Résumé

Introduction

I.

L’administration 2.0, une réponse à la crise

1.

Une crise durable liée à un changement de cycle

2.

Le numérique, une réponse adaptée au nouveau contexte

II.

L’administration 2.0, une convergence de facteurs favorables

III.

Situation des acteurs publics

1.

Les instances européennes

2.

Le gouvernement français

3.

Les collectivités locales

IV.

L’administration 2.0, un mode de pensée

V.

L’administration 2.0, la naissance d’un service public

VI.

L’administration 2.0, une stratégie Tetris

1.

Gouverner

2.

Convaincre

3.

Organiser

4.

Cadrer

5.

Favoriser la créativité et l’innovation

6.

Analyse critique et orientations

7.

Arbitrer

8.

Co-designer et co-produire

9.

Accompagner

10.

Superviser et évaluer

11.

Faire évoluer

VII.

Pour une administration 2.0, une organisation interne 2.0

1.

Le management collaboratif

2.

La gestion du cycle de vie du document

3.

La transformation des process internes

4.

Ouvrir le service public sur son environnement grâce aux outils 2.0

5.

Le management des ressources humaines

VIII.

L’administration 2.0, risques et limites

Conclusion

Voir le sommaire complet Replier le sommaire

Résumé

Dans cette note, Thierry Weibel explore les possibilités liées au développement d’un service public numérique qui répondrait mieux aux besoins actuels de l’administration et des citoyens. Toutes les conditions sont réunies pour le développement de l’administration 2.0 : de fortes contraintes budgétaires et la complexité croissante de l’action publique incitent les administrations à évoluer ; dans le même temps, les pouvoirs publics affichent une réelle volonté de soutenir le développement du numérique, répondant en cela à une forte attente des entreprises comme des citoyens.

Si les technologies sont d’ores et déjà disponibles, leur appropriation par l’administration implique une nouvelle approche du service public. Au sein d’un « territoire digital », il s’agit de développer une approche collaborative associant les services, les citoyens et les acteurs privés.

Les nouveaux outils permettront de transformer les relations entre les administrations et leurs interlocuteurs et de les inscrire dans un échange personnalisé : grâce aux outils numériques, les citoyens bénéficieraient ainsi d’une information rapide, complète et plus ciblée. Ils peuvent également être davantage consultés pour la conduite de l’action publique voire associés au travail de l’administration.

Pour conduire ces changements, cette note définit une stratégie opératoire. Celle-ci doit prendre en compte les risques liés au développement d’une administration numérique et procéder au lancement d’un ensemble d’expérimentations diverses, ciblées et évolutives, en collaboration étroite avec les citoyens.

Thierry Weibel,

Directeur, Activité Conseil SI & Administration 2.0 Groupe VOIRIN Consultants – ATELYA.

Le service public existe dans le but de satisfaire une demande sociale et se doit d’être disponible pour tous. En cela, le service public numérique devient la « nouvelle frontière » de la puissance publique. Paradoxe des temps, la crise économique et structurelle qui traverse le paysage français, associée à une forte attente citoyenne et à la disponibilité de nouvelles technologies, est une chance et une opportunité pour l’administration. Tout se met implicitement en place pour voir émerger une nouvelle politique publique destinée à créer un nouveau territoire numérique. Ce territoire digital peut être un nouvel espace d’intervention, réinventant et urbanisant les relations sociétales et sociales de l’administration.

Toutefois, le numérique est une matière spécifique, assimilable à nulle autre. « On n’aménage pas l’espace numérique comme on viabilise un nouveau quartier ». Elle suppose créativité, agilité, opportunisme et permet parallèlement une malléabilité, une itérativité, une évolutivité faisant du futur espace digital à la fois un territoire de production de services mais également un terrain d’expérimentation permanente.

On imagine alors que les modèles économiques, organisationnels, réglementaires et techniques sont à réinventer : méthodes agiles, organisation adaptative, partenariats à géométrie variable, co-design et co-production… Heureusement, les nouvelles technologies, et notamment les outils 2.0 (réseaux sociaux, internet mobile, collaboratif), sont là pour répondre à cet impératif et transformer les modes d’intervention de l’administration comme ils viennent de révolutionner la société civile.

La vision politique est là (en Europe, en France et localement), les opérateurs privés sont disponibles (télécommunications, banque, trans- port, internet…), les technologies sont prêtes, les citoyens sont en attente d’un service public accessible, présent à leur côté et écologique. Bref, il ne reste plus qu’à mobiliser les énergies et à inventer le service public numérique de demain.

I Partie

L’administration 2.0, une réponse à la crise

1

Une crise durable liée à un changement de cycle

Révision générale des politiques publiques, réforme fiscale, réforme territoriale, crise financière et économique, émergence de nouvelles puissances économiques mondiales : la période qui s’ouvre pour le secteur public est une période de profonde mutation. Les paradigmes traditionnels doivent être reconsidérés : augmentation régulière des recettes liées à la croissance, disponibilité de l’emprunt, recours à la fiscalité, logique  de dépenses, augmentation des déficits publics…

On peut penser que la politique d’investissement des trente dernières années qui a vu l’apparition de grandes infrastructures aux niveaux national et local (programmes immobiliers, travaux routiers, équipements…) va connaître une inflexion  forte. Parallèlement, les dépenses de fonctionnement (soutien aux entreprises, aux particuliers) vont probablement augmenter rapidement dans un contexte économique durablement morose.

Pour autant, le secteur public est confronté à la complexité et aux changements rapides. Il intervient face aux crises sociales, naturelles, économiques et politiques : les pandémies, le vieillissement de la population, le changement climatique, les attentes grandissantes des citoyens et la sécurité publique.

Tableau 1 : Les émetteurs de la dette publique fin 2009 (en milliards d’euros)

Cette situation provoque une prise de conscience douloureuse chez certains décideurs publics. En effet, le changement de culture menace d’être profond et durable. Après avoir parfois vécu « au-dessus de ses moyens », l’administration française doit revenir au principe de réalité dans un contexte peu favorable :

  • recettes plafonnées à la fois par la réglementation française et par les directives de l’Union Européenne mais aussi limitées par une consommation faible et un taux de prélèvement à maîtriser sur les ménages et les entreprises (sans compter la surveillance des agences de notations financières) ;
  • des dépenses accrues, notamment en fonctionnement dans le domaine de la sécurité, de l’aide sociale, etc…

 

2

Le numérique, une réponse adaptée au nouveau contexte

Dans un contexte troublé, on voit les projets d’investissement se restreindre, les budgets de fonctionnement connaître des coupes sévères, des ratios s’appliquer indistinctement sur les budgets (-10% cette année, -15% l’année suivante et ainsi de suite) sans gestion rationnelle des priorités.

Pour autant, cet « alignement stratégique » est-il adapté à la situation à venir ? Cette attitude est-elle pertinente dans le domaine de l’administration 2.0 ? Un million d’euros investis dans des travaux de voirie dégagent-t-ils la même valeur ajoutée qu’un million d’euros investis dans l’administration 2.0 ?

De toute évidence la réponse est non !

Il suffit de voyager à l’étranger pour s’apercevoir que la France est remarquablement bien équipée en infrastructures : réseau autoroutier et routier, réseau ferré, piscines, établissements scolaires, centres urbains, au regard de nombreux pays occidentaux.

Regardons en parallèle le niveau français en matière d’économie digitale (résultat du Digital economy rankings and scores, 2010) :

La France se situe en 20ème position et perd cinq places depuis 2009. Sur une planète où l’informatique représente la troisième révolution industrielle après la machine à vapeur et l’électricité, où capture, échange, traitement de l’information ont remplacé la valorisation de l’énergie et la transformation de la matière, ce retard est préoccupant.

Tableau 2 : Classements et notes des pays en matière d’économie numérique (2010)

Source :

The Economist Intelligence Unit

A la différence des années 1980 à 2000, les dix dernières années ont vu l’innovation et les nouveaux apprentissages de l’informatique quitter l’entreprise et rejoindre la société civile avec :

  • de nouveaux modèles de communication avec MSN, Skype, Wikipedia ;
  • de nouveaux modèles de relations : Facebook, Myspace, Twitter, SecondLife, LinkedIn ;
  • de nouveaux modèles économiques : Amazon, Google… ;
  • de nouveaux modèles techniques : cloud computing, consommation de l’informatique par abonnement…

Par ailleurs, on constate que les facteurs technologiques prennent la seconde place en termes de facteurs externes ayant la plus grande influence sur la stratégie d’entreprise, juste derrière les facteurs liés au marché (Source : IBM Global CEO Study 2010). On conviendra qu’il s’agit d’un levier de changement déterminant dans les sociétés contemporaines.

Comment l’administration s’est-elle emparée de  ces  nouveaux modèles ? Comment l’offre de service s’est-elle transformée ? Quels investissements structurés et pérennes ont été réalisés ? Ces questions restent ouvertes et le nombre de réalisations dans ces domaines est assez faible ou est directement lié à une volonté politique forte mais isolée.

Pourtant le potentiel français existe : selon Médiamétrie, la France comptait 35,3 millions d’internautes en février 2010 et le taux de pénétration du haut-débit à domicile atteint 96,7% de la population internaute. Dans une France où les investissements structurants ont déjà été grandement réalisés, où les dépenses publiques devront être mieux raisonnées, le service public numérique ouvre une nouvelle catégorie de chantiers pour une nouvelle plateforme de services permettant d’imaginer le service public de demain, à savoir un service public :

  • attendu par les citoyens ;
  • créateur de lien social ;
  • à forte valeur ajoutée ;
  • réduisant les dépenses publiques ;
  • dynamisant l’économie ;
  • en interaction avec les acteurs privés et associatifs, les citoyens ;
  • favorisant le développement durable.
II Partie

L’administration 2.0, une convergence de facteurs favorables

Notes

1.

Référence : Rondeau (A). « Transformer l’organisation : comprendre les forces qui façonnent l’organisation et le travail » dans JACOB (R)., RONDEAU (A.) et LUC (D), (dir.), collection Racine du Savoir, Gestion revue internationale de gestion, 2002, p. 28-45.

+ -

L’administration 2.0, ce n’est ni la continuité, ni la rupture mais la transformation du service public1.

Notes

2.

On pourra consulter sur ce thème : la note « internet, politique et coproduction citoyenne » de Robin BERJON (septembre 2010) et l’article Politique 2.0.

+ -

Plusieurs tendances s’articulent pour provoquer cette transformation :

  • La volonté de faire mieux avec moins (more services for less money) dans un contexte de crise économique ;
  • l’émergence de nouvelles technologies ;
  • l’investissement d’un champ à forte valeur ajoutée jusqu’à  présent  très largement délaissé ;
  • l’appétit numérique des citoyens ;
  • la maturité des entreprises (e-business, e-commerce…) ;
  • une conscience et une volonté politique.

 

Dans un environnement technologique en pleine effervescence, le concept d’administration 2.0 apparaît comme une réponse signifiante et opérationnelle aux problématiques posées.

L’administration 2.0 va devoir maximiser l’efficience et démontrer qu’elle fait un rendement acceptable à l’argent des contribuables.

C’est aujourd’hui un lieu commun que d’affirmer que les citoyens éduqués et connectés souhaitent avoir à leurs côtés une administration efficace, rapide, disponible et flexible. Plus encore, ils souhaitent  apporter des éléments de solutions aux problématiques publiques.

L’approche gagnant-gagnant sera d’offrir un meilleur service à l’usager en sollicitant sa participation et en faisant en sorte que l’organisation publique maîtrise ses coûts et ses charges.

Stimulée par le secteur marchand, l’administration doit s’aligner sur des modèles qui ont prouvé leur efficacité. A l’image des entreprises qui utilisent les applications web 2.0 pour être en relation permanente avec leurs clients et les parties prenantes, l’administration reposera en grande partie, dans sa transformation à venir, sur les enjeux de l’internet 2.0 :

  • la connectivité,
  • les nouvelles relations citoyennes,
  • les nouveaux partenariats,
  • les nouvelles responsabilités : transparence, dialogue bilatéral…,
  • l’individualisation des services.

Ces concepts se retrouvent aujourd’hui dans les approches dénommées : e-administration, gestion de la relation citoyenne, carte de vie quotidienne, ouverture des données publiques (OpenData) etc.

L’administration passe donc progressivement à l’administration 2.0 mais reste encore autocentrée, c’est-à-dire trop centrée sur ses besoins internes. Il lui faut également concevoir le « plan local d’urbanisme » de l’espace public numérique. Ce plan local d’urbanisme aura notamment trois composantes : la mobilité, le haut débit pour les zones grises et le très haut débit résidentiel / professionnel.

Il s’agira pour elle de relever de nouveaux défis :

  • permettre au citoyen de co-produire2, de tester, de modifier et de faire évoluer les processus et les services en fonction de ses besoins réels,
  • provoquer des partenariats public-public et privé-public pour partager les coûts, assurer la cohérence de la réponse, maîtriser et répartir les risques.
III Partie

Situation des acteurs publics

1

Les instances européennes

L’économie numérique de l’Europe se renforce, s’étend à tous les secteurs de l’économie et s’introduit dans tous les domaines de notre vie, selon le rapport de la Commission européenne sur la compétitivité numérique, publié le 17 mai 2010. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) ont impulsé la moitié de la croissance de la productivité en Europe pendant les quinze dernières années. Six Européens sur dix utilisent régulièrement l’internet.

Mme Neelie Kroes, membre de la Commission en charge de la stratégie numérique, a déclaré : « L’économie numérique de l’Europe est essentielle pour la croissance et la prospérité. Les TIC et l’internet à haut débit sont aussi révolutionnaires dans notre vie que le développement  des réseaux d’électricité et de transport l’était il y a un siècle. Mais nous devons soutenir la poursuite du développement de l’internet pour que tous les citoyens puissent profiter de l’économie numérique ».

La Commission s’apprête à lancer une consultation publique en ligne sur dix aspects clés pour les futures politiques de l’Europe dans le domaine des TIC et des médias, proposant notamment de :

  1. Mobiliser le potentiel des TIC comme moteur de la relance économique et facteur essentiel de l’agenda de Lisbonne pour la croissance et l’emploi.
  2. Renforcer le rôle des TIC dans la transition vers une économie plus durable, à faible émission de carbone.
  3. Favoriser la créativité des usagers. Le nouvel environnement numérique (web 2.0 et au-delà) offre aux citoyens européens des possibilités sans précédent de donner libre cours à leur créativité. De nos jours, l’internet est un forum politique interactif, un réseau social dynamique et une vaste source de connaissances. Grâce à de nouvelles plateformes et à de nouveaux services interactifs, les utilisateurs sont devenus des acteurs, des producteurs ou des « prosommateurs » (producteur + consommateur) actifs et il est essentiel de mettre en place une politique de plus grande ouverture visant à encourager leur créativité et leur participation.
  4. Mettre à la disposition de tous des services publics modernes, efficaces et accessibles. De plus en plus, l’administration en ligne devient une réalité dans les États membres. Toutefois, il faut redoubler d’efforts pour accroître l’interopérabilité entre administrations publiques. L’apprentissage en ligne et la santé en ligne peuvent grandement améliorer la qualité de l’éducation et des soins de santé dans l’Union européenne. Le web participatif offre de nouvelles possibilités, mais il représente également un défi pour les administrations publiques dans la mesure où il permet aux citoyens de repenser leur relation avec les autorités.
  5. Utiliser les TIC pour améliorer la qualité de vie des citoyens européens en donnant accès à toute la richesse du patrimoine culturel européen par sa mise en ligne.
2

Le gouvernement français

Dans le cadre des investissements d’avenir financés par l’emprunt national, l’Etat a choisi, le 7 juin 2010, d’allouer un budget de 4,5 milliards d’euros au développement de l’économie numérique, dont 2,5 milliards d’euros seront consacrés au développement des nouveaux services, usages et contenus numériques et 2 milliards à l’accélération du déploiement national du très haut débit.

Neuf priorités d’investissement ont été identifiées par l’Etat :

  1. développement de l’informatique en nuage (cloud computing) ;
  2. numérisation des contenus ;
  3. développement des technologies de base numérique ;
  4. réseaux électriques intelligents (smarts grids) ;
  5. e-santé ;
  6. sécurité et résilience des réseaux ;
  7. systèmes de transports intelligents ;
  8. ville numérique ;
  9. e-éducation.

A travers le Fonds pour la société numérique, l’Etat interviendra d’abord en tant qu’investisseur, avec des prises de participation et des prêts destinés à cofinancer les projets les plus mûrs. Dans une moindre mesure (près de 30%), il interviendra sous forme d’aides d’Etat (avances remboursables et subventions), notamment pour accompagner l’effort de recherche et développement.

Une dizaine de grandes villes – parmi lesquelles Caen, Bordeaux, Lille, Strasbourg – ont déposé un dossier pour être labellisées « Territoires leader du sans contact mobile ». On rappellera que le ministère de l’industrie a souhaité étendre l’expérimentation niçoise (démarrée en mai 2010) à d’autres territoires pour multiplier les usages concrets et innovants des technologies sans contact (transports, tourisme, commerce, dépendance) et donner un signal fort aux acteurs du marché concernés (opérateurs, équipementiers…). Le label donne aux collectivités retenues la possibilité de financer des études et de participer à un réseau d’échanges sur les services sans contact. Les projets qui émergeront seront ensuite susceptibles de bénéficier de l’argent du grand emprunt dans le cadre des appels à projet sur la ville numérique.

3

Les collectivités locales

De leur côté les collectivités territoriales ont vu l’intérêt de e-administration mais trop souvent, il s’agit d’un acte de présence numérique, un projet parmi tant d’autres confié à la Direction des systèmes d’information, sans vrai maître d’ouvrage interne. On parlera « dématérialisation, e-services, gestion de la relation au citoyen, ouverture des données publiques, ou carte de vie quotidienne » mais sans réelle prise de conscience des enjeux, sans partenariat élargi, sans le bouquet de technologies susceptibles d’emporter l’adhésion.

Les « experts du web » mandatés par le gouvernement et pilotés par le député Franck Riester, en février 2010, sont assez sévères dans leur analyse de la relation entre administrations et usagers. Ils pointent une offre de services hétérogènes, organisée en fonction des administrations et non des usagers qui se traduit par une multiplicité de sites parfois redondants :

  • Une offre de services en ligne très hétérogène (notamment pour les collectivités),
  • Un bénéfice usager des services en ligne pas assez perceptible,
  • Un langage trop technocratique et une ergonomie à revoir,
  • Une interactivité et une réactivité faibles.

Parmi les vingt-cinq propositions du rapport, les principales sont les suivantes :

  • Développer l’administration multicanal ;
  • Améliorer l’ergonomie des sites publics et l’identification des sites de l’Etat ;
  • Favoriser la mutualisation de l’information et éviter les redondances ;
  • Permettre la réalisation de démarches 100% dématérialisées ;
  • Permettre à l’usager de suivre l’état d’avancement de son dossier ;
  • Généraliser les fonctions de paiement dématérialisé ;
  • Développer systématiquement le test des nouveaux services auprès de beta-testeurs et favoriser l’évaluation des services en ligne par les usagers ;
  • Créer une plateforme d’innovation de services « Etat Lab » permettant aux acteurs tiers (et en particulier privés) de développer des services innovants (genre API Google ou iPhone) à partir de données publiques ;
  • Créer un bouquet de services minimum destinés à être proposés en ligne par les collectivités pour un même niveau d’accès aux services publics sur le territoire.
IV Partie

L’administration 2.0, un mode de pensée

L’administration 2.0, l’écosystème numérique, le territoire digital, l’aménagement numérique, le service public numérique : voilà cinq appellations recouvrant peu ou prou les mêmes notions et s’appuyant sur les mêmes solutions pour apporter une réponse syncrétique aux défis et opportunités du moment.

Tout est profondément nouveau et à inventer. Il ne s’agit ni de construire un bâtiment, ni de tracer une route, ni d’aménager un quartier. Le digital présente une complexité et une mobilité plus difficile à appréhender que celle d’un objet matériel. Il présente les avantages qui découlent de son caractère abstrait : il est infiniment malléable et évolutif. Il est donc possible d’en réaliser un prototype préliminaire rudimentaire destiné à être essayé, à faire part de ses remarques et suggestions, qui donneront lieu à une nouvelle version plus élaborée, puis à l’introduction de nouvelles technologies modifiant l’architecture et la géométrie du concept.

Tableau 3 : Quatre activités innovantes pour conduire un projet d’administration 2.0

Il faut donc passer, dans les esprits et les méthodes, de la culture du solide à la culture du fluide, de l’organique au physiologique, du statique au dynamique.

L’imagination prend le pouvoir, le risque est omniprésent, l’innovation est partout.

Il ne s’agit pas de suivre ou de bricoler mais de concevoir et de développer de nouveaux territoires et de nouveaux services ne ressemblant à rien de ce que l’homme a pu imaginer ou créer auparavant.

Concevoir et développer réclament méthode et collectif. Maîtriser les risques, c’est également les partager. Innover, c’est transformer.

Le territoire de demain, ce sont donc :

  • Des interfaces de dialogue – terminaux mobiles ou fixes, objets communicants ;
  • Des réseaux de communication – fixes et mobiles ;
  • Des contenus – publics et privés ;
  • Des modèles – économiques, juridiques, éthiques…

 

Il est donc nécessaire de mobiliser les forces vives du territoire tant publiques que privées autour d’un projet numérique au service des acteurs locaux. Pour atteindre ses objectifs et partager les risques, le territoire doit associer ses ressources propres avec les autres niveaux du secteur public (Europe, Etat, collectivités, hôpitaux) aussi bien qu’avec le secteur privé, associatif et les citoyens eux-mêmes.

Une collectivité doit être plus qu’un échelon centré sur ses compétences obligatoires et son efficacité. Il faut maintenant penser interconnexion, interconnexion entre les hommes et avec les objets au travers de systèmes intelligents, précis, rapides, mesurables.

Cette approche nécessite une stratégie systémique, flexible, versatile, intégrant la gestion de la complexité et le feedback.

V Partie

L’administration 2.0, la naissance d’un service public

L’administration 2.0 doit donner naissance à un service public numérique disponible sur un territoire. Le territoire est alors augmenté d’informations et de connaissances, portées par les équipements, les réseaux, les objets, les acteurs en interaction, au service de la population.

L’administration 2.0 a pour vocation première d’imaginer l’intégration territoriale des technologies de l’internet en mobilité, de l’internet du futur, de l’internet des objets et du sans contact, et de les assembler dans un bouquet de services au service des acteurs locaux.

A ce nouveau stade, on ne parle plus de concepts d’e-administration, de gestion de la relation citoyenne ou d’e-démocratie. La nouvelle approche est plus ouverte, plus globale et multi-partenariale. Les concepts précités sont intégrés dans le bouquet de services et contribuent ainsi à la dynamique mais ne sauraient la résumer.

Par ailleurs, au-delà de la volonté politique, des financements et des énergies, de nombreux contenus publics peuvent contribuer à l’émergence et à la réalité de l’administration 2.0 :

  • contenus cartographiques ;
  • données culturelles multimédia ;
  • données administratives dématérialisées ;
  • objets intelligents ;
  • informations de déplacement ;
  • accompagnement touristique ;
  • données économiques, etc..

Plusieurs axes de réflexion sont d’ores et déjà identifiés dans le périmètre de l’administration 2.0 :

Axe 1 : le citoyen sur un territoire durable

  • réduire et optimiser les déplacements (gagner du temps, faire à dis- tance, utiliser les transports collectifs ou doux, télétravailler) ;
  • assister la mobilité (géolocalisation, itinéraires, cartes) ;
  • développer des territoires interactifs (nouvelles interfaces intelligentes avec l’environnement et le mobilier urbain, réalité augmentée…) ;

 

Encadré 1 : Un trésor informationnel voué au partage : l’OpenData*. (Extrait de la directive européenne)

Copyright :

* Voir l’article « Gouvernement 0 et open data ».

 

  • appropriation du territoire de vie et du patrimoine local ;
  • maîtrise et préservation des ressources ;
  • revitalisation de quartiers sensibles ou pilotes.

 

Axe 2 : l’accompagnement de la vie et l’épanouissement personnel

  • accompagner de la naissance à la vieillesse par le numérique ;
  • assurer la connaissance et la mise à disposition d’un système sanitaire adapté ;
  • développer l’éducation et l’éveil culturel ;
  • développer le tourisme et les loisirs ;
  • créer du réseau social multimédia et ubimédia.

 

Axe 3 : la vie quotidienne

  • faciliter des actes de la vie quotidienne avec les technologies sans contact (paiement, tags…) ;
  • favoriser le numérique au service des populations âgées et handica- pées (réalité augmentée, connectivité…) ;
  • développer la conscience sociale (e-démocratie, diffusion de l’infor- mation et de la connaissance…) ;
  • gérer la relation citoyenne et l’émergence d’une nouvelle civilité ;
  • déployer des bouquets de services numériques.

 

Axe 4 : l’efficacité publique

  • maîtriser les dépenses publiques ;
  • gérer l’identité numérique des citoyens pour simplifier les démarches d’e-administration et l’accès aux équipements collectifs ;
  • assurer la sécurité des contenus et des transactions ;
  • optimiser le fonctionnement de l’administration (sécurité, transports, fluides, nuisances, information, aménagement/urbanisme, gestion de crises).

 

Les services publics issus de l’administration 2.0 chercheront à atteindre tout ou partie de ces cibles grâce aux technologies disponibles et aux ressources mobilisées.

VI Partie

L’administration 2.0, une stratégie Tetris

La stratégie Tetris tire son nom du jeu vidéo Tetris, où le joueur doit décider rapidement de la meilleure façon de placer des pièces défilant à une vitesse toujours croissante. Il y a donc deux facteurs à prendre en compte : la pertinence du choix de placement, et la vitesse de prise de décision.

La stratégie Tetris désigne le fait qu’une perception hâtive occasionnellement fausse peut se montrer plus efficace qu’une analyse exacte  dont le résultat serait venu trop tard. Ainsi, il est donc parfois plus rentable de choisir une solution simplement « assez correcte » plutôt que de rechercher en y consacrant beaucoup d’énergie et de temps la meilleure solution. Ce principe de sélection se retrouve dans des algorithmes et les heuristiques employés en intelligence artificielle.

Présentons les étapes indispensables d’une démarche d’administration 2.0 :

1

Gouverner

La gouvernance devra être à la fois créative, volontariste et attentive :

  • créative en favorisant l’innovation et les « porosités » de toutes natures ;
  • volontariste au regard des ressources mobilisées et du choix des enjeux ;
  • attentive au regard des risques liés à l’innovation et au contexte évolutif.
2

Convaincre

Il importe d’assurer une prise de conscience par les acteurs des enjeux, des opportunités, des forces et faiblesses, des menaces et opportunités, de l’approche innovante. Il s’agit à cette étape de présenter des bonnes pratiques et d’expliquer aux différents acteurs les règles du jeu permettant d’aboutir à un service public numérique.

Cette phase peut prendre des formes plurielles :

  • études d’opportunité ;
  • visite de territoires digitaux ;
  • mini « labs » ;
  • serious games ;
  • rencontre d’experts ;
3

Organiser

Une approche administration 2.0 milite pour une nouvelle structure et non pour un chargé de mission. Il s’agit de mettre en place de nouvelles ressources dans de nouveaux modes de travail pour élaborer une nouvelle politique publique.

Une « Direction générale adjointe chargée de l’innovation et la trans- formation » peut être une solution pour porter ces nouvelles méthodes et ces nouvelles approches dans un mode 2.0 intégrant :

  • une relation élus-Direction générale privilégiée ;
  • une légitimité dans ses interventions transversales au sein des services ;
  • des relations partenariales opportunistes et de niveau suffisant ;
  • un changement de culture ;
  • une animation systémique à périmètre étendu ;
  • des projets en tuilage de nature et d’ampleur hétérogènes ;
  • des boucles de rétroaction sur les usages.

 

Cette  DGA,  chargée  d’une  nouvelle   politique   publique,   devra   être   en mesure d’utiliser les modes  collaboratifs  2.0  ainsi  que  les  nouvelles technologies dans ses actions quotidiennes en termes d’efficacité et d’émulation et elle devra privilégier les méthodes agiles.

4

Cadrer

Un cadrage à 360 degrés consiste à établir un document exposant la situation du territoire en regard du développement d’usages, de services et de contenus numériques innovants.

On peut imaginer sans doute le sommaire suivant :

  • monographie territoriale présentant le territoire du point de vue géographique, démographique, historique, économique, et numérique,
  • pondérer des forces et faiblesses, menaces et opportunités au regard du service public numérique,
  • identifier :
    • les acteurs potentiels (grands opérateurs mais aussi startups du tissu local) ;
    • les services à valeur ajoutée déjà engagés ;
    • les technologies ;
    • les sources de financement.
5

Favoriser la créativité et l’innovation

Dans un monde incertain et volatil, la créativité est le premier levier de la transformation. On essaie de privilégier les innovations radicales, d’encourager l’abandon des approches trop traditionnelles et de prendre des risques calculés.

Le style de management et de communication sera inventif afin d’interagir avec une nouvelle génération de collaborateurs, de partenaires et de citoyens.

6

Analyse critique et orientations

L’objectif de l’analyse critique est d’apporter une vision stratégique et de définir les objectifs du futur service public numérique dans le cadre de la démarche administration 2.0.

Des scénarios alternatifs et valorisés doivent être envisagés, intégrant :

  • les enjeux
  • les objectifs – priorités stratégiques – services – usages
  • le périmètre du projet global et bouquet de services cible
  • la description des projets et sous-projets spécifiques
    • axes d’effort concernés
    • territoire et usages cible
    • acteurs et charges
    • budget et financement
    • calendrier
    • technologies
    • contenus numériques
    • accompagnement du changement
  • l’analyse critique des projets
    • valeur ajoutée attendue pour chaque cible d’usage
    • adéquation aux objectifs et priorités stratégiques
    • acceptabilité des usages et des coûts
    • capacité à mobiliser les acteurs et les ressources
    • faisabilité technologique et capacité de déploiement,
    • critères économiques (modèle économique, retour sur investissement…)
    • adéquation avec les besoins et attentes potentiels
    • capacité organisationnelle
    • analyse de type Mareva
    • nécessité du projet ou encore « risque à ne pas faire »bénéfices du projet pour les usagers
    • maîtrise des risques du projet
  • la cotation des projets et du scénario

Une tendance actuelle est la définition de « quartier cible » pour engendrer des effets de cohérence et de convergence numérique sur un espace donné. Dans ce cas, la ville 2.0 devient un espace de responsabilité partagée, d’économie créative. Le design de la ville devient interactif et la voix des citoyens se fait entendre au travers des réseaux sociaux. Inversement, la ville 2.0 parle aux citoyens au travers de l’internet et des technologies de la mobilité (sans contact, smartphone…). La géographie des services prend le pas sur la géographie physique.

7

Arbitrer

  • Privilégier les expérimentations multi-usages ;
  • Pouvoir analyser un large périmètre de cas d’usages : transport, paiement, vie ..;
  • Permettre l’implication d’un grand nombre d’acteurs ;
  • Pouvoir analyser les expérimentations sur des volumes d’utilisateurs significatifs ;
  • Rester flexible et opportuniste au regard du caractère innovant des projets et de la variabilité des inputs (acteurs, technologies).
8

Co-designer et co-produire

Il s’agit de favoriser la participation, non seulement pour l’image mais bien pour l’efficacité de la démarche : co-design et co-production avec des partenaires publics, privés et associatifs mais aussi avec les citoyens eux-mêmes. La coproduction fait naître une nouvelle civilité, plus contributive et plus active. Le citoyen devient un agent de transformation du service public. Pour ce faire, il faut :

  • Imaginer les nouvelles règles de la participation civique ;
  • Séduire, enrôler, motiver ;
  • Trouver les bonnes plateformes collaboratives en fonction des publics (espaces physiques ou numériques, logiques de bac à sable…).

Les programmes approuvés doivent déclinés en projets et sous-projets dotés d’une autonomie relative pour éviter les contentions et favoriser les actions les plus dynamiques.

Une logique de quick wins ou victoires faciles doit être stimulée afin de tester les approches, de préparer les esprits et démontrer la capacité à faire dans l’attente des projets plus structurants aux cycles de vie plus longs.

9

Accompagner

L’accompagnement des projets et la communication autour du service public numérique doit être ciblée et opportuniste. L’appétit numérique est très largement réparti aujourd’hui : jeunes générations, actifs, retraités… et l’ensemble de ces cibles est sensible à l’innovation.

Une communication multimédia, adaptée à chaque public, doit être une préoccupation permanente.

Le respect des standards de fait de l’internet 2.0 et des terminaux mobiles les plus répandus doit être un gage de succès mais également une garantie d’appropriation des nouveaux services.

10

Superviser et évaluer

La supervision se situe sur plusieurs plans : superviser les projets disposant de leurs métriques propres (objectifs, calendrier, charges, budgets…) mais aussi les services numériques qui doivent, dès l’origine, porter les outils de mesure permettant de suivre les usages et de procéder aux arbitrages nécessaires.

Cette capacité à tenir compte des retours d’usage et de l’analyse des impacts économiques, écologiques, et sociétaux des innovations proposées implique des structures de gouvernance pérennes et un système de pilotage structuré pour alimenter l’ensemble des acteurs en informations pertinentes.

11

Faire évoluer

Le service public numérique est une nouvelle compétence pour les acteurs relevant ce défi. Il s’inscrit dans l’ADN du territoire et continuera à se développer. La gouvernance en place aura à conduire l’émergence de nouveaux services tout en maintenant en condition et en faisant évoluer les services déjà livrés.

Il s’agit non de conduire un projet mais de conduire une politique publique, nouvelle et pérenne. Cette activité prendra une place déterminante et transversale dans le périmètre d’innovation de la puissance publique. Créatrice de nouveaux services, elle sera également synonyme de nouvelles obligations. Elle doit être vue comme une « couche » de service public complémentaire, se superposant aux compétences historiques comme l’eau, les transports, l’action sociale…

VII Partie

Pour une administration 2.0, une organisation interne 2.0

On l’a vu précédemment, la conception, la réalisation et l’évolution de l’administration 2.0 est hautement collaborative, poreuse aux influences du secteur privé et des particuliers, ouvertes sur le monde réel.

Le secteur public est historiquement dans une relation unilatérale avec son éco-système : relations usagers, marchés publics. Cette position dominante a introduit et conforté des comportements internes peu favorables à la mise en œuvre d’un projet d’administration 2.0.

Il faut donc aménager le management public pour le rendre compatible avec l’administration 2.0.

1

Le management collaboratif

La pertinence du modèle administration 2.0 tient à la mise en place d’un service public numérique sur un territoire dans le cadre d’une approche collaborative (usagers, partenaires publics et privés.).

Il est logique d’imaginer que cette ouverture externe des organisations publiques doive se doubler de l’introduction du mode collaboratif en interne. Comment faire du collaboratif externe sans être rôdé à ces pratiques dans son activité quotidienne ? Comment imaginer les services numériques du futur sans être immergé dans un contexte numérique ?

L’émergence du mode collaboratif dans une organisation publique est facilitée par les outils et les usages 2.0.

A ce titre, les portails collaboratifs 2.0 et les communications unifiées apportent des solutions pertinentes.

Le portail collaboratif 2.0 représente la mise en place de plusieurs outils indispensables pour le management en mode  projet.  L’e-room  ou espace de travail collaboratif est destiné à l’équipe projet ou à la communauté d’experts amenés à travailler en mode asynchrone : dépôt de document, forum… Cet espace de travail collaboratif comprend un espace de stockage (incluant le versioning automatique des documents, l’alerte sur dépôt ou modification, la recherche plein texte…), des outils de gestion de planning, un workflow simplifié, un forum, des blogs, le tout prêt à l’emploi ;

De leur côté, les communications unifiées (intégration de la message- rie instantanée, de l’audio-visio conférence, du partage de bureau, de la téléphonie, de la messagerie) représentent le volet synchrone et temps réel de l’e-room. Elles permettent une collaboration en temps réel n’importe où, n’importe quand, avec n’importe quel terminal.

 

2

La gestion du cycle de vie du document

Les organisations actuelles génèrent et stockent d’énormes quantités de documents électroniques, notamment à l’aide de serveurs de fichiers. Ce mode de gestion, très frustre, ne permet pas de gérer le cycle de vie du document (création, partage, archivage, destruction) qui est pourtant au cœur des modes d’organisation des structures.

L’ECM (Enterprise Content Management) est une démarche qui vise à collecter, structurer, gérer et stocker l’ensemble des contenus numériques d’une organisation. L’ensemble des contenus numériques englobe les documents bureautiques, les sous-produits d’applications Métier jusqu’aux mails, les télécopies… Cette gestion intègre la gestion des habilitations, le partage, l’archivage légal, la valorisation des savoirs… Bien gérer les documents internes de l’administration, c’est gérer une partie des contenus destinés à être déployés dans l’administration 2.0. Cette démarche est à engager sans tarder pour assurer la valorisation et l’archivage du patrimoine public électronique et répondre aux exigences réglementaires à savoir le libre accès aux données publiques (OpenData).

3

La transformation des process internes

Pouvoir fournir des services administration 2.0, c’est disposer de processus organisationnels et techniques 2.0 fondés sur :

  • la dématérialisation des services : état-civil, marchés, contrôle de légalité, archives, etc., au travers de projets parfois définis en collaboration avec d’autres administrations ;
  • la qualité de service : gestion des identités numériques, disponibilité des services, traçabilité des processus, sécurité des données…
  • la mutualisation publique : mutualisation de processus standardisés entre administrations, mise en commun de ressources, partage des bonnes pratiques, Public cloud…
  • l’interopérabilité : utilisation des standards d’interopérabilité (XML ), protocoles d’échanges

 

Autant de sujets qui doivent trouver leur place dans les schémas directeurs du système d’information des administrations.

4

Ouvrir le service public sur son environnement grâce aux outils 2.0

Notes

4.

Le crowdsourcing désigne le fait de faire appel à des acteurs extérieurs à la structure pour concevoir une démarche visant à utiliser la créativité, l’intelligence et le savoir faire d’un grand nombre de Le travail fourni peut être rémunéré. Le crowdsourcing est améné à transformer profondément l’organisation interne de l’administration, tout comme sa relation à son marché. Un exemple appliqué à l’urbanisme. Voir également « Le monde est plein d’idées ».

+ -

Pour aller du « parler à » au « parler avec », on voit l’apport potentiel des outils 2.0 dans la société : réseaux sociaux (Facebook, Myspace), outils de dialogue instantanés (Twitter, MSN), outils conversationnels (blogs), outils documentaires (Wiki), outils collaboratifs (e-rooms, ECM…).

Ces outils 2.0 peuvent être progressivement introduits dans la sphère publique afin de :

  • INFORMER : pour gérer la diffusion de l’information publique en fonction de populations ciblées (communiquer sur un nouveau ser- vice d’action sociale vers les bénéficiaires potentiels, informer d’une subvention culturelle vers la population ciblée, alerter sur un chantier de voirie les usagers concernés…) ;
  • CONSULTER et SE CONCERTER : pour concevoir  de  nouveaux  services à « coût » sûr. Trop souvent, de nouveaux  services publics ont été mis en place sur une intuition ou en mode réactif sans asseoir l’investissement sur une réflexion menée en concertation avec les futurs consommateurs du service. Aujourd’hui les outils du web 2.0 permettent d’établir un dialogue élargi sur un sujet, d’identifier pro- moteurs, sponsors et apporteurs d’idée. Pourquoi ne pas associer certains de ces acteurs aux fonctionnaires chargés de conduire le dossier pour élaborer du « co-design » de service public ? Nous serions alors dans un modèle de crowdsourcing4.
  • CO-PRODUIRE : pour générer des économies de temps et de masse salariale. Pour peu que les informations liées aux personnes ou aux ménages soient partagées entre les services publics concernés (dans le respect des libertés publiques), on perçoit bien que des économies de temps et d’énergie peuvent être générées dans le traitement des dossiers. Si on associe l’usager à la saisie des données, celles-ci deviennent plus justes et pertinentes. Par ailleurs, la saisie de ces données étant dévolue à l’usager, on épargne cette tâche souvent répétitive à l’agent public. C’est le « co-provisionning » (co-alimentation).
5

Le management des ressources humaines

Le management des ressources humaines est bousculé par l’apparition de ces nouveaux outils 2.0 : les agents publics pourront collaborer avec les usagers pour mettre en place de nouveaux services. Des équipes projets ou des communautés d’experts échapperont à la gouvernance hiérarchique traditionnelle. On voit bien  que  le  management  des  ressources et la sociologie des organisations vont devoir évoluer. Quelques pistes peuvent être déjà imaginées :

  • établissement de sociogrammes en parallèle des organigrammes classiques ;
  • rémunération complémentaire de nœuds de réseaux au sein de communautés ou de projets pour leur contribution ou leur animation ;
  • rémunération de vacataires privés ou d’associations qui contribuent à faire émerger ou à réaliser de nouveaux services dans le cadre d’une gestion de projet ouverte.

A ces aspects, il faut ajouter la problématique de l’attractivité publique. Les étudiants actuels sont « technologiquement sophistiqués ». Ils ont grandi avec l’internet et leur usage précoce des technologies a transformé leur façon de communiquer. Une partie de ces étudiants seront les fonctionnaires de demain. Il faut donc les attirer en leur proposant les outils de travail adaptés et contemporains.

Enfin, l’accompagnement des agents publics dans l’appropriation des nouveaux modes de management et des nouveaux outils milite dès à présent pour renforcer le compagnonnage numérique dans les organisations : consolidation des réseaux métiers de type « correspondants informatiques » ou « administrateurs fonctionnels ».

VIII Partie

L’administration 2.0, risques et limites

Le premier risque de l’administration 2.0 est celui du choc culturel :

  • pour les décideurs publics qui souvent observent les systèmes d’in- formation comme  un  moyen  au  service  d’une  politique  publique    et non comme une politique publique à part entière. Cette prise de conscience peut être facilitée par le constat de l’impact sociétal dominant du numérique (média, usages, adhésion des publics…) ;
  • pour les agents du service public qui ne sont pas habitués à considérer le digital comme un instrument de transformation du service public et des méthodes de travail. Trop souvent, le numérique se doit de reproduire les méthodes de travail du passé sans chercher à recomposer les process pour atteindre une efficience nouvelle. Par ailleurs, la collabo- ration avec les partenaires et les usagers devra rompre la distanciation de l’administration avec la société civile ;
  • pour les usagers du service public, il faudra admettre des services en perpétuelle évolution dans l’accessibilité, les contenus, les formats… Cette prise de conscience devra s’accompagner d’une acceptation de l’imperfection, de l’expérimentation, voire de l’abandon de certains services. L’image d’une administration faiblement adaptable mais fiable et constante se trouvera transformée en territoire public flexible, à géométrie variable, réactif et parfois pris en défaut. Une gestion organisée de la relation citoyenne deviendra vite indispensable.

Ensuite, l’administration 2.0 n’échappe pas à certaines problématiques spécifiques à l’univers de la numérisation de l’information. Les pouvoirs publics doivent être particulièrement attentifs aux risques majeurs suivants :

  • la circulation non sécurisée de données à caractère privé ou confidentiel ;
  • l’exclusion de catégories d’usagers particulièrement exposés à la « fracture numérique » (personnes à faibles revenus, personnes âgées, malvoyants…) ;
  • le transfert de coûts d’équipement vers les citoyens-usagers (ordinateurs, connexions…) ;
  • Les barrières « culturelles » et le manque de compétences informatiques ;
  • Le risque de perte d’autonomie de gestion par la mutualisation ou le partenariat ;
  • La gestion de l’e-réputation de l’administration, des élus, voire des agents publics ;
  • Le risque économique de projets innovants, qui peut susciter commentaires ou rejet ;
  • L’identité numérique et cercle de confiance spécifique aux collectivités ;
  • Le risque de rupture de partenariat inhérent à toute collaboration.

 

Enfin, la réglementation qui s’est sédimentée pendant des décennies n’est pas toujours adaptée aux évolutions rapides proposées par les solutions numériques d’aujourd’hui et de demain. Cela supposera interprétation et peut-être certaines prises de risques pour faire évoluer les services offerts vers une approche innovante et compatible avec les technologies et les attentes du moment malgré l’inadéquation réglementaire éventuelle.

Ces limites sont inhérentes aux approches numériques. Elles n’ont pas empêché la naissance d’une nouvelle économie mondiale, dynamique et génératrice de valeur, au sein de laquelle le service public est désormais en mesure de prendre une place éminente.

Au travers d’une conjonction de facteurs exogènes et endogènes, l’administration 2.0 pourrait devenir, dans les cinq années à venir, la nouvelle offre de service public adaptée aux attentes et aux contraintes constatées actuellement. Offre conçue et portée en partenariat, elle peut être assimilée à une nouvelle politique publique de grands travaux. Ces travaux très largement numériques et immatériels vont devoir se fonder sur de nouvelles organisations et de nouvelles méthodes à imaginer et à acclimater.

Les défis qui se posent aujourd’hui trouvent déjà matière à être relevés grâce aux ressources humaines, technologiques et sociales émergentes. Il suffit de peu pour que le service public numérique s’incarne dans la réalité, certains l’ont déjà compris.

Nos dernières études
Commentaires (0)
Commentaires (0)
Commenter

Aucun commentaire.