Résumé

Introduction

I.

Retour sur les élections législatives du 4 mars 2018

1.

La réforme de la loi électorale du 3 novembre 2017

2.

Les principaux acteurs et enjeux structurants les élections

3.

Les résultats

4.

La formation d’une coalition inédite entre la Ligue et le M5S

II.

Un contexte économique à haut risque

1.

La dette et le « nuage maudit » de l’Italie

2.

Les principales réformes économiques du gouvernement Conte

3.

L’accord sur le budget 2019, grande difficulté du gouvernement Conte

III.

Les horizons différents de la ligue et du mouvement 5 étoiles

1.

La supériorité électorale de la Ligue sur le Mouvement 5 étoiles

2.

La stratégie de Di Maio : vers un rapprochement avec les gilets jaunes français

3.

La stratégie de Salvini : l’instrumentalisation de la crise migratoire européenne

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Résumé

Matteo Salvini et Luigi Di Maio sont les leaders respectivement des partis populistes de la Ligue et du Mouvement 5 étoiles (M5S), et grands vainqueurs des élections législatives du 4 mars 2018.

La présente note fait le bilan de cette première année de la coalition au pouvoir et revient sur sa dynamique.

Alberto Toscano,

Journaliste et politologue italien.

Dégagisme : voilà un néologisme made in France qu’il serait possible d’utiliser puisque, dans une certaine mesure, il semble expliquer les résultats électoraux italiens du 4 mars 2018. Ce jour-là, les Italiens se sont rendus aux urnes pour élire 630 députés et 315 sénateurs. De ces élections mouvementées ont émergé deux vainqueurs : le Mouvement 5 étoiles (M5S), symbole de la volonté italienne de renouveler la classe politique traditionnelle, et la Ligue, symbole de l’inquiétude toujours plus prononcée des Italiens face à la crise migratoire européenne. Après des semaines de négociations et d’incertitudes, une coalition, formée par ces partis populistes, s’est mise en place. Depuis, les regards sont rivés sur le pouvoir italien, dont la stratégie semble rompre avec la politique traditionnelle. Bien que souvent en désaccords, Luigi Di Maio et Matteo Salvini, leaders respectifs du M5S et de la Ligue, et personnalités politiques de premier plan de la coalition gouvernementale, ne cessent de multiplier les déclarations provocatrices à l’égard des acteurs politiques nationaux et de l’Union européenne. En février 2019, le couple Di Maio-Salvini a ainsi fait parler de lui en s’inscrivant en porte-à-faux avec la France. Suite au rapprochement que le premier a opéré avec le mouvement contestataire des gilets jaunes et aux accusations lancées par le second vis-à-vis de l’action française en matière coloniale et sur la question migratoire, la France a rappelé son ambassadeur italien à Paris pour « consultation ». Si la crise diplomatique s’est apaisée, avec le retour de l’ambassadeur à Rome, il n’en demeure pas moins qu’elle illustre bien l’isolement croissant de l’Italie sur la scène européenne. Pour autant, la popularité de la coalition gouvernementale demeure très haute dans le pays, quasiment au niveau de ses débuts tonitruants (60%).

Un an après, l’heure est au bilan quant aux performances de cette coalition populiste : a-t-elle su honorer les promesses mirobolantes énoncées par le M5S et la Ligue lors de la campagne électorale ? La stratégie antisystème du pouvoir en place est-elle tenable, compte tenu des obstacles internes (la dette publique) et externe (pressions des acteurs internationaux) ?

I Partie

Retour sur les élections législatives du 4 mars 2018

1

La réforme de la loi électorale du 3 novembre 2017

Une remarque préliminaire s’impose : les élections italiennes du 4 mars 2018 ont eu lieu sur la base d’une nouvelle loi électorale (loi du 3 novembre 2017), approuvée en voie définitive le 26 octobre 2017 par les principaux groupes parlementaires de gauche et de droite, en particulier par le Parti démocrate (PD), par Forza Italia (FI, la formation politique de Silvio Berlusconi) et par la Ligue (fondée par Umberto Bossi en décembre 1989 sous le nom de Ligue du Nord et dirigée depuis décembre 2013 par Matteo Salvini). À l’inverse, considéré comme victime potentielle de cette nouvelle loi électorale, conçue pour favoriser les coalitions au détriment des forces politiques isolées, le M5S a conduit sa bataille contre la réforme en dénonçant l’entente entre les autres partis. Sur la base de la loi du 3 novembre 2017, les 630 sièges de la Chambre des députés et les 315 sièges électifs du Sénat de la République ont été attribués pour cinq ans à partir de deux critères, l’un proportionnel et l’autre majoritaire. La Chambre des députés et le Sénat ont des pouvoirs identiques dans le processus législatif italien. Pour la Chambre des députés, les citoyens âgés d’au moins 18 ans votent au suffrage universel (pour être candidats, ils doivent avoir au moins 25 ans), tandis que pour le Sénat les citoyens doivent être âgés d’au moins 25 ans pour voter (et avoir au moins 40 ans pour être candidats).

La nouvelle loi électorale, baptisée du nom de son principal promoteur, le député Ettore Rosato (qui était, en 2017 le chef du groupe du PD à la Chambre), énonce en particulier :

– que 37% des sièges parlementaires (232 dans le cas de la Chambre des députés et 116 dans celui du Sénat de la République) sont attribués par un vote populaire au suffrage universel direct, sur la base d’un système majoritaire à un seul tour, dans un nombre de circonscriptions uninominales ;

– que 61% des sièges (386 pour la Chambre et 193 pour le Sénat) sont attribués à la proportionnelle (l’électeur choisit entre plusieurs listes de candidats) au niveau régional ;

– que 2% des sièges parlementaires (soit 12 députés et 6 sénateurs) sont attribués par les Italiens de l’étranger, sur la base d’un système proportionnel, par un vote de préférence, permettant ainsi aux électeurs de choisir entre des listes de candidats et entre des candidats à l’intérieur même de ces listes ;

– qu’il existe des seuils minimaux à franchir pour que les listes entrent au Parlement (en particulier 3% au niveau national pour une liste isolée, qui ne se présente pas comme membre d’une coalition) ;

– que, contrairement à la tradition, les élections se dérouleront sur une seule journée.

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Les principaux acteurs et enjeux structurants les élections

Les législatives du 4 mars 2018 ont été marquées par la présence de trois grands blocs politiques qui se sont partagés l’écrasante majorité des sièges, à savoir :

– la coalition de centre gauche, à laquelle appartient la majorité sortante de Paolo Gentiloni, ancien président du Conseil des ministres et membre du Parti démocrate. Ses deux prédécesseurs au poste de président du Conseil des ministres, Enrico Letta puis Matteo Renzi, faisaient également partie de cette coalition ;

– la coalition de droite, formée par l’alliance entre Forza Italia et deux formations d’extrême droite, la Ligue et le petit parti Fratelli d’Italia ;

– le Mouvement 5 étoiles, créé par Beppe Grillo et dirigé pendant la campagne électorale par son « chef politique » Luigi Di Maio.

La campagne électorale a été notamment marquée par la question migratoire, les polémiques en matière d’insécurité, la perte de crédibilité de la traditionnelle classe politique suite à des enquêtes de corruption, les questions économiques (surtout en matière fiscale, avec de nombreuses propositions de baisse des impôts), les enjeux de l’âge de la retraite et, enfin, la possible création d’un « revenu de citoyenneté » (ou revenu universel). La proposition clé de la coalition de droite a été la baisse et l’uniformisation des impôts (flat tax), tandis que celle du M5S a été l’institution du « revenu de citoyenneté ».

Un fait divers dramatique a particulièrement marqué l’atmosphère de la campagne électorale : fin janvier 2018, le corps retrouvé en morceaux de Pamela Mastropietro, une jeune fille de 18 ans de la ville de Macerata, en Italie centrale, et l’arrestation de l’assassin présumé, pusher (revendeur de drogue) et immigré nigérian, produisirent une vague d’émotion sur laquelle la propagande xénophobe de la Ligue et de son secrétaire Matteo Salvini a surfé sans modération. Les débats relatifs à l’immigration et à l’économie ont encouragé les partis de l’opposition sortante (FI, la Ligue et le M5S) à développer des discours très critiques envers l’Europe, accusée d’abandonner le peuple italien. À l’inverse, la coalition autour du PD a démontré sa fidélité européenne, en intégrant notamment le mouvement Più Europa (« Plus d’Europe ») de l’ex-commissaire européenne Emma Bonino.

3

Les résultats

Le taux de participation aux élections du 4 mars 2018 (73%) peut être analysé de deux façons. Si on le compare avec les taux de participation italiens de l’après-guerre, il est très bas et il s’agit même de l’abstention record pour des législatives en Italie. Néanmoins, ce taux est tout à fait respectable par rapport à ceux d’autres pays démocratiques : il est, par exemple, par rapport à la France, largement supérieur au taux de participation des élections législatives et égal à celui du second tour de l’élection présidentielle française de 2017. Le résultat des urnes, surprenant par rapport aux prévisions de plusieurs sondages, a été marqué par le franc succès du M5S.

Dès les élections législatives de 2013, ce mouvement s’était imposé comme le premier parti national (25,6 % à la Chambre des députés), mais avait été dépassé par la coalition de droite (29,2%) et par celle de centre gauche (29,6%). Amplifiés par la loi électorale de l’époque, ces résultats avaient attribué 108 sièges sur 630 au M5S, 124 à la coalition de droite et 344 à celle de centre gauche. Cinq ans plus tard, le 4 mars 2018, le M5S obtient cette fois 10,7 millions de voix (32,7%) à la Chambre des députés et 9,75 millions de voix (32,2%) au Sénat. Début 2019, sa présence parlementaire, bien qu’amputée par l’exclusion de quelques dissidents, s’élève à 220 députés et à 107 sénateurs.

Résultats des élections italiennes de mars 2018 à la Chambre des députés

Source :

La Repubblica

Résultats des élections italiennes de mars 2018 au Sénat de la République

Source :

La Repubblica

La carte géographique indiquant la répartition des sièges des élus au suffrage majoritaire est riche d’enseignements. On constate en effet l’existence d’une authentique fracture territoriale entre un Nord massivement rattaché à la Ligue (et traditionnellement favorable à la droite) et un Sud soutenant largement le M5S. Ces résultats traduisent le succès, surtout au Sud, de la promesse pentastellata – c’est-à-dire dans le jargon politique italien tout ce qui fait référence aux cinq (penta) étoiles (stelle) – d’un « revenu de citoyenneté » promu par le M5S. Par ailleurs, ces résultats électoraux démontrent également la popularité, surtout au Nord, des mots d’ordre de la Ligue et, plus généralement, de l’ensemble de la droite relatifs à la baisse de la charge fiscale. Concernant le centre gauche, on constate que celui-ci, littéralement pris en tenaille entre ces deux Italie, n’obtient que des miettes en termes de sièges uninominaux. Quant à la gauche radicale, sortie du PD pour créer le mouvement Liberi e Uguali (« Libres et Égaux », LEU), elle n’obtient aucun parlementaire et son échec est cuisant, malgré la présence dans ses rangs d’un personnage important de la gauche italienne, l’ex-président du Conseil Massimo D’Alema.

Carte des sièges uninominaux, Chambre des députés

Source :

Ministère de l’Intérieur italien

Carte des sièges uninominaux, Sénat de la République

Copyright :

Fondation pour l’innovation politique

Source :

Ministère de l’Intérieur italien

Au lendemain du 4 mars 2018, les deux grands vainqueurs sont donc le M5S et la Ligue, et les deux principaux perdants Forza Italia et, surtout, le Parti démocrate. La Ligue, en pariant sur la question migratoire et en adoptant des positions xénophobes, proche de l’extrême droite, a su dépasser son principal parti allié Forza Italia, également membre de la coalition de droite. Persuadé que Forza Italia finirait devant la Ligue, Silvio Berlusconi avait déjà exprimé son intention de voir Antonio Tajani, président en exercice du Parlement européen et membre de FI, prendre la tête d’un gouvernement italien soutenu par le centre droit.

 

4

La formation d’une coalition inédite entre la Ligue et le M5S

Notes

2.

Voir M5S-Lega, op. cit.

+ -

3.

Ibid., p. 18.

+ -

Les négociations pour qu’une nouvelle majorité soit mise en place ont dominé la vie politique italienne pendant trois mois. Après plusieurs tentatives de rapprochement, le M5S et la Ligue ont réussi, en mai 2018, à se mettre d’accord sur un programme, appelé Contratto per il governo del cambiamento. Ce texte inclut les points fondamentaux de la campagne électorale des deux partis, en particulier la révision de la réforme des retraites du gouvernement Monti (novembre 2011-avril 2013) pour faciliter et anticiper la sortie du travail, le refus de la politique d’austérité (malgré la volonté affichée de réduire la dette publique), l’institution d’une flat tax pour réduire la charge fiscale et la création d’un « revenu de citoyenneté » de 780 euros par mois2.

Concernant la politique étrangère, ce contrat de gouvernement réoriente la stratégie italienne vers les États-Unis, au détriment de l’intégration européenne. Le programme confirme notamment « l’appartenance à l’Alliance atlantique avec les États-Unis d’Amérique comme allié privilégié3 » mais souligne également l’importance particulière de la relation avec Moscou. Par ailleurs, le M5S de Luigi Di Maio et la Ligue de Matteo Salvini ont dû se mettre d’accord sur le nom du chef du gouvernement. Le 31 mai, Guiseppe Conte est convoqué au palais du Quirinal et chargé par le président de la République Sergio Mattarella de former le soixante-cinquième gouvernement de la République italienne. Giuseppe Conte et son gouvernement prêtent serment le 1er juin au Quirinal, devant le même Sergio Mattarella, dont Luigi Di Maio avait souhaité, cinq jours plus tôt, la destitution. Le 5 juin, le nouveau gouvernement obtient la confiance du Sénat, avec 171 oui, 117 non et 25 abstentions. Le jour suivant, Conte gagne également la confiance de la Chambre des députés, avec 350 oui, 236 non et 35 abstentions.

Dès ses débuts, le gouvernement Conte a dû faire face aux contradictions apparues entre les promesses mirobolantes énoncées lors de la campagne électorale et une réalité économique fragilisée par des problèmes endogènes (à commencer par la dette publique) et exogènes (l’affaiblissement de la croissance internationale). Malgré cela, le nouveau gouvernement a bénéficié d’un état de grâce dans l’opinion publique italienne pendant l’année qui a suivi les élections du 4 mars 2018. Si un sondage, réalisé par Ipsos et publié le 3 février 2019 par le Corriere della Sera, montre que 54% des interrogés critiquent les mesures économiques adoptées par le gouvernement pendant ses huit premiers mois (y compris le « revenu de citoyenneté », accusé de « ne pas aider la croissance ») et que seulement 33% pensent que le gouvernement Conte est « en mesure de favoriser le développement de l’Italie », les Italiens font encore majoritairement confiance au gouvernement, dont la popularité est toujours à un niveau élevé de 60%, taux bien supérieur à celui du gouvernement Gentiloni, malgré les bons résultats de celui-ci en matière économique et migratoire.

Lors des premiers pas du gouvernement Conte, les Italiens ont paru fortement intéressés par la nouveauté représentée par la présence au pouvoir du M5S, même si la gestion intérieure de ce parti s’inspire d’une version technologique du vieil et très autoritaire « centralisme démocratique ». En effet, le modèle du M5S est bâti sur un mélange de centralisation autoritaire (autour de Beppe Grillo et de ses proches) et d’une présumée « démocratie directe » via Internet. La plateforme informatique, baptisée « Rousseau », est la clef de voûte de ce mélange d’autoritarisme couplé à une liturgie de démocratie technologique. Les votes via Internet sont contrôlés et totalement gérés par une société privée, la Casaleggio Associati, entreprise de conseil en informatique, édition et communication.

La Casaleggio Associati est l’œuvre d’un « homme de l’ombre » de la politique italienne, Gianroberto Casaleggio (1954-2016), grand ami et conseiller politique de Beppe Grillo. Après sa mort, la société est passée dans les mains de son fils Davide, né en 1976. C’est désormais lui le véritable patron de la machine, qui opère dans l’opacité la plus complète et qui annonce via Internet les résultats des consultations de militants au sujet de toutes sortes de décisions, du choix des candidatures électorales à la ratification des orientations stratégiques du leadership. Cette situation illustre parfaitement les problèmes pouvant être liés à toute instrumentalisation de la démocratie directe via Internet. La base peut évidemment voter comme elle veut, mais si Casaleggio Associati n’est pas d’accord avec ce vote, son verdict peut tout à fait, du moins théoriquement, être maquillé selon la sensibilité du groupe au sommet. Preuve en est : l’opacité de la plateforme Rousseau a été révélée le 18 février 2019, lorsque Di Maio a appelé ses militants à se prononcer en ligne sur une procédure judiciaire visant le ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini, accusé d’avoir interdit pendant plusieurs jours le débarquement de 177 migrants secourus en août par le navire Diciotti.

Pour qu’un procès puisse s’ouvrir, il aurait fallu l’autorisation de la majorité des sénateurs pour la levée de son immunité parlementaire. Finalement, selon l’annonce de la société privée Casaleggio Associati, la majorité des militants, qui se sont exprimés via internet sur la « plateforme Rousseau » ont refusé la demande de la magistrature pour continuer l’enquête en vue d’un possible procès à Salvini. Ce choix, s’il est favorable à la Ligue, l’est aussi au M5S, puisque les deux se partagent le gouvernement : la chute de l’un entrainerait celle de l’autre. Ainsi, a été organisée une liturgie (ou plutôt une mise en scène) informatique pour affirmer que « la base » avait choisi de ne pas autoriser le procès au chef de la Ligue.

II Partie

Un contexte économique à haut risque

1

La dette et le « nuage maudit » de l’Italie

Dans l’Italie insouciante des années 1980, une série de films pleins d’autodérision, basés sur le personnage d’un simple employé, Ugo Fantozzi, victime éternelle du système et de l’arrogance d’autrui, connut un énorme succès. Les Italiens se reconnurent dans cet homme simple et terriblement attachant, sur lequel planait en permanence un nuage prêt à déverser la pluie, même quand les autres bénéficiaient d’un soleil bien chaud et rassurant. Les films de la série Fantozzi parlaient du nuvola dell’impiegato (« nuage de l’employé ») pour définir ce curieux phénomène atmosphérique (surtout social et psychologique) qui divise les êtres humains en catégories différentes. Mais cela vaut aussi pour les États qui peuvent parfois ne s’en prendre qu’à eux-mêmes, ayant librement choisi de créer un « maudit nuage » qui se balade méchamment sur leur tête.

L’Italie des années 1980, qui souriait devant les aventures de l’employé Fantozzi, a ainsi commis la faute de dépenser avec légèreté l’argent qu’elle n’avait pas, augmentant ainsi sa dette publique. Entre 1981 et 1993, celle-ci est passée de 60% à environ 120% du PIB. À partir de la fin des années 1980, tous les gouvernements italiens ont dû prendre en compte, avec une certaine angoisse, la question du rapport entre dette publique et PIB. La dette est ainsi devenue le « nuage de Fantozzi » de la politique italienne et des Italiens en général.

Encore aujourd’hui, tandis que les indicateurs économiques repartent dans certains pays européens, l’Italie reste sous l’ombre menaçante de ce nuage maudit. Le spread, qui indique le différentiel des taux d’intérêt sur les bons du Trésor à dix ans émis pour refinancer la dette publique, est particulièrement marqué entre l’Italie et l’Allemagne. La dette publique italienne, qui a atteint en novembre 2018 le record de 2.345,3 milliards d’euros, est refinancée chaque année par l’émission de titres d’État pour environ 400 milliards d’euros. Plus le spread augmente, plus l’Italie accentue son handicap par rapport à ses principaux concurrents européens, qui dépensent en intérêts beaucoup moins qu’elle. En toile de fond, l’augmentation du spread témoigne de doutes sur la crédibilité de l’Italie et sur son maintien dans la zone euro à moyen et long terme. Ces doutes coûtent donc très chers au contribuable italien. Quand, en décembre 1991, les chefs d’État ou de gouvernement européens se rencontrèrent à Maastricht pour définir les critères de la future monnaie unique (dont les principes fondamentaux sont la limite du déficit à 3% du PIB et de la dette à 60% du PIB), la dette publique italienne atteignait déjà 101%. Elle s’éleva à 125% du PIB en 1994, pour descendre ensuite à 104% en 2007, avant de monter à nouveau suite à la crise de 2008 (même si cette baisse est proportionnellement moins conséquente que dans d’autres pays européens).

En 2010, la dette publique italienne était de 115% ; en 2011, de 117%. La situation critique vécue par l’Italie en 2011 provoqua une forte remontée de cette dette, qui atteignit 123% en 2012, 129% en 2013 et 132% en 2014. À cette crise financière et économique s’ajouta une crise politique : l’année 2011 fut également marquée par le départ forcé de Berlusconi du Palazzo Chigi suite à un spread estimé hors contrôle et par l’arrivée de Mario Monti à la tête d’un gouvernement technocratique. S’ensuivit une période de relative stabilité quant à l’évolution de la dette : 132% en 2015, 133% en 2016, 130% en 2017 et en 2018.

En calculant la dette publique sur la base de la population, en 2019 chaque Italien est endetté d’environ 38.000 euros. Les graphiques ci-dessous comparent ainsi les évolutions des dettes publiques italienne et française.

Déficit public (en % du PIB valeur)

Source :

Natixis, étude du 30 janvier 2019, n° 135.

Dette publique (en % du PIB valeur)

Source :

Natixis, étude du 30 janvier 2019, n° 135.

Les débuts du gouvernement Conte ayant été pour le moins tonitruants, ce dernier donna peu d’importance à la dette, au déficit ou au spread. Le « gouvernement du changement » préféra plutôt défier l’Europe que rechercher avec elle des solutions à ses problèmes.

 

2

Les principales réformes économiques du gouvernement Conte

Notes

4.

Chiffres officiels de l’Istituto nazionale di statistica (Istat), relatifs à décembre 2018.

+ -

5.

Sur ce sujet, voir Michel Martone, Retraites : leçons des réformes italiennes, Fondation pour l’innovation politique, novembre 2018.

+ -

Dans un premier temps, le gouvernement Conte a lancé, entre juin et juillet 2018, la réforme du marché du travail. Baptisée decreto dignità (« décret dignité »), cette réforme est entrée en vigueur le 12 août 2018 et est devenue pleinement opérationnelle en novembre. Il s’agit selon Luigi Di Maio, promoteur de cette initiative, d’annuler les mesures libéralisatrices du gouvernement Renzi et, surtout, de stimuler les embauches en CDI, au détriment de celles en CDD. Cependant, cette réforme a suscité de nombreuses polémiques : certains craignent qu’elle décourage les embauches précaires, sans réellement encourager les contrats plus stables, ce qui aurait pour conséquence l’amplification du travail clandestin, très présent en Italie.

Un sondage Ipsos publié le 3 février 2019 par le Corriere della sera révèle que 32% des répondants se considèrent « d’accord » avec l’affirmation selon laquelle le gouvernement «contribue à créer de nouveaux emplois », 28% « peu d’accord » et 25% « pas du tout d’accord » (15% ne se prononçant pas). L’année 2019 a commencé en Italie avec un taux de chômage de 10,3%4. Le taux de chômage des jeunes est de 31,9% et le taux d’occupation de 58,8%. La deuxième « réforme Di Maio » a été la plus importante du point de vue du M5S. Il s’agit de la mesure phare du mouvement : la création du reddito di cittadinanza (« revenu de citoyenneté »), qui peut être demandé par les ayants droit (ou présumé tels) à partir du 6 mars 2019 et qui sera versé à partir du 1er avril, c’est-à-dire à la veille des élections européennes du 26 mai. Afin d’obtenir le revenu de citoyenneté, le citoyen doit avoir un revenu de référence inférieur à 9.360 euros par an. Cette mesure est toutefois assortie d’un engagement de la part du bénéficiaire dans la dynamique du « pacte pour le travail », qui impose de s’enregistrer sur un registre particulier, de s’engager dans la recherche d’un emploi, de suivre des formations proposées par les services de l’État et d’accepter une des trois offres proposées par ces services.

L’aide sociale du reddito di cittadinanza peut atteindre jusqu’à 780 euros mensuel. Quant aux bénéficiaires, les premiers calculs sont assez flous mais on sait d’ores et déjà que plus de la moitié seront dans l’Italie du Sud (moins peuplée mais plus pauvre que le Centre et le Nord). Selon l’Istituto nazionale di statistica (Istat), les « pauvres absolus » (qui vivent avec moins de 9.360 euros par an) sont 5 millions, et Di Maio parle en effet de « 5 millions de bénéficiaires et de 1,7 million de familles ». D’autres calculs arrivent à 4 millions de bénéficiaires répartis sur 1,3 million de familles. Parallèlement, de lourdes peines, allant jusqu’à six ans de prison en cas de fraude, sont prévues, ainsi que des avantages fiscaux pour une durée comprise entre cinq et dix-huit mois pour les entreprises qui embauchent en CDI des personnes bénéficiant du reddito di cittadinanza (et qui le perdent en trouvant un emploi régulier). Dans l’espoir d’éviter les fraudes, on prévoit que le titulaire du reddito di cittadinanza ne puisse pas posséder de biens mobiliers pour plus de 6.000 euros et immobiliers pour plus de 30.000 euros, résidence non comprise. Cette forme d’aide publique sera également accessible pour des étrangers résidants régulièrement en Italie depuis au moins dix ans (cela concernerait 20% des bénéficiaires). Quatre considérations s’imposent à propos de ce reddito di cittadinanza :

– dans le contexte italien de l’après-crise (commencée en 2008), des nouvelles mesures de solidarité active sont effectivement nécessaires et mêmes indispensables ;

– les gouvernements Renzi et Gentiloni avaient déjà beaucoup œuvré en ce sens, malgré l’hostilité manifestée à cet égard par le M5S ;

– la réforme voulue par Di Maio a lieu dans un contexte de confusion et sur la base d’un timing manifestement conçu dans la perspective des élections européennes de mai 2019 ;

– la confusion arrive à son comble lorsqu’il s’agit de la catégorie de salariés en CDD chargés d’épauler les bénéficiaires du revenu de citoyenneté dans leur recherche d’une formation ou d’un emploi : il s’agit de 10 000 personnes, baptisées navigators par Di Maio, par allusion au fait que leur travail sera en grande partie sur la Toile, qui devront également être formées au préalable, dans un délai extrêmement court. Bref, un projet potentiellement intéressant risque d’échouer à cause du désir de ses promoteurs d’obtenir des avantages immédiats en termes de consensus et même de campagne électorale.

Les premiers mois de vie du gouvernement Conte ont également vu l’approbation de projets économiques et sociaux tenant à cœur à la Ligue, en particulier la réforme du système des retraites, la Ligue voulant spécialement modifier le système établi par le gouvernement Monti, qui avait prolongé la durée de travail. Du point de vue de la Ligue (et aussi du M5S), anticiper la retraite (sur la base d’un calcul qui situe la possibilité d’accéder à la retraite au chiffre 100, dérivant de l’addition entre âge du travailleur et années de contribution5) signifie libérer des emplois pour les nouvelles générations. Mais, en toile de fond, subsiste un problème : l’Italie (comme la France) compte parmi les pays de l’OCDE dans lesquels la durée de travail est déjà aujourd’hui la plus courte et le taux d’emploi le plus faible.

Taux d’emploi (en %)

Source :

Natixis, étude du 31 janvier 2019, n°140 (données de l’OCDE).

Par ailleurs, la situation spécifique de l’Italie est aussi rendue inquiétante par l’évolution de sa démographie, en particulier par les prévisions au sujet du vieillissement de la population, ce qui nécessite une attention particulière sur le système des retraites. Les lois économiques et sociales voulues par le gouvernement Conte mettent en difficulté l’Italie vis-à-vis des marchés financiers et vis-à-vis des autorités européennes, notamment la Commission européenne et la Banque centrale européenne (BCE). En effet, non seulement la confusion sur les coûts relatifs à la stratégie du gouvernement contribue à augmenter le spread, mais à cela s’ajoute la déconcertante série de déclarations polémiques et provocatrices (voire même insultantes) du couple Salvini-Di Maio à l’égard des institutions européennes (Commission européenne, Banque centrale européenne), du Fonds monétaire international et des cadres du ministère italien de l’Économie.

Dans l’actualité plus récente, deux projets liés au dossier des Grandi opere (grands travaux), en cours de discussions depuis plusieurs années, ont suscité l’attention:

1) Le premier projet concerné est la TAV, ligne ferroviaire à haute vitesse de 235 km entre Turin et Lyon, avec un tunnel de 57 km entre Susa et Saint-Jeande-Maurienne, et réalisée, avec une contribution financière européenne, sur la base du Traité franco-italien du 29 janvier 2001. Sur ce projet, la Ligue et le M5S n’étaient pas d’accord entre eux, la première y étant favorable, l’autre non. Par ailleurs, ce projet suscite de vives polémiques entre Rome et Paris, et Rome et Bruxelles. Finalement, le 21 février 2019, la Ligue et le M5S ont fait approuver au Parlement un texte qui en réalité suspend le projet du tunnel dans un contexte de confusion croissante.

2) Le deuxième projet concerne les installations terminales, dans la région des Pouilles, du gazoduc dit TAP (Trans-adriatic-pipeline), qui amènera en Europe du gaz provenant d’Azerbaïdjan. Si, initialement, le M5S s’opposait à ce projet (de la même façon que les écologistes), il a finalement rejoint le camp de la Ligue, permettant ainsi la continuation du projet (décision stratégique pour un pays qui – n’ayant pas de centrales nucléaires – dépend largement du gaz). »

3

L’accord sur le budget 2019, grande difficulté du gouvernement Conte

Le ministre de l’Économie et des Finances Giovanni Tria se trouve au centre d’une crise lorsque, le 27 septembre 2018, le Conseil des ministres est appelé à définir une stratégie budgétaire. Il s’agit plus particulièrement du déficit à prévoir pour l’exercice budgétaire de 2019. Di Maio et Salvini veulent arriver à 2,4% et peut-être plus, malgré les engagements fixés entre l’Union européenne et l’Italie, négociés par Tria pour un déficit inférieur à 2%. Face à ce non-respect de l’engagement pris envers l’Union européenne, Tria envisage
de démissionner, mais il en est dissuadé par Mattarella (ce dernier craignant que le départ du ministre provoque un désastre sur les taux d’intérêt payés par l’Italie pour refinancer sa dette publique).

C’est finalement sur un déficit à 2,4% que tombent d’accord les dirigeants politiques, ce qui provoque une réaction particulièrement enthousiaste chez Di Maio : devant une petite foule composée de députés M5S et de collaborateurs, le chef du M5S exprime sa joie d’avoir réussi à augmenter le déficit au-delà de la limite acceptable par Bruxelles, et ce malgré la forte dette publique italienne. « Nous avons aboli la pauvreté ! », clame-t-il, tandis que, défilant entre le Palazzo Chigi et la colonne Trajane, les parlementaires du M5S chantaient : « Nous sommes le changement ! », comme si la misère pouvait être effacée par décret. Cependant, quelques semaines plus tard, fin octobre, le décret d’économie et de finance (DEF) se heurte à l’opposition de la Commission de Bruxelles qui rejette le projet de budget italien, en considérant exagérée et irréaliste la prévision d’un déficit à 2,4% pour 2019. Exagérée parce qu’elle dépasse les engagements italiens relatifs à une réduction du déficit qui puisse aboutir à une contraction de la dette publique. Irréaliste parce que le DEF du gouvernement Conte se fonde sur des prévisions de croissance décidément optimistes. L’automne 2018 devient ainsi la saison du bras de fer entre Rome et Bruxelles.

En novembre, au moment de rendre publiques ses prévisions pour 2019, la Commission européenne prévoit une augmentation du déficit italien à 2,9%, avec un déficit « structurel » à 3%. Face à la menace énoncée d’une procédure d’infraction pour dette excessive visant Rome, Di Maio et Salvini durcissent leurs discours, affirmant que l’Italie ne fera pas marche arrière. Conte tente alors de calmer le jeu, tandis que Tria mise sur de nouvelles marges de négociation. Le spectacle deviendra une habitude : le couple Di Maio-Salvini joue les incendiaires, en pensant que les discours de « fermeté » sont rentables en termes de sympathie dans l’opinion publique nationale, tandis que le couple Conte-Tria joue les pompiers, en expliquant qu’il ne faut pas prendre à la lettre les deux exubérants vice-présidents du Conseil.

Au mois de décembre 2018, le contexte change, tandis qu’à Rome comme à Bruxelles une volonté de compromis et de pragmatisme s’affirme et prend le pas sur toute tentation jusqu’au-boutiste. Cinq événements, bien différents les uns des autres, contribuent à créer une situation propice à l’accord sur la Loi de finances italienne pour 2019 :

– les autres pays de la zone euro laissent l’Italie dans l’isolement et certains (comme l’Autriche) en arrivent à souhaiter ouvertement des mesures de sanction à l’encontre de Rome. Durant l’automne 2018, quand il s’agit de parler de son projet budgétaire, l’Italie fait l’unanimité contre elle à la fois au sein de la Commission européenne et parmi les gouvernements des membres de la zone euro ;

– le spread grandit de façon très inquiétante et commence désormais à produire une réaction en chaîne, augmentant les taux d’intérêt dans l’économie nationale. Les emprunts immobiliers (souvent à taux variable en Italie) risquent d’entrer dans une spirale dangereuse pour les consommateurs. Déjà fragilisé par le problème du stock des prêts « non performants », le système bancaire italien risque de se trouver en difficulté. Les excès polémiques du gouvernement contre l’Europe et contre les marchés financiers, se rajoutant à une atmosphère de confusion et d’approximation, risquent de coûter cher aux Italiens (voir graphiques ci-dessous) en générant une augmentation du spread avec les Bund allemands. La situation reste calme jusqu’au mois de mai 2018, puis les taux atteignent un pic à la fin de l’année avant de redescendre (sans connaître toutefois le niveau d’avant le gouvernement Conte) suite au compromis Rome Bruxelles au sujet du budget italien, interrompant la procédure européenne d’infraction pour « dette excessive » à charge de l’Italie ;

– les prévisions des organismes italiens et internationaux au sujet de la croissance italienne en 2019 convergent vers le pessimisme, poussant ainsi Rome et Bruxelles à ne pas jouer la carte, irresponsable, d’une dégradation de la situation (avec le danger d’une dérive à la grecque) ;

– le couple Salvini-Di Maio reçoit une aide involontaire et inattendue de l’homme contre lequel ils avaient lancé à plusieurs reprises des accusations au vitriol : Emmanuel Macron. En effet, le 10 décembre, en réaction à la révolte des gilets jaunes, le président français s’exprime à la télévision et énonce plusieurs promesses, notamment au niveau des retraites et de l’augmentation du smic. Ces deux mesures entraîneraient 10 milliards d’euros de dépenses supplémentaires et une augmentation du déficit français (celui-ci, estimé à 2,8% du PIB dépasserait alors les 3%). Cette probable augmentation du déficit français devient une arme importante dans les mains du gouvernement italien, à plus forte raison parce que le budget italien serait positif sans les intérêts payés pour financer la dette, tandis que le budget français resterait déficitaire ;

– les sondages montrent, en termes de consensus intérieur, que le couple Salvini-Di Maio tire avantage de la dramatisation des polémiques avec Bruxelles, durant lesquelles Rome est présentée comme une victime de l’arrogance européenne et de la méthode du « deux poids deux mesures ». Avec l’approche des élections européennes, Bruxelles veut désamorcer les mines flottantes pouvant favoriser le succès des populistes le 26 mai.

Le coût de la dette : taux sur les bons du Trésor à dix ans

Source :

Bloomberg.

Spread entre les bons du Trésor italiens et allemands

Source :

Bloomberg.

Notes

Le soir du 18 décembre 2018, les responsables de la Commission européenne et du gouvernement italien trouvent un compromis avec une prévision de déficit qui passe de 2,4% à 2,04% du PIB. Les engagements du gouvernement italien sont confirmés par Conte et Tria, mais l’Italie doit garantir dans la pratique la stabilité du déficit structurel sur le niveau de 2018 et doit donc à la fois réduire certaines dépenses et débloquer des fonds. Elle doit aussi fournir à l’Europe des garanties précises. Si les engagements ne sont pas respectés, il y aura une augmentation automatique de la TVA. Les nouvelles clauses de sauvegarde parlent de 9,4 milliards d’euros en 2020 et de 13,2 milliards en 2021. Si on calcule les engagements précédents de Rome, l’Italie a sur sa tête des clauses de sauvegarde (par rapport à l’augmentation éventuelle de la TVA) de 23,1 milliards d’euros en 2020, de 28,8 milliards en 2021 et de 28,8 milliards en 2022. Par ailleurs, l’Europe n’est pas la seule à observer avec attention la situation économique italienne. Le 2 février 2019, le gouverneur de la Banque d’Italie Vincenzo Visco intervient publiquement pour lancer un cri d’alarme : la situation de l’économie nationale s’annonce très critique, tant à cause de problèmes intérieurs que des contrecoups des difficultés internationales.

Il précise : « Les perspectives de l’économie italienne sont aujourd’hui moins favorables qu’il y a un an. Sur elles pèsent des dangers au rabais, qui ont en partie une origine extérieure, mais qui continuent à exprimer en mesure significative les faiblesses propres de notre pays ; en premier lieu, l’incertitude au sujet de la croissance en plus que des orientations de la politique budgétaire et du parcours crédible de réduction du poids de la dette publique sur l’économie6. » Au même moment, l’Istat publiait les chiffres sur la croissance: après quatorze trimestres consécutifs d’augmentation du PIB, l’Italie est entrée en récession, en ayant enregistré, au cours de la seconde moitié de 2018, deux trimestres consécutifs de baisse.

Un an après les élections du 4 mars 2018, les prévisions sur l’économie italienne sont lourdes à porter pour le gouvernement de Rome. Celles du gouvernement, qui espère une croissance de 1% en 2019, risquent de ne rester qu’une utopie, ce qui pourrait imposer une révision du budget en cours de route. Plusieurs organismes indépendants d’analyse économique et financière tablent sur une croissance comprise entre 0,2 et 0,6% sur l’ensemble de l’année. Persiste donc beaucoup d’inquiétude quant à la très probable révision du budget fondé sur la prévision du gouvernement. Paradoxalement, les deux vice-présidents du Conseil, Salvini et Di Maio, qui ne ratent pas une occasion de critiquer et parfois d’insulter l’Europe, pourraient recevoir un grand avantage de la monnaie unique : l’augmentation du spread pourrait être limitée parce que, après le cas grec et l’expérience britannique, toute forme d’abandon européen (abandon de l’Euro ou abandon de l’Union européenne) semble tellement difficile à réaliser que les forces de la cohésion semblent condamnées à prévaloir.

III Partie

Les horizons différents de la ligue et du mouvement 5 étoiles

Giulio Andreotti, le plus important homme politique italien de l’après-guerre, disait que l’un des points de force de la Démocratie chrétienne (DC) était la possibilité, pour ce parti de centre, de faire alliance à droite ou à gauche. Le fait de disposer d’une alternative était, pour la DC, une formidable « rente de position », qui lui permettait de mettre systématiquement ses alliés dans une situation fragile et inconfortable, tout en gardant une certaine influence sur ses adversaires. Andreotti qui, pendant sa longue carrière, a noué des alliances avec pratiquement tous les autres partis italiens, désignait cette situation sous l’expression teoria dei due forni (« théorie des deux fours ») : en effet, selon lui, la DC pouvait acheter son pain chez l’un ou l’autre boulanger du « village politique », contraignant ainsi l’un et l’autre à ne pas trop augmenter le prix de la marchandise…

En 2019, c’est à Salvini de pouvoir choisir entre « deux fours » : le M5S ou l’entente de droite classique avec Berlusconi. La Ligue fait encore mieux : elle est au gouvernement du pays en compagnie du M5S et elle administre plusieurs Régions dans le contexte de la vieille alliance de droite avec Forza Italia de Silvio Berlusconi et la petite formation d’extrême droite Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni.

1

La supériorité électorale de la Ligue sur le Mouvement 5 étoiles

Notes

7.

Voir Marc Lazar, « Un violent malaise démocratique », in Dominique Reynié (dir.), Où va la démocratie ? Une enquête internationale de la Fondation pour l’innovation politique, Plon, 2017, p. 77-79.

+ -

Début 2019, les deux partis du gouvernement italien ne sont donc pas sur un pied d’égalité. L’un dispose d’une alternative, l’autre non. Malgré l’arithmétique électorale (qui, suite aux législatives de 2018, voit le M5S à un niveau bien supérieur à la Ligue), Matteo Salvini est en évidente position de force par rapport à Di Maio, isolé à la fois en Italie et en Europe. En plus de l’avantage des « deux fours », la Ligue dispose, en 2019, d’un soutien populaire sur le thème fondamental de sa stratégie : la fermeté sur la « question migratoire », assortie des discours qui dénoncent l’« abandon » de l’Italie et la « trahison » de la part de l’Europe au sujet de l’accueil des migrants. Si le bien-fondé de cette « trahison » est évidemment discutable, on ne peut cependant que constater la sensibilité de beaucoup d’Italiens sur ce sujet. Une grande partie de l’opinion publique est absolument persuadée que l’Italie a été abandonnée à elle-même quant à la gestion de l’accueil des migrants7. Un an après le 4 mars 2018, on doit donc prendre acte de la supériorité de Salvini sur Di Maio en termes de tactique, de stratégie et de contenus politiques lorsqu’il s’agit de la sensibilité de l’opinion publique italienne.

En 2019, plusieurs élections locales ont d’ailleurs confirmé la montée de la Ligue et la vitalité (malgré tout) de la vieille alliance de droite. En particulier celle du 10 février 2019 aboutissant à l’élection d’un nouveau président et d’un nouveau conseil de la Région des Abruzzes (sortant d’une administration de centre gauche). L’alliance de droite (et surtout la Ligue) a ainsi triomphé dans cette région de l’Italie du Sud qui, un an plus tôt, avait plébiscité le M5S à l’occasion des législatives. Marco Masilio, candidat commun de la Ligue, de FI et de Fratelli d’Italia à la présidence de la région, a obtenu 48% ; le candidat de centre gauche, Giovanni Legnini, est arrivé en seconde position, avec 31,3%, tandis que le M5S, qui, comme d’habitude, se présentait en dehors de toute alliance, connaissait une déroute impressionnante : sa candidate, Sara Marcozzi, a dû se contenter de 20,2% des suffrages dans une région où Di Maio s’était personnellement et profondément engagé au cours de la campagne (ce pourcentage correspond à la moitié de celui obtenu l’année précédente à l’occasion des élections législatives). La Ligue devient donc le principal parti d’une importante région du Sud, passant de 13 à 28%.

La signification politique de ce résultat à l’échelle nationale est transparente et la crise du M5S par rapport à son électorat de mars 2018 ne fait plus de doutes : c’est une chose de se rassembler sur le rejet de la vieille classe politique, c’en est une autre de se maintenir en étant membre d’un gouvernement en exercice. Que ce soit au niveau national ou au niveau européen, l’isolement du M5S est de plus en plus lourd à porter. En effet, alors qu’à la suite des élections de 2014 au Parlement européen le M5S avait rejoint le même groupe que les Britanniques de l’Ukip, le Brexit a mis fin à cette entente. En conséquence, depuis fin 2018, Luigi Di Maio cherche des alliés, au moins à l’extérieur, dans la perspective des élections européennes du 26 mai 2019.

2

La stratégie de Di Maio : vers un rapprochement avec les gilets jaunes français

Notes

8.

Cité in « Migrants: Di Maio veut que l’UE sanctionne la France », lexpress.fr, 21 janvier 2019 .

+ -

9.

Cité in Rémi Carlier, « Avec les Gilets jaunes, Di Maio tente un “retour aux sources” du M5S en Italie », france24.com, 6 février 2019 .

+ -

10.

« Italie – Rappel de l’ambassadeur de France pour consultations », communiqué du ministère des Affaires étrangères, 7 février 2019 .

+ -

À ce sujet, il est intéressant de constater que depuis le 17 novembre 2018 et l’essor du mouvement des gilets jaunes, le M5S a commencé à regarder en direction de Paris avec un intérêt croissant. Par exemple, le 7 janvier, Luigi Di Maio a lancé sur son blog un appel aux gilets jaunes : « Non mollate ! » (« Ne faiblissez pas ! »), et a mis à leur disposition sa plateforme Rousseau pour aider les « amis français » à organiser des événements sur le territoire ou encore à choisir des candidats aux différentes élections et à « définir le programme électoral » par des consultations sur le Web. Peu après cette démarche, Di Maio a cherché à nouveau à renforcer ses liens avec les gilets jaunes en réclamant publiquement, avec Paris dans le collimateur, des sanctions contre les pays « qui appauvrissent l’Afrique » et provoquent ainsi les migrations : « Si aujourd’hui il y a des gens qui partent c’est parce que certains pays européens, la France en tête, n’ont jamais cessé de coloniser des dizaines de pays africains. […] Il y a des dizaines de pays africains où la France imprime une monnaie, le franc des colonies et avec cette monnaie elle finance la dette publique française. […] Si la France n’avait pas les colonies africaines, parce que c’est ainsi qu’il faut les appeler, elle serait la quinzième puissance économique mondiale alors qu’elle est parmi les premières grâce à ce qu’elle est en train de faire en Afrique8 ».

L’itinéraire des provocations de Di Maio à l’adresse de Paris s’est prolongé par un voyage à Montargis le 5 février, au cours duquel il a rencontré un groupe de responsables des gilets jaunes, comprenant Christophe Chalençon, l’un des promoteurs de la « liste RIC pour les élections européennes » (dans l’espoir que le M5S obtienne un très bon résultat le 26 mai en France). En pensant avoir vécu à Montargis un moment historique, Di Maio a commenté sa photo de groupe avec les gilets jaunes sur Facebook en écrivant : « Ceci est la photographie souvenir d’une belle rencontre, la première d’une série, pendant laquelle nous avons parlé de nos pays, des droits sociaux, de l’environnement et de la démocratie directe9 ».

L’Élysée n’a pas apprécié le voyage français du vice-président du Conseil italien, d’autant plus qu’il s’inscrit dans le cadre d’une série de déclarations réciproques au vitriol entre les gouvernants des deux pays. Le gouvernement français, dont certains membres s’étaient déjà exprimés dans des termes peu flatteurs vis-à-vis de la situation italienne, joue à son tour la surenchère, en rappelant, au motif de consultations, l’ambassadeur de Rome. Cette décision, sans précédent depuis 1940 et l’entrée en guerre contre l’Italie de Mussolini, a été annoncée le 7 février par le Quai d’Orsay : « La France a fait, depuis plusieurs mois, l’objet d’accusations répétées, d’attaques sans fondement, de déclarations outrancières que chacun connaît et peut avoir à l’esprit. Cela n’a pas de précédent, depuis la fin de la guerre. Avoir des désaccords est une chose, instrumentaliser la relation à des fins électorales en est une autre. Les dernières ingérences constituent une provocation supplémentaire et inacceptable. Elles violent le respect dû au choix démocratique, fait par un peuple ami et allié. Elles violent le respect que se doivent entre eux les gouvernements démocratiquement et librement élus10 ».

Ainsi, depuis la Conférence de paix de Paris de 1946 et la signature du traité de paix, en 1947, l’Italie du gouvernement Conte n’a jamais été si isolée en Europe. Sa politique sur la question migratoire a forcé d’autres pays (surtout l’Espagne, mais aussi la France) à revoir à la hausse leur engagement en termes d’accueil et a placé l’Italie dans une situation difficile et désagréable : les déclarations méprisantes de Salvini au sujet des migrants « en croisière » (sic) et les positions xénophobes de plusieurs élus de la Ligue ont scandalisé nombre de citoyens européens.

3

La stratégie de Salvini : l’instrumentalisation de la crise migratoire européenne

Contrairement au cas du M5S, on constate que la crise politique et diplomatique actuelle n’a pas entaché la popularité de la Ligue. Ceci s’explique notamment par la réelle irritation d’une partie des Italiens envers l’Europe, notamment sur la question migratoire. En effet, suite aux départs de Libye et d’autres pays de migrants à bord d’embarcations précaires, organisés par des passeurs sans scrupule et par des clans criminels, la situation dramatique en Méditerranée est depuis longtemps objet de débats en Europe. Au cœur de ces débats, on retrouve souvent de nombreuses critiques relatives à l’intervention militaire en Libye survenue en 2011, à l’initiative de plusieurs pays dont la France de Nicolas Sarkozy, et qui a plongé ce pays (et, plus globalement, la région tout entière) dans une période de grave instabilité. Quoi qu’il en soit, tous les gouvernements italiens de la législature 2013-2018 ont été confrontés au problème d’une vague migratoire difficile à contrôler et encore plus à gérer. Bien que l’objectif de ces personnes originaires d’Afrique et d’Asie (migrants économiques et réfugiés politiques) ne soit pas de rester sur le sol italien, beaucoup d’entre eux s’y retrouvent bloqués.

D’autres pays comme l’Autriche, la Suisse et, surtout, la France ont renforcé les contrôles à la frontière de la Péninsule, allant ainsi contre le fonctionnement de Schengen et alimentant dans l’opinion publique italienne la sensation d’être abandonnée par une Europe assez peu solidaire. On constate que l’attitude de Rome s’est durcie entre le gouvernement dirigé par Enrico Letta et celui de Matteo Renzi, puis à nouveau entre ce dernier et le gouvernement du président du Conseil Paolo Gentiloni, qui avait comme ministre de l’Intérieur Marco Minniti (PD et ex-Parti communiste italien, PCI). De fait, Rome a pris une série d’initiatives allant dans plusieurs directions, de la vigilance sur le comportement des organisations humanitaires actives dans les eaux de la Méditerranée aux pressions sur les institutions et sur l’ensemble des pays européens, dans le but de faire comprendre que l’Italie ne peut pas supporter seule l’écrasante majorité de l’effort requis par la question migratoire en Méditerranée.

Une fois arrivé au gouvernement et devenu ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini a continué à exploiter le plus possible un discours déjà populaire lors de la campagne électorale de 2018: extrêmement dur contre l’immigration, teinté parfois de propos xénophobes, et marqué par la dénonciation contemporaine des « clandestins », des « passeurs criminels » et des « égoïsmes européens ». Si les positions pro-migrants soutenues par des maires et des administrateurs locaux ont été très appréciés au niveau international, elles n’ont cependant pas produit de réels changements dans la politique du gouvernement italien.

Dans toute l’histoire de l’Italie réunifiée (depuis 1861), la propagande sur la « trahison des amis européens » a toujours donné à ses promoteurs des avantages parfois très lourds de conséquences. Ainsi, pour citer deux exemples, quand la France, en 1881, prend le contrôle de la Tunisie, les Italiens s’allient aussitôt à Berlin et à Vienne pour former la Triple Alliance, et quand, en 1935-1936, des sanctions découlent de l’agression fasciste en Éthiopie, l’Italie de Mussolini intensifie son rapport avec l’Allemagne de Hitler. La relation franco-italienne est tout à fait particulière.

Elle doit être interprétée au travers des apports de la psychologie et de l’histoire, en plus de la politique au premier degré. Salvini a misé sur le fait qu’en prenant pour cible Emmanuel Macron il pourrait en même temps utiliser à son avantage la frustration des Italiens devant le comportement spécifique de la France (qui renforce ses frontières) et devant les égoïsmes d’une Europe dont le président Macron est devenu le porte-étendard. Le chef de la Ligue (grand ami personnel et allié politique de Marine Le Pen) fait ainsi tout son possible pour utiliser à son avantage la question migratoire, notamment dans la perspective des élections européennes du 26 mai 2019. Il cherche systématiquement la polémique sur l’Europe, comme s’il s’agissait pour lui de jouer un « match à domicile », et alimente en permanence la chaîne de déclarations acerbes contre Paris. Une chose paraît désormais claire : la question migratoire est pour Salvini bien plus qu’un problème à résoudre. La bataille anti-migrants est un point absolument fondamental de l’identité politique de son parti, ainsi qu’un instrument lui permettant de gérer son bras de fer contre les autorités européennes. Si, sur le terrain économique, l’Italie peut être forcée à faire face à des humiliations, sur celui de l’immigration elle pense pouvoir faire entendre sa voix, sa position géographique lui attribuant dans la Méditerranée un rôle aussi fondamental qu’inconfortable.

Le 30 janvier 2019, Graziano Delrio, l’un des leaders du PD (ancien membre du gouvernement Gentiloni), intervenant dans le débat sur l’immigration à la Chambre des députés, a lancé à l’adresse de Salvini : « Les Italiens ont besoin d’un ministre de l’Intérieur, pas d’un ministre de la Peur et de la Propagande11

Pour l’instant, Salvini prend à la légère ces dénonciations, se contentant de passer à la caisse électorale pour empocher les voix des nombreux Italiens frustrés par l’actuel contexte européen (même si, en réalité, les Italiens veulent sans doute rester dans l’Europe et dans l’Euro).

Le nombre de migrants arrivés sur les côtes italiennes a déjà sensiblement baissé, d’environ 80% entre 2017 et 2018. En effet, au cours de l’année 2018, 23.371 migrants sont arrivés en Italie par la Méditerranée, tandis qu’ils étaient 119.368 en 2017. L’année record reste 2016, avec 181.436 arrivées en Italie. Si l’on regarde en arrière, on a enregistré 153.842 débarquements en 2015, 170.100 en 2014, 42.925 en 2013 et 13.245 en 2012. Si l’on compare avec d’autres pays méditerranéens, la tendance est plutôt à l’augmentation du nombre d’arrivées, notamment en Grèce (de 35.400 en 2017 à 50.500 en 2018) et en Espagne (de 28.300 en 2017 à 65.400 en 2018). De plus, le changement de gouvernement en Italie, début juin, a accentué le phénomène de reconduite à la frontière libyenne des migrants sauvés. Au cours du premier semestre 2018, 50% des migrants sauvés au large des côtes libyennes ont été amenés dans des ports italiens, 3% en Espagne et 1% à Malte.

Au cours du second semestre 2018, la donne a complètement changé : 85% des migrants sauvés au large de la Libye ont été ramenés dans les ports de ce pays, tandis que 8% de ces personnes ont été amenées à Malte, 4% en Espagne et seulement 3% en Italie. Le retour forcé des migrants en Libye a provoqué la protestation des organisations humanitaires ainsi que du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, dénonçant notamment les conditions de vie dramatiques des migrants sur le sol libyen. En 2018, les témoignages bouleversants à ce sujet n’ont changé ni la ligne de l’Union européenne, ni celle du gouvernement italien de Giuseppe Conte.

L’Union européenne requiert que les migrants soient dirigés vers les ports « sûrs » parmi les plus proches géographiquement de leur point d’arrivée (et ce tout en doutant des garanties de respect des droits humains des migrants sur le sol libyen et en adoptant une attitude compréhensive vis-à-vis des fermetures de Malte). Du point de vue européen, la solution la plus facile et la plus souhaitable est donc celle de charger l’Italie d’une grande partie du dossier des migrations dans la Méditerranée, alors même que les pays voisins, et notamment la France avec une détermination croissante sous les trois dernières présidences, renforcent en parallèle leurs frontières communes. C’est cette spirale de décisions et de frustrations qui est en train d’aider Salvini et son parti sur le plan électoral. Le 20 janvier, au lendemain de la tragédie ayant coûté la vie à 117 personnes, noyées dans la Méditerranée, Salvini déclarait : « Moins de personnes partent moins de personnes meurent ; plus de personnes partent, plus de personnes meurent !12 »

La philosophie et la communication du gouvernement Conte sont claires : il faut empêcher les départs de Libye. Cela fait d’ailleurs des années que l’Europe paie (très cher) la Turquie d’Erdoğan pour qu’elle empêche le départ des migrants ainsi que des réfugiés.

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