiens, contre 73% des Japonais, lui reconnaissent à ce titre un rôle important.
Non seulement les jeunes accordent une grande importance à la famille en général, mais ils sont aussi satisfaits de leur propre famille : 85% des Européens, 87% des Américains et 90% des Indiens interrogés nous le disent. La jeunesse japonaise,
encore une fois, se distingue par un taux de satisfaction moins élevé (69%). Toutes les jeunesses regardent la famille comme le fondement de la société : 94% des Chinois, 89% des Estoniens, 70% des Français ou 65% des Suédois. On le voit, s’il existe des écarts, ils ne remettent pas en cause la centralité de la famille pour la jeunesse du monde.
Fonder une famille
Parmi les différents aspects de l’existence, le fait de fonder une famille est celui qui correspond le plus à l’idée que les jeunes se font d’une vie satisfaisante, après le fait d’être en bonne santé. Fonder un foyer est un projet dans lequel se retrouvent particulièrement les jeunesses polonaise (48%), française et russe (47%).
Ce n’est pas le cas de la jeunesse indienne (13%). Le fait d’avoir des enfants est également une priorité affirmée par la jeunesse du monde. Les Russes (60%) et les Français (58%) sont les plus nombreux à nourrir ce projet, qui paraît moins important pour les Chinois (33%), les Mexicains (32%) et les Indiens (24%) que pour les Italiens (56%), les Allemands (52%), les Espagnols (51%), les Britanniques (49%), les Polonais (49%) et les Roumains (45%).
Devenir propriétaire
Parmi les projets qu’ils souhaitent mener à bien dans les quinze années qui viennent, le fait d’acquérir un appartement ou une maison est placé en première position. On le voit, les représentations des jeunes sont articulées autour du foyer. Cette aspiration est particulièrement pré- sente chez les Français, qui détiennent le record en la matière (68%), juste devant les Polonais (65%) et les Chinois (63%).
Cultiver l’amitié
Pour l’ensemble des jeunes, il est important de passer du temps avec ses amis, en particulier en Chine (96%), en Russie (91%) ou même au Japon (81%). Toutefois, passer du temps avec ses amis ne constitue pas un critère de vie satisfaisante. Ce sont les Australiens (29%) et les Britanniques (26%) qui le citent le plus, sans atteindre des niveaux très élevés, et ce sont les Russes (8%) et les Japonais (6%) qui le citent le moins. Par ailleurs, les jeunes sont moins satisfaits de leurs amis que de leur famille : 84% des Russes sont satisfaits de leur famille et seulement 78% de leurs amis, de même 69% des Japonais sont satisfaits de leur famille et 62% de leurs amis.
aimer, tomber amoureux
Le fait d’être amoureux est l’un des critères les plus souvent mentionnés par les jeunes pour définir une vie satisfaisante. C’est la jeunesse britannique qui accorde le plus d’importance au fait d’être amoureux (55%), loin devant les Français (35%), les Italiens (32%) ou les Espagnols (29%). Parmi la jeunesse mondiale, ce sont les Russes (11%) et les Mexicains (12%) qui y accordent le moins d’importance. À l’opposé, on trouve les Américains (46%), les Sud-Africains (38%), les Australiens (43%), les Indiens (36%) et les Israéliens (30%).
La moitié des jeunes Marocains estime que la société n’est pas tolérante avec des gens comme eux
Les jeunes Marocains éprouvent avec une force particulière le sentiment d’appartenir à leur société (83%). Seuls les Indiens (89%), les Israéliens (84 %), les Brésiliens (80%), les Chinois (79%) et les Mexicains (78%) se situent à un tel niveau. Par comparaison, 56% des Français et 65% des Espagnols éprouvent ce même sentiment.
L’expression d’un fort sentiment d’appartenance à la société n’implique pas de s’y sentir à l’aise. Près d’un jeune Marocain sur deux (48%) dit avoir le sentiment que la société n’est pas tolérante avec des gens comme lui, soit un niveau identique à celui de la jeunesse japonaise (48%) mais bien supérieur à celui de la jeunesse américaine (34%) et européenne (29%), notamment française (28%) ou espagnole (27%). Seule la jeunesse turque exprime sur ce point un niveau de malaise plus élevé (53%).
Le chômage inquiète encore et toujours…
Les jeunes Occidentaux que nous avons interrogés n’ont jamais connu le plein emploi : 45 % des jeunes Européens identifient le chômage comme l’une des plus grandes menaces pour la société, avant le terrorisme ou le changement climatique. Ils redoutent le chômage bien plus que leurs aînés : la différence est de l’ordre de 10 points (en Suède, en Grande-Bretagne, en Pologne ou en Hongrie).
Seul un jeune sur deux se dit satisfait de son travail (49%). La proportion est supérieure dans la plupart des jeunesses des pays émergents (64% en Inde, 58% en Afrique du Sud, 57% au Maroc), mais elle est légèrement moindre en Chine (45%). Les Français font mentir leur réputation en se plaçant en tête des pays occidentaux avec 61% de jeunes satisfaits par leur travail. On notera, à l’inverse, l’extrême faiblesse du niveau de satisfaction de la jeunesse japonaise (30%).
Confiance dans l’avenir professionnel
Loin d’être déprimés par la menace du chômage, les jeunes se déclarent massivement (70%) certains d’avoir un « bon travail » dans l’avenir, soit plus que leurs aînés (62 %). À l’exception notable des Japonais (32%), la jeunesse des pays développés hors d’Europe se révèle presque aussi optimiste que celle des grands pays émergents. Les Européens sont moins confiants, notamment les Grecs ou les Français dont moins de la moitié (respectivement 43% et 49%) imagine pouvoir trouver un « bon travail ».
Un bon travail doit avant tout être rémunérateur
Le niveau de rémunération est le facteur le plus souvent cité par les jeunes dans la quasi-totalité des pays pour qualifier un bon travail. Les jeunesses marocaine, scandinave, chinoise et japonaise font figure d’exception en ne plaçant pas l’argument financier en première position. En revanche, le niveau du salaire est crucial pour les Russes (71%) et les Polonais (69%). La qualité de l’ambiance au travail apparaît comme le second facteur d’une carrière réussie. Les Européens (51%) y accordent plus d’importance que les autres, tout comme les Chinois (55%), alors que les Marocains (33%) ou les Israéliens (36%) y semblent moins attachés.
L’intérêt que l’on retire de l’activité professionnelle intervient en troisième position, mais la question suscite d’importants écarts entre les pays : si les Russes ou les Français accordent beaucoup d’importance à l’intérêt de l’activité professionnelle, le salaire reste premier, à la différence des Scandinaves qui souhaitent avant tout un travail intéressant. À l’opposé, avoir un travail passionnant intéresse peu les jeunesses turque et marocaine (13%), et faiblement les jeunesses des grands pays émergents comme la Chine, l’Inde, le Brésil ou le Mexique.
À la question de savoir ce qu’est une vie satisfaisante, « avoir un travail passionnant » apparaît comme un objectif de vie de second plan. Une vie satisfaisante, c’est d’abord être en bonne santé, fonder une famille, tomber amoureux. Mais être passionné par son travail est souvent jugé aussi important que de gagner beaucoup d’argent ou même que de passer du temps avec ses amis : 33% des Mexicains citent le fait d’avoir un travail passionnant parmi les trois facteurs d’une vie satisfaisante : c’est le cas de 28 % des jeunes Indiens, Polonais et Italiens.
Il est frappant de constater que les études et la profession exercée sont pour les jeunes des éléments constitutifs de l’identité, bien plus que la religion, le groupe ethnique ou même la nationalité. Ainsi 83% d’entre eux considèrent que la formation est un élément important de leur identité et ce sentiment s’affirme avec plus de force encore dans les jeunesses des pays émergents, que ce soit en Chine (89%), au Brésil (90%), au Mexique (95%) ou en Inde (97%). De la même façon, la profession est présentée comme un facteur important de l’identité, en Inde (93%), au Brésil (81%) ou en Chine (78%). À l’inverse, la profession occupe une place moins importante dans l’identité des jeunes des pays riches (48% des Japonais, 66% des Américains et 70% des Européens).
L’utilité sociale compte mais n’est pas une priorité
Si les jeunes recherchent avant tout un métier rémunérateur, le fait d’exercer un travail utile à la société compte davantage que le prestige ou les congés. Il existe un clivage important entre >>>
>>> les Européens et les autres : 23% des jeunes Européens attachent de l’importance à l’utilité sociale de leur activité professionnelle, contre 49% des Mexicains, 38 % des Marocains, 33% des Brésiliens, 31 % des Indiens et des Turcs et 29% des Chinois. Les Anglo-Saxons citent également davantage l’utilité sociale que les jeunes Européens (29% des Américains, 26% des Canadiens ou 25% des Australiens).
La célébrité ? Non merci !
À la question des composantes d’un bon travail, le prestige, surtout valorisé par les jeunesses turque (24%), indienne (20%), marocaine (19%) et brésilienne (17%), est quasiment ignoré par les jeunesses française (4%), australienne et américaine (5%). Avoir un poste à responsabilité revêt une certaine importance pour les Indiens (18 %) ou encore les Finlandais et les Israéliens (16%). L’importance accordée aux opportunités de carrière fait apparaître des écarts importants entre les différentes jeunesses : au sein de la jeunesse européenne, les plus sensibles à ce critère sont les Estoniens (36%), les Britanniques et les Polonais (35%), loin devant les Français (22%), les Allemands (21%) ou les Espagnols (17%). Hors d’Europe, ce sont les Indiens (44%), les Russes (40%), les Mexicains et les Brésiliens (39%) qui attachent le plus de valeur aux opportunités de carrières, alors que les Japonais (10%) et les Marocains (16%) semblent délaisser cet aspect.
Si les jeunes manifestent avec force l’importance d’une vie professionnelle réussie, ils se désintéressent presque totalement de l’accès à la célébrité, qui ne compte parmi les projets d’avenir que pour les jeunesses israélienne (14%) et indienne (27%), contre 6% en moyenne dans la jeunesse mondiale.
Dans quel secteur travailler ? Le triomphe des services, l’éducation en tête
Alors qu’au niveau mondial, les secteurs primaire et secondaire représentent encore plus de la moitié des emplois, l’agriculture ne constitue un projet professionnel que pour 6% des jeunes, y compris dans les pays où la croissance doit beaucoup à ce secteur (Mexique, Brésil ou Inde). De même, l’industrie (9%), l’artisanat (9%) et la construction (8%) suscitent un intérêt limité. En revanche, plus de 70% des jeunes souhaitent s’orienter vers les services. La répartition entre les différents secteurs est assez homogène. L’éducation arrive en tête (22%), suivie par la recherche (20%). Malgré la crise financière et la mise en cause publique de ce secteur, la banque et la finance attirent davantage les jeunes que leurs aînés (19% des jeunes en moyenne, soit 5 points de plus que les 30-50 ans). Il est frappant de constater que ce sont surtout les Chinois (41%), les Indiens (32%) et les Russes (25%) qui aimeraient faire carrière dans ce secteur. En revanche, la banque et la finance n’attirent que 11 % des Japonais et 16 % des Européens. On notera cependant un intérêt beaucoup plus marqué dans la jeunesse d’Europe de l’Est, que ce soit en Estonie (29%), en Pologne (26%) ou en Roumanie (24%). Au cœur de la globalisation, le commerce ne suscite la vocation que de 10% des jeunes et n’a guère plus de succès en Chine (9%) ou en Allemagne (10%), qui sont pourtant les deux premières puissances en matière d’exportations.
À la question « que souhaiteriez-vous accomplir au cours des quinze prochaines années ? », la réponse « gagner beaucoup d’argent » remporte l’adhésion de 60% des Indiens, contre 47% des Européens. La réussite financière est donc la priorité des Indiens, alors que le projet d’acquisition d’un logement arrive en tête pour la quasi-totalité des autres jeunesses du monde. Confirmant ce premier résultat, à la question de savoir quelles sont les composantes d’une vie satisfaisante, 41% des Indiens répondent là encore « gagner beau- coup d’argent », contre 34% des Chinois et 17% des Européens. La plupart des jeunesses placent le fait de fonder une famille au-dessus de la réussite financière, à l’exception notable de la jeunesse indienne.
Le rêve des Indiens ne s’arrête pas à la richesse: ils sont 13% à considérer la célébrité comme une composante d’une vie satisfaisante, tandis que les autres jeunesses n’y aspirent que marginalement (3%). De la même façon, 27% des Indiens disent espérer devenir célèbres dans les quinze ans qui viennent, contre 6% de la moyenne globale. Au point que devenir célèbre préoccupe davantage
les Indiens que l’obtention d’un diplôme universitaire (16%) ou que le fait d’avoir des enfants (24%). Mais ce désir de célébrité ne s’apparente pas nécessairement au rêve de Bollywood : être reconnu en tant qu’artiste (musicien, cinéaste, comédien…) n’est un des trois projets prioritaires que pour 9% des Indiens, soit un chiffre identique à l’ensemble des jeunes.
C’est l’ambition qui caractérise la jeunesse indienne : parmi les critères d’un travail satisfaisant, les bonnes opportunités de carrière arrivent en seconde position (44%), après le niveau de salaire, contre 26% pour les Européens et 27% pour les Chinois. Le prestige du statut est cité par 20% des Indiens, 8% des Européens et 12% des Chinois : un poste à responsabilité est cité par 18% des Indiens, 7% des Européens et 9% des Chinois : enfin, devenir directeur ou responsable dans les 15 prochaines années est cité par 27% des Indiens, 14% des Européens et 18% des Chinois. Pour compléter le tableau d’une jeunesse à l’assaut du monde, notons que 64% des Indiens sont fiers des riches de leur pays contre 57% des Chinois et 22% des Européens.
La question portant sur l’orientation religieuse offrait les options suivantes aux personnes interrogées : « en quête de spiritualité », « agnostique », « athée », « bouddhiste », «chrétien», « hindouiste », « juif », « musulman », «shintoïste», « sikh », « d’une autre religion », « croyant, sans dénomination », « non croyant », « ne sait pas », afin d’avoir une analyse la plus affinée possible. Dans la présente note, le terme « non croyant » agrège les personnes se déclarant «athées» ou « non croyantes ».
Religion : une présence très contrastée
Parmi les jeunes des pays européens, en cumulant l’expression de l’agnosticisme et de la non-croyance2, nous obtenons un total de 38%, soit une proportion sensiblement inférieure à l’affirmation de la croyance chrétienne (46%). La jeunesse
française se distingue par un intérêt moins marqué encore pour le christianisme (28%). Près d’un jeune Français sur deux se déclare agnostique ou non-croyant (49%). L’irréligion est devenue une réalité dominante au sein de la nouvelle génération française. L’affirmation de l’appartenance au christianisme est plus importante chez les Espagnols (43%).
Elle est encore plus forte chez les Italiens (60%). Elle est massive chez les Polonais (70%) et chez les Roumains (76%), de même qu’est massive l’appartenance à l’islam au sein de la jeunesse turque (86%).
Si, en Pologne, les jeunes sont encore nombreux à se déclarer chrétiens, ils sont cependant une majorité (61%) à se dire pas ou peu intéressés par l’idée de consacrer du temps à la religion, cette proportion atteignant 77% parmi les Allemands et 80% parmi les Français.
Dans les pays émergents, à l’inverse, c’est dans des proportions très supérieures que les jeunes se déclarent intéressés par l’idée de consacrer du temps à la religion, que ce soit au Brésil (58%), en Turquie (64%), en Inde (68%), en Afrique du Sud (72%) ou au Maroc (90%). Parmi les pays riches, la jeunesse américaine (50%) et la jeunesse israélienne (52%) se trouvent sur ce point plus proches des pays émergents que de la jeunesse européenne (24%), laquelle est comparable aux jeunesses canadienne (26%) et australienne (26%). Pour des raisons évidemment très différentes, les jeunesses des deux anciennes grandes puissances communistes sont les moins intéressées par l’idée de consacrer du temps à la religion (22% en Chine et 13% en Russie).
La religion, facteur d’identité
Dans les 25 pays, la jeunesse reconnaît toujours plus d’importance à la dimension religieuse dans son identité qu’elle n’est disposée à consacrer du temps à la religion, comme si le lien avec la religion devait davantage à des logiques d’affiliation qu’à des logiques d’engagement.
La foi religieuse n’est pas une valeur que les jeunes veulent en priorité transmettre à leurs enfants
C’est notamment le cas des Français (4%), des Estoniens (3%) et des Européens en général (7%), avec cependant un intérêt plus marqué chez les Roumains (20%). La volonté de trans- mettre la foi religieuse aux enfants à la maison est plus répandue chez les Américains et les Brésiliens (21%), les Turcs (29%), les Sud- Africains (36%) et les Marocains (56%).
Les jeunes nés après 1980 n’ont pas été directement marqués par l’époque communiste. Forme de religion immanente, le communisme aurait pu provoquer par sa chute un retour du religieux sous forme de transfert de croyance. Il n’en est rien chez les jeunes. Les Hongrois (30%), les Russes (28%) et les Estoniens (27%) sont peu nombreux à considérer que la religion joue un rôle déterminant dans leur identité. Cependant, les jeunesses de l’ex-URSS s’accordent à penser que les valeurs spirituelles devraient jouer un rôle plus important dans la société. Les Russes (88 %) y attachent plus d’importance encore que les Estoniens (78%). Cette opinion est partagée par seulement 43% des Hongrois. Le niveau déclaré de non croyance est marginal chez les Russes (13%), mais plus prononcé chez les Hongrois (34%) et chez les Estoniens (41%). En outre, seuls 13% des Russes et 11% des Estoniens se disent intéressés par le fait de consacrer plus de temps à la religion, contre 27% des Hongrois.
Par contraste, Polonais et Roumains affichent un plus grand attachement à la religion : 57% des Roumains et 55% des Polonais lui accordent une place importante dans leur identité personnelle. Seuls 13% des Polonais et 9% des Roumains se déclarent non-croyants. En revanche, si 76% des Roumains considèrent qu’on devrait accorder plus de place dans la société aux valeurs spirituelles, les Polonais ne sont que 46% à le penser. En outre, 46% des jeunes Roumains se disent intéressés par le fait de consacrer du temps à la religion, contre 33% des Polonais.
Mais les jeunes des cinq pays d’Europe post- communiste sont peu nombreux à désigner la foi religieuse comme une qualité que les enfants devraient être encouragés à développer à la maison : 3% des Estoniens, 6% des Hongrois, 11% des Polonais et 12% des Russes. Les Roumains (20%) sont toutefois sensiblement plus nombreux à la citer.
Des Européens moins attirés par les valeurs spirituelles que le reste du monde
Nous avons voulu distinguer la religion et la spiritualité dans notre enquête afin de permettre aux jeunes interrogés de préciser leur point de vue concernant cette dimension de leur vie. 44% des Européens estiment que l’on devrait accorder plus de place aux valeurs spirituelles dans la société. Par contraste, 89% des Chinois partagent cette opinion, mais aussi 88 % des Russes, 84% des Marocains, 81% des Turcs, 80 % des Sud-Africains, 75% des Indiens, 72% des Mexicains, 71% des Brésiliens et 56% des Américains. Parmi les jeunesses d’Europe, les différences sont importantes. Ce sont les Français et les Allemands qui sont les moins nombreux à vouloir accorder plus de place aux valeurs spirituelles (31%). En revanche, les Roumains (76%) et les Estoniens (78%) sont en Europe ceux qui souhaitent le plus massivement leur accorder plus de place.
Cette demande de spiritualité est partout dans le monde moins importante chez les 16-29 ans que chez les 30-50 ans, à l’exception de la Suède (32% chez les jeunes, 27% chez leurs aînés) et du Royaume-Uni (36% chez les jeunes, 33% chez leurs aînés).
La famille demeure le fondement de la société
L’attachement de la jeunesse à la famille est partout très puissant : 77% des Européens la considèrent comme le fondement de la société. Dans les pays émergents, les jeunesses affichent un attachement plus grand encore, comme les Brésiliens (87%), les Marocains (88%), les Turcs (89%), les Indiens (92%), les Chinois et les Mexicains (94%).
Sexualité : une semi-liberté
Pour une fraction non négligeable de la jeunesse, les relations sexuelles hors mariage ne sont pas acceptables : 20% des Européens les désapprouvent. En dehors de l’Europe, cette réprobation est plus forte parmi les Américains (40%), les Sud-Africains (60%), les Indiens (74%) ou encore les Marocains (85%). Sur ce plan, les jeunes sont plus conservateurs que ce que l’on pense généralement, les jeunesses les plus permissives se trouvant en Europe. Ce sont les Français (10%) et les Estoniens (12%) qui sont les moins nombreux à considérer que les relations sexuelles hors mariage ne devraient pas être autorisées.
Les Espagnols (88%), les Français (87%), les Britanniques et les Allemands (85%) sont les plus nombreux à dire n’avoir aucun problème avec les personnes ayant une orientation sexuelle différente de la leur. À l’inverse, les plus nombreux à exprimer une gêne sont les Marocains (40%), les Israéliens (38%), les Turcs (37%) et les Chinois (30%). Dans certains pays, les jeunes sont moins tolérants que leurs aînés, comme on peut le voir en Pologne (22% des jeunes expriment une gêne, contre 10 % de leurs aînés), en Roumanie (29% contre 18%), en Estonie (18% contre 9%) et en Grèce (14% contre 6%).
L’égalité entre les sexes devient-elle consensuelle ?
Les jeunes Occidentaux font de l’égalité hommes/femmes l’une des caractéristiques de leur société idéale (94% des Américains et des Français, 93% des Canadiens et des Espagnols,
91% des Allemands, des Finlandais, des Australiens et des Britanniques). La jeunesse marocaine est la plus rétive à l’égalité des sexes, 50% des Marocains ne retenant pas ce critère pour définir leur société idéale, de même, mais dans une moindre mesure, que les jeunesses japonaise (30%), israélienne (24%) et turque (20%).
Pour les Indiens, la technologie ne fait pas le bonheur
26% des Européens pensent que les gens seraient plus heureux sans la technologie moderne. Cette opinion est partagée par 37% des Roumains, contre seulement 17% des Estoniens, technophiles réputés. Les Indiens sont encore plus nombreux à douter des bien- faits de la technologie moderne (51%) avec les Turcs (47%), les Marocains (47%) et les Israéliens (47%).
Sur certains points, les jeunesses européennes manifestent un attachement au formalisme qui est peu commenté. On note tout d’abord des positions contrastées en ce qui concerne la religion : 45% des Italiens estiment qu’elle constitue une dimension importante de leur identité, contre 24% des Espagnols. Il en va de même pour ce qui est des relations sexuelles hors mariage : 24% des Italiens s’y opposent, contre 17% des Espagnols. Les deux jeunesses pensent que la famille devrait être le fondement de la société, les Italiens (78%) plus massivement encore que les Espagnols (71%). Les Espagnols se montrent plus libéraux que les Italiens vis-à-vis des personnes ayant des orientations sexuelles différentes de la leur : ils ne sont que 8% à reconnaître que cela leur pose un problème, contre 14% des Italiens. Enfin, si les deux jeunesses considèrent ensemble que leur société idéale se caractérise par l’égalité des sexes, les Espagnols l’affirment avec plus de force (93%) que les Italiens (87%).
Internet n’entame pas l’intérêt pour la culture
Contrairement à ce qu’on peut entendre, les nouvelles technologies ne bouleversent pas la consommation culturelle des jeunes : si 83% sont intéressés par l’Internet, ils ne sont pas moins nombreux à se dire intéressés par la lecture (73%), par le cinéma ou le théâtre (76%),
par la télévision (69%), par les voyages (88%) et par la musique (87%). Les jeux vidéo, si sou- vent critiqués, n’attirent que 59% des 16-29 ans et arrivent derrière le sport (71%) et les musées (61%). Si les jeunes sont moins intéressés par la lecture que leurs aînés (- 7 points), on ne note pas de différences d’intérêt significatives entre les 16-29 ans et les 30-50 ans en ce qui concerne les autres activités culturelles.
Le cinéma, très populaire en France et aux états-Unis
Les Américains (81%) et les Français (83%) semblent passionnés par le cinéma. Les Italiens manifestent un intérêt particulier pour les activités culturelles (70%, contre 59% des Européens) et pour les visites de musées et d’ex- positions (67%, contre 57% des Européens). La lecture intéresse peu la jeunesse est-européenne (62% des Estoniens, 63% des Roumains, contre, par exemple, 76% des Italiens). Les Hongrois s’intéressent encore moins à la lecture (61%), comme aux autres centres d’intérêt, à l’exception des jeux vidéo, qui semblent les captiver (67%, contre 55% des Européens). Enfin, les jeunesses des pays émergents, en Inde, en Chine et, dans une moindre mesure, au Brésil, au Mexique, en Turquie et au Maroc, semblent massivement attirées par chacune des pratiques culturelles. On peut imputer ces résultats à une caractéristique des échantillons d’internautes, parmi lesquels, dans ces pays-là, les catégories aisées sont surreprésentées.
L’apparence compte, surtout en Europe de l’Est
Les jeunes se préoccupent plus d’être beaux ou belles que leurs aînés : 83% des 16-29 ans, contre 77% des 30-50 ans. L’importance accordée à la beauté est plus prononcée chez les femmes (85%) que chez les hommes (80%), chez les 16-19 ans (85%) que chez les 40-50 ans (74%). De même, les jeunes se préoccupent davantage de suivre la mode (49% des 16-29 ans, contre 42% des 30-50 ans). Les 16-19 ans sont particulièrement nombreux à juger important de suivre la mode (53%, contre 38% des 40-50 ans). La jeunesse d’Europe de l’Est apparaît plus concernée par ces préoccupations, à l’exception des Estoniens en ce qui concerne la mode (39% seulement). La jeunesse indienne affirme un intérêt spectaculaire pour ces sujets : 94% disent qu’il est important d’être beau et 80% qu’il est important de suivre la mode.
Les jeunes de l’Est semblent soumis au diktat des apparences : 75% des Hongrois, 78% des Polonais et 79% des Roumains considèrent comme important de suivre les tendances de la mode, contre 45% en moyenne pour les jeunes Européens. De même, 92% des Roumains, 87% des Polonais et 84% des Hongrois accordent une importance à la beauté, contre 76% des jeunes au sein de l’Union.
Toutefois, derrière ces similitudes se cachent des différences notables relatives au genre. La répartition selon le genre suit un chemin peu habituel en Hongrie, où les hommes semblent
accorder plus d’importance à la mode (77%) que les femmes (72%), et légèrement plus à la beauté (85% des hommes contre 83% de femmes). En revanche, 82% des Polonaises affirment qu’il est important de suivre la mode et 91% d’être beau ou belle, les scores des hommes étant respectivement de 74% et 84% : en Roumanie, 81% des femmes soulignent l’importance de la mode contre 76% des hommes. En revanche, la beauté est aussi importante pour les Roumains (92%) que pour les Roumaines (91%).
Source :
3. Traduction de l’expression anglophone couch potatoe, qui désigne un mode de vie très sédentaire.
Si les jeunes sont férus de nouvelles technologies, les Britanniques en sont les champions. L’informatique façonne leur temps libre, 89% des jeunes étant intéressés par Internet et 60% par les jeux vidéo. 82% des Britanniques sont également des amateurs de télévision, la moyenne européenne se situant à 69%. Toutefois, c’est dans l’usage d’Internet que leur penchant pour les nouvelles technologies se montre avec le plus de force. Un jeune Britannique sur deux utilise son portable pour surfer, la moyenne européenne étant de 34%. Enfin, ils sont plus nombreux à se rendre sur les réseaux sociaux (49%, contre une moyenne européenne de 34%) et à effectuer leurs achats en ligne (37%, contre 26% des Européens).
D’une manière générale, signalons que les Anglo-Saxons et les Scandinaves se caractérisent par un usage plus diversifié du Web.
Toutefois, le choix de la télévision et de l’informatique semble s’opérer aux dépens d’autres passe-temps, en particulier les activités artistiques et culturelles (seul un Britannique sur deux s’y intéresse, contre 59% des Européens) ou le sport (55%, contre 69% des Européens). Certes, cette spécificité est nationale plutôt que générationnelle (seuls 35% des Britanniques de 30 à 50 ans font du sport). Néanmoins, elle invite à se demander si le goût de l’écran et la passion des jeunes Britanniques pour le high-tech ne les rendent pas plus vulnérables aux maladies de la civilisation, dont la sédentarisation est la plus visible.
La vie online monte en puissance …
Les résultats de notre enquête témoignent aussi de l’importance croissante des nouvelles technologies dans la vie quotidienne. Certes, les 16-29 ans sont aussi nombreux (62%) que les 30-50 ans (63%) à apprécier l’apport du numérique, en revanche les jeunes se montrent plus aptes à tirer profit des opportunités offertes par le Web : ils ne se limitent pas à la lecture, à l’envoi de mails ou au suivi de l’actualité, mais ils considèrent Internet comme un espace à part entière de leur vie sociale. Ils sont donc plus nombreux que leurs aînés à visiter les réseaux sociaux (37% des jeunes, contre 27% de leurs aînés) et à chatter avec leurs proches (21% contre 15%). De plus, le Web est pour eux un véritable espace de loisirs, dans lequel ils écoutent de la musique, regardent des vidéos, les téléchargent et s’adonnent aux jeux en ligne. C’est une partie importante de la vie des jeunes qui se déroule à présent sur Internet : ils sont nombreux à y faire des achats (18%), à y travailler ou à y étudier (32%). On peut d’ailleurs s’interroger sur le fait de savoir si la distinction entre le virtuel et le réel demeure pertinente, tant la vie sociale des jeunes semble se dérouler online. On repère des spécificités régionales : alors que chatter est particulièrement populaire en Europe de l’Est (de 4 à 12 points au-dessus de la moyenne selon le pays), les réseaux sociaux ont la faveur des pays anglophones et scandinaves (de 7 à 17 points d’écart à la moyenne), tandis que l’Europe du Sud se caractérise par un usage plus traditionnel du Web, limité aux mails, au travail et au suivi de l’actualité.
Les jeunes sont les principaux utilisateurs de l’Internet mobile : 38%, contre seulement 27% de leurs aînés, l’écart dépassant 15 points en Australie, Estonie, France, Grande-Bretagne, Japon, Chine et Afrique du Sud. Les jeunes Britanniques sont particulièrement nombreux à choisir ce mode d’accès à Internet (51%), confirmant ainsi leur goût pour les nouvelles technologies.
… mais demeurent des aspirations matérielles
Malgré l’importance qu’ils accordent aux loisirs et aux nouvelles technologies, les jeunes n’oublient pas pour autant leurs besoins plus matériels, au premier rang desquels le logement. Le marché immobilier peut être conforté par la persistance de l’envie d’acquérir une maison ou un appartement (56%). Autre singularité, si « manger à sa faim » constitue évidemment pour les jeunes un critère de vie satisfaisante, c’est paradoxalement la jeunesse des pays les plus riches, tels la France (21%), la Finlande (16%), l’Australie (16%) ou le Japon (18%), qui accorde le plus d’importance à la satisfaction de ce besoin élémentaire.
Des jeunes plutôt favorables à la récompense de la performance individuelle
Pour 52% des Européens, la société idéale est celle où les richesses seraient réparties de manière équitable, tandis que pour 47% d’entre eux elle est celle qui récompense la performance individuelle. Parmi les jeunesses qui mettent l’accent sur l’égalité, on retrouve les Finlandais et les Français (67%), les Italiens (60%) et les Suédois (58%), mais aussi les Brésiliens (62%) et les Turcs (63%). À l’autre extrémité, les Russes (83%), les Américains et les Sud-Africains (65%) plébiscitent la valorisation de la performance individuelle.
Les disparités intergénérationnelles sont intéressantes à relever. Ainsi, en Chine, 47% des jeunes expriment leur attachement à la récompense de la performance individuelle, contre 37% des 30-50 ans. Des écarts comparables se retrouvent en Italie, aux États-Unis, au Canada, en Suède, en Australie, en Allemagne, au Royaume-Uni et en France. À l’inverse, les jeunes Estoniens, Roumains, Sud-Africains, Russes et Mexicains optent plus souvent pour une répartition équitable des richesses que leurs aînés.
Les Anglo-Saxons préfèrent une société où l’on paie le moins d’impôts possible à une société garantissant une protection sociale étendue : ce penchant pour une pression fiscale moins forte domine chez les Américains (72%), les Canadiens (62%) et les Australiens (52%). L’opinion des Britanniques est plus ambivalente (49% pour chacune des deux options), ce qui est également le cas des Israéliens. En Europe, ce sont les Italiens (51%) qui choisissent le plus volontiers une société où l’on paie le moins d’impôts possible.
Une demande de protection sociale
Parmi les défenseurs de la protection sociale étendue, on trouve les Suédois (71%), mais surtout les jeunesses de Chine (86%), de Russie (82%), de Turquie (78%) et du Mexique (75%). On notera l’attachement particulièrement fort exprimé par la jeunesse grecque à une protection sociale aussi étendue que possible (76%). Il faut peut-être voir dans ce résultat un effet de la profonde crise traversée par ce pays.
Des anglo-Saxons très libéraux
Percevoir des allocations-chômage et refuser un emploi qui ne correspond pas à ses qualifications n’est pas considéré comme un droit par 63% des Britanniques, 52% des Italiens et des Australiens, 51% des Sud-Africains et 49% des Américains. A contrario, 63% des Français y voient un droit, tout comme 67% des Grecs et 58% des Espagnols. Il n’est pas surprenant de noter que ces réponses sont plus élevées dans les pays à forte tradition sociale, comme la Finlande (62%) et la Suède (70%). Les jeunes Européens sont massivement favorables au droit à un enseignement universitaire gratuit (85% contre 71% aux États-Unis) et au droit à des soins gratuits en l’absence de revenus (85% contre 64% aux États-Unis).
Pour les Chinois et les Indiens, l’argent fait le bonheur
64% des Indiens, 57% des Chinois et 49% des Israéliens déclarent être fiers des riches de leur pays, soit un écart très important par rapport aux Français (16%), aux Estoniens et aux Espagnols (18%), aux Grecs et aux Mexicains (20%) ou aux Finlandais (21%). La Turquie est le seul pays où les 16-29 ans sont notablement moins fiers (41%) de leurs riches que les 30-50 ans (47%).
En outre, 34% des Chinois et 41% des Indiens considèrent que gagner beaucoup d’argent constitue un critère important d’une vie satisfaisante. De la même façon, les jeunes de ces deux pays considèrent le fait de gagner beaucoup d’argent comme un objectif à accomplir dans les quinze prochaines années : c’est le cas de 64% des Chinois et 60% des Indiens. Cet objectif n’est pas l’apanage des jeunesses des pays émergents, puisqu’il est également très populaire chez les Australiens, les Canadiens et les Allemands (54%) ou chez les Américains (53%). Gagner beaucoup d’argent compte moins pour les Italiens (39%), les Grecs (37%), les Japonais (36%) et les Hongrois (33%). On remarquera que cet objectif est partagé par 48% des Français, soit un chiffre équivalent à la moyenne européenne (47%).
Appelés à choisir entre le moins d’impôts possible et le plus de protection sociale possible, 62% des Canadiens et 52% des Australiens optent pour la première solution. Ils ne sont devancés que par les jeunes Américains, qui sont 72% à préférer une société où l’on paie le moins d’impôts possible. Naturellement, cette préférence pour des prélèvements obligatoires plus faibles ne se traduit pas par une attitude rebelle vis-à-vis de l’impôt : 89% des Américains, 87% des Australiens et 84% des Canadiens admettent que chacun doit payer ses impôts.
39% des jeunes Européens ne veulent pas payer les retraites de leurs aînés…
Les jeunes sont beaucoup plus partagés qu’il n’y paraît sur la question de la solidarité financière avec les générations âgées. Ce refus est plus prononcé dans les pays riches, confrontés à des problèmes démographiques considérables. Ainsi, 52% des Grecs, 50% des Japonais, 47% des Américains et 46% des Italiens disent de ne pas être prêts à financer les retraites des générations âgées, de même que 44% des Canadiens et 39% des Français. D’une manière générale, 39% des jeunes Européens disent ne pas être d’accord pour payer les retraites de leurs aînés.
… seuls 21 % des Russes partagent cette opinion
En totale opposition avec les jeunes des pays riches, 83% des Indiens, 77% des Chinois, 76% des Marocains et 73% des Russes se disent prêts à payer pour les retraites de leurs aînés. Parmi les puissances émergentes, la jeunesse brésilienne est relativement peu encline à financer les retraites des générations âgées (54%) et si la tendance est en hausse par rapport aux 30-50 ans (48%), la proportion des jeunes refusant cet effort est importante (39%). En Europe de l’Est, très touchée par le vieillissement de la population, la jeunesse est partagée : si 63% des Estoniens et 60% des Roumains déclarent accepter de payer pour les retraites des générations âgées, ce n’est le cas que de 46% des Polonais. Le système par capitalisation n’explique pas tout : les Polonais ont basé leur système mixte sur le modèle allemand, mais la jeunesse allemande (56%) accepte plus largement de financer les retraites des aînés que la jeunesse polonaise (46%).
Tendance notable, au sein de l’Union européenne, les 16-29 ans sont moins solidaires avec les générations âgées (52%) que les 30-50 ans (58%), l’écart étant particulièrement prononcé en Roumanie (- 15 points), en Estonie (- 12 points), ainsi qu’en Espagne, en Italie et en Suède (- 8 points).
Les jeunesses des pays d’émigration sont les plus favorables au modèle multiculturel
Ce sont les Chinois qui se prononcent le plus massivement pour une société où les immigrés conserveraient leurs traditions et leur culture (85%), par opposition à une société où ils devraient s’intégrer : on trouve ensuite les Mexicains (75%), les Brésiliens (75%), les Polonais (71%), les Indiens (68%), les Sud- Africains (66%) et les Marocains (63%). À l’opposé, la plupart des jeunes Européens optent massivement pour l’intégration des immigrés, comme le montrent les réponses des Espagnols (68%), des Allemands et des Français (67%), ou des Britanniques (66%). Notons que dans ces quatre pays, les jeunes demeurent malgré tout nettement plus nombreux que les 30-50 ans à préférer une société où les immigrés conservent leurs traditions (+ 17 points en France, + 12 points au Royaume-Uni, + 10 points en Espagne et + 9 points en Allemagne).
À la lecture de ces résultats, on aura relevé que les jeunesses les plus favorables à une perpétuation des traditions et de la culture des immigrés dans leur pays d’accueil sont issues des pays d’émigration : la Chine, le Mexique, la Pologne, l’Inde ou le Maroc. À l’inverse, les jeunes des pays accueillant un nombre important d’immigrés sont les plus attachés à l’idée d’intégration : l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni. Ce mécanisme joue au niveau européen, entre une Europe de l’Est favorable à une conservation de
la culture d’origine des immigrés, à l’exception de l’Estonie, et une Europe de l’Ouest préférant leur intégration. C’est notamment sur ce plan que se manifeste la singularité de la culture américaine, où la jeunesse est majoritairement favorable (57%) à un modèle multiculturel, moins défendu cependant par les 30-50 ans (48%). La jeunesse américaine représente donc le seul cas d’un pays d’immigration favorable à la préservation de la culture d’origine des immigrés.
Des jeunes partagés sur la question des signes religieux au travail
Les jeunesses les plus favorables au port des signes religieux sur le lieu de travail sont celles du Maroc (66%), d’Israël (65%), des États-Unis (65%) et de Pologne (61%), où la religion joue un rôle important sur les plans politique et sociétal. À l’autre bout du spectre, les Japonais y sont les moins favorables (19%). La situation est contrastée dans les pays qui accueillent des populations provenant de pays musulmans. Les Français sont les moins favorables (22%) au port de signes religieux sur le lieu de travail. Les Allemands y sont également opposés, mais dans une proportion moins importante (42% acceptent le port des signes religieux). En revanche, les Britanniques y sont majoritairement favorables (57%).
Cette question n’a pas été posée au Maroc.
Ce système d’opinions croisées, qui voit les pays d’émigration défendre le multiculturalisme et les pays d’immigration préférer l’intégration, laisse deviner la place que jouera la controverse suscitée par la cohabitation culturelle dans les pays européens. Le décalage est particulière- ment important entre les Marocains qui défendent le port des signes religieux (66%) et les Français qui y sont fortement opposés (71%). Les Allemands et les Turcs sont moins éloignés sur la question du port des signes religieux, que ce soit pour s’y opposer (52% des Allemands et 47% des Turcs) ou pour l’accepter (42% des Allemands et 50% des Turcs). En revanche, les Britanniques admettent plus largement le port des signes religieux (57%) que les Indiens (46%).
France, Allemagne, Royaume- Uni : une défiance vis-à-vis des musulmans
D’une manière générale, les opinions négatives envers les musulmans sont assez répandues au sein de la jeunesse. En Europe, les Espagnols (42%), les Allemands (37%), les Français (37%), les Suédois (35%) et les Britanniques (32%) sont les jeunes exprimant le plus d’opinions négatives à l’égard des musulmans. Les niveaux les plus faibles d’opinions négatives se trouvent chez les Polonais (17%) et les Roumains (14%). Dans le monde, les plus défiants sont les jeunesses israélienne (37%), australienne (32%) et canadienne (29%). Malgré le traumatisme du 11 Septembre, les jeunes Américains sont moins nombreux à faire part d’un sentiment négatif à l’égard des musulmans (24%), de même que les Russes (19%), en dépit des tensions dans la région du Caucase. C’est parmi les jeunesses indienne (16%), japonaise (14%), brésilienne (13%), chinoise (8%) et turque (5%) que les opinions négatives sont les moins répandues4.
Parlement et gouvernement : les Européens défiants
Alors que 71% des Chinois et Indiens expriment leur confiance dans leur gouvernement, le scepticisme domine la jeunesse européenne, au sein de laquelle seuls les Suédois se disent majoritairement confiants dans leur gouvernement (51%). Les Marocains et Israéliens témoignent également d’un fort sentiment de confiance à l’égard de leur gouvernement (60%). À l’autre extrémité, on trouve les Mexicains (14%), les Français (17%), les Espagnols et les Italiens (20%). La confiance dans le parlement national est toujours très faible dans les pays où la jeunesse est particulièrement défiante envers son gouvernement, ce que confirment les résultats en Grèce, en Pologne, en Roumanie ou en Afrique du Sud, où la confiance dans ces deux institutions ne dépasse pas non plus le quart des jeunes enquêtés.
Un point semble néanmoins rassembler tous les jeunes du monde : ils sont légèrement moins défiants que leurs aînés à l’égard de ces institutions politiques. L’écart entre les 16-29 ans et les 30-50 ans est parfois significatif, comme au Maroc (+ 15 points), en Grèce (+ 10 points), au Royaume-Uni ou en Estonie (+ 9 points). L’Inde fait figure d’exception, avec une confiance dans le gouvernement moins importante chez les 16-29 ans (71%) que chez les 30-50 ans (78%) et une confiance dans le parlement de 66% chez les jeunes et de 76% chez leurs aînés.
Les institutions régaliennes sont moins décriées
Partout, l’armée recueille la confiance d’au moins 40% des jeunes, à l’exception des Japonais (36%). Les Russes (41%) et les Allemands (43%) manifestent une confiance relativement faible à l’égard de leur armée. En revanche, elle fait un triomphe chez les Indiens (93%), les Chinois (84%) ou les Israéliens (80%). En Europe, les Finlandais et les Britanniques (67%) sont les jeunesses qui ont le plus confiance dans leur armée.
Pour ce qui est de la police, les jeunes expriment une confiance forte en Finlande (74%), en Inde (71%), en Suède et en Australie (68%), en Chine et en Israël (64%). Les jeunes les moins confiants sont les Mexicains (17%), les Russes (23%), les Sud-Africains (35%) et les Grecs (37%).
Concernant le système judiciaire, la défiance des jeunes est plus forte encore : les plus confiants restent les Indiens (74%), les Israéliens (71%) et les Chinois (64%), alors que les Mexicains (19%), les Russes (29%) et les jeunes d’Europe du Sud se distinguent par un très faible niveau de confiance dans leurs institutions judiciaires (Italie 28%, Espagne 30%, Grèce 32%).
Enfin, les médias sont également frappés par cette crise de confiance, notamment au sein de la jeunesse européenne, où seuls les Finlandais leur font majoritairement confiance (61%). La confiance envers les médias est plus forte en Europe de l’Est (Estonie 47%, Roumanie 35%, Pologne 32%) qu’en Europe de l’Ouest (Italie 20%, France 23 %). Les Indiens (72%), les Israéliens (58%), les Chinois (54%) et les Marocains (53%) se montrent les plus confiants envers leurs médias.
Le multilatéralisme a les faveurs de la jeunesse
80% des Indiens, 66% des Brésiliens, 64% des Chinois et des Sud-Africains et 62% des Israéliens accordent leur confiance aux Nations Unies. À l’inverse, les jeunesses de Turquie et du Maroc (40%), de Russie (41%) ou du Japon (43%) manifestent une confiance plus limitée. Les jeunes ont davantage confiance que les 30-50 ans dans les Nations Unies : les écarts sont parfois considérables, comme au Maroc, en Israël ou en Grèce, ce qui n’empêche pas les jeunes Grecs d’être les moins confiants (36%). L’Organisation mondiale du commerce (OMC) suscite moins la confiance que les Nations Unies mais partout, à l’exception de la Russie, les jeunes lui accordent leur confiance au moins autant et souvent plus que leurs aînés. Les pays émergents qui en ont fait leur tribune ces dernières années voient leurs jeunesses placer en elle une plus grande confiance, comme le montrent les Indiens (81%), les Chinois (62%), les Sud-Africains (60%) et les Brésiliens (55%). Les jeunesses grecque (28%), espagnole (30%), russe (35%), américaine (37%), italienne et française (38%) expriment les niveaux de confiance les plus bas envers l’OMC.
Les Mexicains expriment une défiance record à l’égard de toutes leurs institutions nationales, à l’exception de leur armée. Un tiers accorde sa confiance aux médias et aux institutions religieuses, mais surtout seuls 14% des Mexicains font confiance à leur gouvernement et 16% à leur parlement. La confiance que la jeunesse mexicaine place dans sa police (17%) et son système judiciaire (19%) est à peine plus forte. Plus spectaculaire encore, la jeunesse mexicaine exprime même une faible confiance (44%) envers les gens en général.
Le Mexique se classe tristement parmi les dix premiers pays du monde pour son taux d’homicides, directement lié à la guerre entre narcotrafiquants. Sur les 40 morts journaliers, la majorité est âgée de moins de 25 ans. Ces chiffres expliquent sans doute en partie le niveau de confiance très faible que les jeunes Mexicains accordent à leurs institutions.
Les Suédois se distinguent par un niveau relativement élevé de confiance dans leur parlement (50%) et dans leur gouvernement (51%). Ils détiennent le record avec l’Inde et Israël parmi les démocraties. Ces chiffres sont respective- ment de 36% et 40% pour les Finlandais, contre 23% et 25% en moyenne au sein de la jeunesse européenne. Un système social plus inclusif et protecteur, et un système politique fondé sur le consensus pourraient contribuer à expliquer cette moindre lassitude des jeunesses nordiques.
De même, dans ces deux pays, les institutions régaliennes suscitent moins la défiance des jeunes : 55% croient en leurs juges (contre 41% dans l’Union européenne) et 74% des Finlandais et 68% des Suédois font confiance à leur police nationale, contre 51% en moyenne dans l’Union. Enfin, les jeunes Scandinaves accordent plus volontiers leur confiance aux gens en général (71% en Suède, 68% en Finlande) que les autres Européens (55% en moyenne et 43% seulement en France).
« Je peux décider moi-même de ma propre vie »
Les jeunes ont la conviction de pouvoir décider eux-mêmes de leur vie (79%). Ce sentiment est particulièrement répandu parmi la jeunesse estonienne (90%), russe (89%) et polonaise (88%) ou encore indienne (90%) et mexicaine (87%). On notera que cette conviction n’est pas aussi largement partagée par les jeunesses hongroise, grecque et turque (67%) et moins encore par les Japonais (46%).
Apprendre l’indépendance aux enfants
Les jeunes estiment nécessaire de transmettre aux enfants le sens de l’indépendance. Les Estoniens (45%), les Hongrois (50%) et les Chinois (58%), en particulier, pensent que l’indépendance compte parmi les qualités que les enfants doivent être le plus encouragés à développer à la maison. À cet égard, la jeunesse française se distingue par une moindre importance accordée à l’indépendance (12%) et préfère transmettre le sens de l’obéissance (36%).
Choix du conjoint : les jeunes tiennent à l’assentiment familial
Parmi les jeunes interrogés, presque tous les Chinois (92%), les Indiens (91%) et les Sud- Africains (90%) considèrent qu’il est important pour eux que leur famille accepte leur conjoint ou leur petit ami. Cette opinion est à peine moins marquée parmi les Russes (85%), les Européens (83%), les Américains (82%) ou les Japonais (79%). Ainsi les jeunes accordent une grande importance à l’assentiment du cercle familial pour le choix de leur conjoint.
Une jeunesse prête à désobéir pour combattre l’injustice
La jeunesse se déclare disposée à la révolte face à l’injustice. Au plan global, près d’un jeune sur deux (49%) est d’accord avec l’affirmation selon laquelle il est acceptable de désobéir à la loi pour combattre l’injustice dans la société. Cet accord est partagé en moyenne par 47% des jeunes Européens (contre 44% qui sont en désaccord) et par 42% des Britanniques, 51% des Grecs, 57% des Français et 60% des Espagnols.
35% seulement des Américains se déclarent satisfaits de la situation générale de leur pays. S’ils devancent largement la jeunesse mexicaine (9%) et européenne (27%), ils expriment cependant un taux de satisfaction très inférieur à celui des Canadiens (68%), des Australiens et des Chinois (61%).
Mais l’optimisme demeure de rigueur, puisque 87% des Américains pensent que les gens ont le pouvoir de faire évoluer la société par leurs actions et par leurs idées. Un optimisme cette fois plus proche de celui qu’affichent les jeunesses brésilienne (90%), indienne (86%) et même chinoise (84%).
S’agissant de leurs concitoyens, les Américains sont convaincus qu’ils ont la possibilité de choisir leur propre vie (86%). S’agissant d’eux-mêmes, les Américains sont tout aussi nombreux (86%) à penser qu’ils peuvent décider de leur vie, opinion moins répandue dans la jeunesse européenne (79%) mais tout aussi répandue parmi les Chinois (83%), les Brésiliens (84%) ou les Indiens (90%). Invités à définir leur société idéale, les jeunes Américains sont plus nombreux (59%) que les Européens (49%) à insister sur la stabilité et la tradition plutôt que sur le changement. Un jeune Européen sur deux (50%) déclare préférer le changement à la stabilité, contre 41% des Américains.
On comprendra davantage la singularité de la jeunesse américaine sur ce point en indiquant que la préférence pour le changement est également dominante parmi les Brésiliens (57%), les Turcs (61%) et les Mexicains (69%).
Les jeunesses des grandes démocraties émergentes approuvent cette affirmation, qu’il s’agisse des Brésiliens (54%) ou plus encore des Indiens (71%). Enfin, et c’est peut-être l’un des résultats les plus notables de notre enquête, 47% des Chinois interrogés disent être d’accord avec l’idée qu’il est acceptable de désobéir à la loi pour combattre l’injustice dans la société.
Mourir pour la patrie ?
À la question de savoir s’il faut être prêt à mourir à la guerre pour défendre son pays, les jeunes Européens répondent massivement non (59%). Les jeunesses européennes les plus hostiles à cette idée sont les Espagnols (75%), les Italiens (72%) et les Allemands (65%), tandis que le refus des Français se situe au niveau de la moyenne européenne (59%). On sera peut-être surpris de relever que les jeunes Britanniques n’y sont pas plus favorables (56% ne sont pas prêts à mourir pour la patrie). En revanche, l’idée de mourir à la guerre pour défendre son pays suscite l’approbation d’une majorité relative de jeunes en Roumanie, en Pologne (47%) ou en Finlande (48%), et d’une majorité absolue en Grèce (55%).
La jeunesse américaine reste relativement dis- posée à mourir pour la patrie (47%). Les jeunesses les plus opposées à une telle idée sont les Russes (58%) et les Japonais (80%). À l’inverse, les jeunesses les plus disponibles pour le sacrifice ultime sont les Israéliens (67%), les Marocains (69%), les Turcs (71%), les Chinois (71%) et les Indiens (76%).
Interrogés sur ce qui constitue selon eux les plus grandes menaces pour la société, les Allemands sont 47% à pointer « la guerre », à égalité avec « la pauvreté et la famine » (48%). La peur de la guerre devance la crainte du chômage, de l’effondrement du système financier, du terrorisme ou encore de la pollution. Notons que cette peur de la guerre est en baisse par rapport aux 30-50 ans (55%). Les Japonais (67%), les Russes (54%), les Polonais (53%), les Chinois (43%) et les Israéliens (46%), parmi lesquels elle arrive en deuxième position derrière le terrorisme (49%), sont les jeunesses qui considèrent le plus souvent la guerre comme une grande menace pour la société.
Voter reste un devoir
81% des jeunes pensent que voter est un devoir. Ce score très élevé se retrouve partout dans le monde, à l’exception de la jeunesse finlandaise (66%). L’Inde, plus grande démocratie du monde, voit sa jeunesse se placer en tête sur la question du devoir citoyen (94%), suivie par les jeunesses turque (92%) et mexicaine (90%). Ainsi, malgré une forte défiance à l’égard des institutions et du personnel politique, les jeunes restent attachés à la procédure qui constitue le cœur du système démocratique, ce qui n’empêche pas les taux d’abstention d’être particulièrement élevés chez les 16-29 ans.
Le militantisme n’attire plus
Le vote est perçu comme un devoir, mais l’implication des jeunes dans la vie politique ne s’inscrit pas dans le militantisme au sein d’un parti. Cette forme d’engagement intéresse davantage les Marocains (42%) et les Indiens (37%) que les Mexicains (25 %), les Brésiliens (26%) ou les Turcs (27%). Toutefois, la jeunesse de ces pays présente une volonté d’engagement militant supérieure à celle des pays riches, comme le montrent les jeunesses japonaise (10%), française (12%), australienne (13%), allemande (14%) et canadienne (15%), même si les Suédois (23%), les Italiens (22%) et les Américains (21%) manifestent encore un intérêt significatif pour le militantisme.
Deux cas particuliers sont à signaler : celui d’un pays démocratique et riche, Israël, dont la jeunesse exprime l’intérêt le plus fort pour le militantisme politique (47%) : celui de la Chine (33%), dont la portée reste à interpréter.
Auprès des jeunes, l’engagement associatif a meilleure presse que l’engagement politique. En Inde (60%) et au Maroc (63%), les jeunes sont intéressés par le militantisme associatif de même qu’au Mexique (49%), au Brésil (45%) et en Turquie (42%) ainsi qu’en Chine (38%) et en Afrique du Sud (37%). Parmi les pays riches, les jeunes Français (46%) et Israéliens (56%) se distinguent par un fort intérêt. Au sein de l’Union européenne, d’autres jeunesses manifestent une disponibilité relativement élevée pour l’action associative, comme en Roumanie (47%), en Grèce (38%), en Allemagne (36%). Toutefois, ni la jeunesse européenne dans son ensemble (35%), ni la jeunesse américaine (34%) ne rivalisent avec les pays émergents. Les Japonais (12%) et les Russes (19%) sont les moins disposés à l’engagement associatif.
Les jeunes Brésiliens se caractérisent par une attention particulière portée aux autres. Avoir un travail utile à la société est important pour un jeune sur trois. Aider ceux qui en ont besoin en leur consacrant du temps ou de l’argent suscite un fort engouement (81%). L’idée que les plus pauvres doivent pouvoir bénéficier de soins de santé gratuits y est unanimement partagée (94%), tandis que l’on trouve des chiffres moindres en Europe (85%) et aux États-Unis (64%).
Dans la plupart des pays, les 16-29 ans se disent moins disposés que les 30-50 ans à payer pour les retraites de générations âgées. La jeunesse brésilienne fait exception puisque 54% des 16-29 ans se disent prêts à assumer cette charge contre 48% des 30-50 ans.
De même, les Brésiliens sont particulièrement égalitaristes : ils sont 62% à préférer une société où les richesses sont équitablement réparties à une société où la performance individuelle est récompensée, un niveau de réponses proche de la France ou des pays scandinaves, et très distinct de celui d’autres grands pays émergents : 42% des Indiens, 34% des Sud-Africains et seulement 17% des Russes préfèrent l’égalité à la performance individuelle. Plus frappant encore, 93% des Brésiliens estiment important pour eux de contribuer au bonheur des autres, contre 66% des Japonais, qui sont, de tous les jeunes interrogés, les plus à distance de cette idée.
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